Le Khalife général des Mourides, Serigne Bara, a rendu visite au Palais. Certains voient à travers cette visite une récupération politique de la part de Me Wade. Partagez-vous ce point de vue ?
D’après ce qu’a raconté la presse, c’est un marabout (Serigne Bara Mbacké) qui a rendu visite à son talibé (Me Wade). Mais, j’en déduis deux lectures: d’une part, on dit que le magistère de Serigne Bara marque une ère d’ouverture à l’égard de ses coreligionnaires. D’autre part, c’est un Mouridisme qui discute son avenir dans les instances politiques. Le 20 mars 2000, Wade a réussi un grand coup en venant s’agenouiller devant Serigne Saliou Mbacké. Une opération de charme qui avait séduit toute la communauté Mouride. Ainsi, Wade était rentré dans les bonnes grâces des talibés. En fin politicien, Wade a voulu rééditer le coup de 2000, parce que depuis 8 ans, beaucoup d’eau ont coulé sous les ponts. Son état de grâce a commencé à s’effriter. Les populations sont harassées par la cherté de la vie, même si l’inflation est mondiale. Les détournements à grande échelle ont remis en cause l’état de grâce de Wade. Le Wade qui avait séduit les Sénégalais par ses promesses, ses prétentions, s’est révélé un fossoyeur de l’économie, un totalitaire. Alors, Wade a fait des pieds et des mains, par l’entremise de Me Madické Niang, pour faire venir Serigne Bara (au Palais). Que Wade ne s’y trompe pas ! Le climat social est tendu et les populations sont poussées dans leur dernier retranchement.
Et, pour désamorcer cette tension sociale, Wade procède d’abord à des intimidations et à des menaces à l’endroit des journalistes, parce qu’il a la hantise d’un soulèvement populaire. C’est pour cela que Serigne Bara nous est imposé comme régulateur social.
Pourquoi vous dites que «est imposé» ?
Il y a deux manières d’imposer quelqu’un aux gens : lorsqu’on écoute le discours des politiciens comme Farba Senghor, on entend dire que Serigne Bara est un régulateur social. Par exemple, Macky Sall est allé le voir pour qu’il le réconcilie avec Wade ; idem pour Mbaye Jacques Diop. Wade sait qu’en cas de soulèvement de la population, Serigne Bara va s’adresser à elle (la population) pour l’apaiser. Alors, il aura les coudées franches pour faire ses exactions contre le peuple sénégalais, après qu’il a réussi à corrompre l’intelligentsia. Mais, si Wade pense que Serigne Bara peut constituer un épouvantail pour contenir la colère des populations, il se trompe. Les populations sont martyrisées et en veulent à Wade. Les Mourides sont connus pour leur unité, mais ils ont tous une même vision : la cause de l’Islam et du Mouridisme ; donc, ils ne sauraient cautionner servilement la politique de Wade. Ils n’obéiront pas à ses desiderata. Tout régulateur social qui n’ose pas dire à Wade : «Maître, vous êtes déraisonnable, on ne saurait point tolérer qu’au moment où les Sénégalais tirent le diable par la queue, des individus mènent une vie de Cocagne», ses paroles n’auront aucune résonance auprès des Sénégalais. Qui qu’il puisse être. Si les Sénégalais décident de le (Wade) démettre démocratiquement, personne ne pourra intervenir.
Pourtant, le Khalife avait, à l’occasion de sa visite au Palais, demandé à Me Wade de trouver des solutions face à la crise sociale, mais aussi l’a invité à dialoguer avec l’opposition…
Je ne peux que saluer cette intervention en tant que talibé de Serigne Bara. Il représente une soupape pour la société, un régulateur social. Par conséquent, il doit s’enquérir du sort des populations. Et en tant que marabout de Wade, il doit lui dire la vérité, lui dire que les gens sont fatigués.
Les Assises (nationales), comme j’ai eu à le dire, sont un cadre de concertation et de propositions d’alternative. Elles peuvent être une approche novatrice qui vise à recueillir les doléances des populations. C’est en ce sens que les Assises sont importantes. Et Abdoulaye Wade devrait y participer.
Vous aviez fait une sortie, on se le rappelle, pour dénoncer la lenteur notée dans le démarrage des travaux de Touba, alors que l’enveloppe avait été déjà dégagée par Serigne Saliou. Ce qui est effectif depuis quelques temps. Vous devez vous en réjouir…
Ma position n’a pas varié. Lorsque Serigne Saliou remettait de l’argent à Wade et que j’avais constaté un retard dans le démarrage des travaux, je l’ai dénoncé. Et, à chaque fois que je constate de telles pratiques avec l’argent de Serigne Touba, j’adopterai la même position.
