leral.net | S'informer en temps réel

Touba : Le boom des marchés spécialisés

Deuxième ville du Sénégal au plan démographique, la ville religieuse de Touba compte à ce jour 23 marchés urbains fonctionnels et plus de 11 réserves foncières destinées spécifiquement à l'emplacement de marchés. Ceux-ci sont équitablement répartis à travers la ville car, à l'exception de Touba Guédé, chaque village renferme au moins un marché du côté intérieur de la corniche, alors que 15 autres sont répartis à la périphérie et dans les directions principales de la ville.


Rédigé par leral.net le Lundi 13 Décembre 2010 à 04:35 | | 0 commentaire(s)|

Touba : Le boom des marchés spécialisés
Touba compte deux catégories de marchés. Les marchés mixtes sont au nombre de 21, où se vendent toutes sortes de produits en plus des activités artisanales. Il y a ensuite les marchés spécialisés au nombre de deux qui sont consacrés à la vente d'un produit ou d'un nombre restreint de produits particuliers.

Selon le dynamisme et l'aménagement, un échantillon de trois marchés se dégage du lot : d'abord le célèbre marché Ocass au centre de la ville ; le marché de Darou Khoudoss pour son ancienneté et celui récent de Djanatou Mahwa pour sa modernité. Ensemble, ces structures offrent tous les choix de produits, mais le renchérissement des marchandises pèse souvent lourd sur le panier de la ménagère.

Du « louma » au complexe commercial moderne

El Hadji Mamoune Seck est l'un des anciens du marché Ocass, aux mains de qui repose la gestion depuis 1979, date a laquelle Serigne Abdoul Ahad lui en avait confié les rênes. Agé de plus de 70 ans, il convoque l'histoire pour mieux expliquer la baraka de ce grand lieu de commerce. « C'est le deuxième khalife du Mouridisme, El Hadji Fallou Mbacké qui fit une prière sur du sable et demanda qu'on le répande auprès du grand baobab qui y trônait. Une fois sur les lieux, son émissaire en informa l'assistance et s'acquitta de sa mission. Dans un premier temps, poursuit Serigne Mamoune Seck, c’était un marché hebdomadaire tous les vendredis. Cela dura tout au long de son califat, au pied du baobab et les populations l'ont eux-mêmes transformé en marché quotidien à force de ne plus attendre les vendredis pour exposer leurs marchandises. Ainsi naquit le plus grand marché de Touba. Avec l'avènement du khalifat de Serigne Abdoul Ahad Mbacké, après le passage d’un grave incendie, le marché a été entièrement rénové en 1975 et livré en 1977, date à laquelle le président Léopold Sédar Senghor descendit d'un hélicoptère pour l’inaugurer en tant que marché Ocass.

Depuis 1979 avec 10 autres responsables nous supervisons le marché Ocass, se plait à rappeler Serigne Seck.

Aujourd'hui, c'est le marché le plus dynamique et le plus dense de Touba, c'est le seul qui fait l'objet d'une occupation intégrale, toutes les places étant exploitées, contrairement aux autres marchés de la ville.

Le marché Ocass est en cela un cas particulier de dynamisme. Il y a un flux permanent de grossistes, de détaillants, de vendeurs et de clients, qui fait qu'il ne désemplit pas de la journée. C'est le principal centre d'approvisionnement des marchés mixtes. Son attrait sur les populations et sa domination de l'activité économique de la ville est d'une grande intensité selon M. Yade qui tient une boutique à Djanatou Mahwa et venu se ravitailler chez un grossiste. Cette situation, selon un autre boutiquier nommé Gora Sakho, explique pourquoi certains commerçants ont délaissé des marchés mixtes au profit du marché Ocass. Ne trouvant plus de places disponibles, les nouveaux venus s'installent dans les maisons des environs, très vite transformées en complexes commerciaux, en magasins et cantines ou en modèles réduit de centres commerciaux modernes. Les plus malheureux, qui ne disposent pas de local stable, s’installent de manière anarchique dans les rues du marché qui s’étale sur un rayon de 150m. C'est le phénomène qui aggrave le déséquilibre entre Ocass et les autres marchés mixtes en quête de dynamisme.