D’ailleurs, je vais te faire part d’une complainte formulée par certains membres de la famille de feu Serigne Saliou. Ils disent que lorsque Serigne Saliou collectait tout cet argent (destiné aux travaux de Touba), il s’est privé de beaucoup de privilèges. Son seul but était de rénover la ville de Touba. Cet argent s’élève à 17 milliards de francs Cfa et non 19 milliards comme le soutiennent certains. Wade a fait une contribution de 2 milliards avant de les récupérer. Lorsque Serigne Saliou est décédé, son khalife, Serigne Cheikh a, alors, demandé sa part ; on lui en a donné 1 milliard 500 millions. Les autres fils de Serigne ont estimé, eux, que leur défunt père avait souhaité qu’on utilise cet argent pour les travaux de Touba, sont allés remettre cet argent au nouveau khalife, Serigne Bara. Mais, actuellement, il y a des grincements au sein de famille. Certains d’entre eux pensent que le marché qui a été confié à la société Baol Construction pour la réfection d’une partie de la mosquée est estimé entre 2 milliards 500 millions et 3 milliards, alors qu’aux yeux des gens, le coût de la prestation ne s’élève même pas à 500 millions.
C’est pourquoi la presse avait parlé, en son temps, de la préservation de l’héritage de Serigne Saliou. Je rappelle que le Khalife (Serigne Bara) a versé un acompte d’un milliard. C’est officiel. Aussi, le marché ne répond à aucun critère de transparence. Il n’y a eu aucun appel d’offres. Ce qui fait dire à la famille de Serigne Saliou que le coût de la prestation ne correspond pas au coût réel.
Qu’est-ce que cela peut avoir comme conséquences ?
Cela peut entraîner un regain de frustration. Il est grand temps que les chantiers (effectués à Touba) respectent les règles de bonne gouvernance. Parce que les marchés de gré à gré peuvent susciter des frustrations d’autant que l’argent appartient à feu Serigne Saliou,
Vous dites également que Me Wade a retiré les 2 milliards qu’il avait donnés à titre de contribution. Qu’est-ce qui vous le fait dire ?
Ça c’est connu. C’est Wade lui-même qui avait déclaré solennellement qu’il s’engageait à prendre entièrement les travaux de modernisation de la ville Touba à raison de 20 milliards francs Cfa par an. Ce, pendant 5 ans ; ce qui fera 100 milliards. S’il revient, maintenant, pour retirer 2 milliards de l’argent déjà versé, à mon avis, il devrait le dire publiquement.
Selon vous, pourquoi il a pris cet argent ?
A sa décharge, Wade, en prenant ces engagements, avait sans doute misé sur les bailleurs de fonds. Malheureusement, ces derniers ne se sont pas manifestés, ayant peut-être des réticences. Et comme les entreprises qui effectuent les travaux connaissent des difficultés de trésorerie, il (Wade) s’est dit pourquoi pas ne pas récupérer ces 2 milliards et payer les entreprises. L’entreprise Henan-Chine a connu une cessation de paiement.
gbaya@lequotidien.sn
D’après ce qu’a raconté la presse, c’est un marabout (Serigne Bara Mbacké) qui a rendu visite à son talibé (Me Wade). Mais, j’en déduis deux lectures: d’une part, on dit que le magistère de Serigne Bara marque une ère d’ouverture à l’égard de ses coreligionnaires. D’autre part, c’est un Mouridisme qui discute son avenir dans les instances politiques. Le 20 mars 2000, Wade a réussi un grand coup en venant s’agenouiller devant Serigne Saliou Mbacké. Une opération de charme qui avait séduit toute la communauté Mouride. Ainsi, Wade était rentré dans les bonnes grâces des talibés. En fin politicien, Wade a voulu rééditer le coup de 2000, parce que depuis 8 ans, beaucoup d’eau ont coulé sous les ponts. Son état de grâce a commencé à s’effriter. Les populations sont harassées par la cherté de la vie, même si l’inflation est mondiale. Les détournements à grande échelle ont remis en cause l’état de grâce de Wade. Le Wade qui avait séduit les Sénégalais par ses promesses, ses prétentions, s’est révélé un fossoyeur de l’économie, un totalitaire. Alors, Wade a fait des pieds et des mains, par l’entremise de Me Madické Niang, pour faire venir Serigne Bara (au Palais). Que Wade ne s’y trompe pas ! Le climat social est tendu et les populations sont poussées dans leur dernier retranchement.
Et, pour désamorcer cette tension sociale, Wade procède d’abord à des intimidations et à des menaces à l’endroit des journalistes, parce qu’il a la hantise d’un soulèvement populaire. C’est pour cela que Serigne Bara nous est imposé comme régulateur social.
Pourquoi vous dites que «est imposé» ?
Il y a deux manières d’imposer quelqu’un aux gens : lorsqu’on écoute le discours des politiciens comme Farba Senghor, on entend dire que Serigne Bara est un régulateur social. Par exemple, Macky Sall est allé le voir pour qu’il le réconcilie avec Wade ; idem pour Mbaye Jacques Diop. Wade sait qu’en cas de soulèvement de la population, Serigne Bara va s’adresser à elle (la population) pour l’apaiser. Alors, il aura les coudées franches pour faire ses exactions contre le peuple sénégalais, après qu’il a réussi à corrompre l’intelligentsia. Mais, si Wade pense que Serigne Bara peut constituer un épouvantail pour contenir la colère des populations, il se trompe. Les populations sont martyrisées et en veulent à Wade. Les Mourides sont connus pour leur unité, mais ils ont tous une même vision : la cause de l’Islam et du Mouridisme ; donc, ils ne sauraient cautionner servilement la politique de Wade. Ils n’obéiront pas à ses desiderata. Tout régulateur social qui n’ose pas dire à Wade : «Maître, vous êtes déraisonnable, on ne saurait point tolérer qu’au moment où les Sénégalais tirent le diable par la queue, des individus mènent une vie de Cocagne», ses paroles n’auront aucune résonance auprès des Sénégalais. Qui qu’il puisse être. Si les Sénégalais décident de le (Wade) démettre démocratiquement, personne ne pourra intervenir.
Pourtant, le Khalife avait, à l’occasion de sa visite au Palais, demandé à Me Wade de trouver des solutions face à la crise sociale, mais aussi l’a invité à dialoguer avec l’opposition…
Je ne peux que saluer cette intervention en tant que talibé de Serigne Bara. Il représente une soupape pour la société, un régulateur social. Par conséquent, il doit s’enquérir du sort des populations. Et en tant que marabout de Wade, il doit lui dire la vérité, lui dire que les gens sont fatigués.
Les Assises (nationales), comme j’ai eu à le dire, sont un cadre de concertation et de propositions d’alternative. Elles peuvent être une approche novatrice qui vise à recueillir les doléances des populations. C’est en ce sens que les Assises sont importantes. Et Abdoulaye Wade devrait y participer.
Vous aviez fait une sortie, on se le rappelle, pour dénoncer la lenteur notée dans le démarrage des travaux de Touba, alors que l’enveloppe avait été déjà dégagée par Serigne Saliou. Ce qui est effectif depuis quelques temps. Vous devez vous en réjouir…
Ma position n’a pas varié. Lorsque Serigne Saliou remettait de l’argent à Wade et que j’avais constaté un retard dans le démarrage des travaux, je l’ai dénoncé. Et, à chaque fois que je constate de telles pratiques avec l’argent de Serigne Touba, j’adopterai la même position.
D’ailleurs, je vais te faire part d’une complainte formulée par certains membres de la famille de feu Serigne Saliou. Ils disent que lorsque Serigne Saliou collectait tout cet argent (destiné aux travaux de Touba), il s’est privé de beaucoup de privilèges. Son seul but était de rénover la ville de Touba. Cet argent s’élève à 17 milliards de francs Cfa et non 19 milliards comme le soutiennent certains. Wade a fait une contribution de 2 milliards avant de les récupérer. Lorsque Serigne Saliou est décédé, son khalife, Serigne Cheikh a, alors, demandé sa part ; on lui en a donné 1 milliard 500 millions. Les autres fils de Serigne ont estimé, eux, que leur défunt père avait souhaité qu’on utilise cet argent pour les travaux de Touba, sont allés remettre cet argent au nouveau khalife, Serigne Bara. Mais, actuellement, il y a des grincements au sein de famille. Certains d’entre eux pensent que le marché qui a été confié à la société Baol Construction pour la réfection d’une partie de la mosquée est estimé entre 2 milliards 500 millions et 3 milliards, alors qu’aux yeux des gens, le coût de la prestation ne s’élève même pas à 500 millions.
C’est pourquoi la presse avait parlé, en son temps, de la préservation de l’héritage de Serigne Saliou. Je rappelle que le Khalife (Serigne Bara) a versé un acompte d’un milliard. C’est officiel. Aussi, le marché ne répond à aucun critère de transparence. Il n’y a eu aucun appel d’offres. Ce qui fait dire à la famille de Serigne Saliou que le coût de la prestation ne correspond pas au coût réel.
Qu’est-ce que cela peut avoir comme conséquences ?
Cela peut entraîner un regain de frustration. Il est grand temps que les chantiers (effectués à Touba) respectent les règles de bonne gouvernance. Parce que les marchés de gré à gré peuvent susciter des frustrations d’autant que l’argent appartient à feu Serigne Saliou,
Vous dites également que Me Wade a retiré les 2 milliards qu’il avait donnés à titre de contribution. Qu’est-ce qui vous le fait dire ?
Ça c’est connu. C’est Wade lui-même qui avait déclaré solennellement qu’il s’engageait à prendre entièrement les travaux de modernisation de la ville Touba à raison de 20 milliards francs Cfa par an. Ce, pendant 5 ans ; ce qui fera 100 milliards. S’il revient, maintenant, pour retirer 2 milliards de l’argent déjà versé, à mon avis, il devrait le dire publiquement.
Selon vous, pourquoi il a pris cet argent ?
A sa décharge, Wade, en prenant ces engagements, avait sans doute misé sur les bailleurs de fonds. Malheureusement, ces derniers ne se sont pas manifestés, ayant peut-être des réticences. Et comme les entreprises qui effectuent les travaux connaissent des difficultés de trésorerie, il (Wade) s’est dit pourquoi pas ne pas récupérer ces 2 milliards et payer les entreprises. L’entreprise Henan-Chine a connu une cessation de paiement.
gbaya@lequotidien.sn