Par ailleurs, la majorité des habitants de Touba font leur marché à Ocass qui monopolise jusqu'a présent la vente au détail et la friperie. Cette prépondérance tient à plusieurs aspects, selon El Hadji Massamba Fam qui révèle que la baraka de son créateur El Hadji Fallou Mbacké a frappé de plein fouet l'emplacement du marché, de sorte que tout converge vers Ocass. Il y a aussi un aspect non négligeable pour un marché, sa position géographique centrale à l'aboutissement des deux principaux axes venant l'un de la ville de Mbacké et l'autre ouvrant sur la route de Dahra. De plus, l’ensemble des lignes de transports desservent le marché. Enfin, la proximité avec les principaux lieux de culte constitue un atout de taille. Le marché Ocass attire beaucoup trop de monde, l'espace commercial s'étirant de jour en jour, ce qui incite certains à parler de zone en lieu et place de marché.

Une diversité de tous types de commerces confondus

L'emprise officielle du marché Ocass abrite essentiellement des activités commerciales. Mais on note à coté de celles-ci l'installation de beaucoup d'ateliers de tailleurs et de moulins, cohabitant avec des structures bancaires et dépôts de pharmacie, entre autre.

L'odeur âcre du fer dans les forges domine dans les ateliers de mécaniciens et tôliers, l'étalage des cordonniers, les boutiques d’informaticiens, etc. dans une zone submergée d'activités. Non loin toujours du cœur du marché, les vendeurs et réparateurs de téléphones portables, les confectionneuses de pagnes côtoient boulangers, frigoristes et mécaniciens auto motos et commerçants de volailles. La partie nord du marché abrite la friperie, les tissus, etc., les produits pharmaceutiques, l'électroménager et la quincaillerie diverse qui semblent faire bon ménage avec les produits cosmétiques et de parfumerie près d'une alimentation générale à la devanture de laquelle sont exposées des chaussures.

La partie sud de ce grand et dynamique marché est réservée à la vente des ustensiles de cuisine, des légumes en gros provenant de l'hinterland ou acheminés par les commerçants de Diaobé, de la viande et des poissons en gros et au détail. Dans ces halles, le brouhaha des ménagères se mêle à l'odeur du café moulu dans une unité de transformation de céréales côtoyant un établissement bancaire flanqué d’étals consacrés à une multitude de produits à usage divers.

Vers l'ouest se trouve le site des acteurs du marché de Diaobé, les produits agricoles (arachide, mangue, etc.) laitiers frais, en provenance des villages limitrophes de Touba souvent convoyés par des femmes, un melting pot de vendeurs ambulants et un marché noir appelé "Market" qui a vu récemment El Hadji Bara Fallilou demander aux services d'ordre de le « nettoyer » à cause d'une réputation en porte-à-faux avec le statut de la ville religieuse.

Enfin, à l'est de la rue 28, foisonnent les structures bancaires, d'épargne et de change.

Des produits du terroir aux importations

Les fournisseurs d’Ocass résident en majorité à Dakar, d’où ils envoient leurs marchandises aux grossistes dont les entrepôts et magasins, reçoivent ensuite les détaillants en provenance des différents marchés et quartiers de la ville. Ils fournissent ainsi tous les produits manufacturés fabriqués au Sénégal, importés et commercialisés à partir de la zone industrielle et du port de Dakar. Le ciment de la Sococim et des Cimenteries du Sahel, le sucre de la Compagnie sucrière sénégalaise (Css), ainsi qu’une partie importante issue de la contrebande, notamment les produits alimentaires, les tissus, la friperie, les téléphones portables, etc. Le poisson en provenance de Mbour, Joal, Dakar, Thiès est dominé par la sardine. Le marché de Ngiranène est excentré, mais constitue le point focal ou les camions frigos déversent leurs cargaisons avant que les détaillants ne rappliquent pour écouler le produit au marché Ocass.

La clientèle est cosmopolite, constituée de jeunes, d’adolescents, d’adultes hommes et quelques vieilles personnes et presque pas d'enfants. En général, les ménagères venant des grandes familles religieuses comme Sokhna Astou viennent s'approvisionner mensuellement, accompagnée d’une petite cour chargée de faire les menues courses avant l'arrivé de la voiture qui les ramènera vers Madyana, Alieu, etc.

Les ouvriers et les boutiquiers de quartiers périphériques aussi parcourent des kilomètres pour s'approvisionner. Il y a aussi les voyageurs de passage qui font un saut à Ocass pour ramener des cadeaux. Enfin, ce sont les commerçants des autres marchés mixtes de la ville, les pèlerins et les « dahiras » en provenance des autres villes du pays, surtout à l’occasion des événements religieux d'envergure comme le grand Magal de Touba. Le pouvoir d'achat est variable, il est important à l'approche des grands événements religieux, du fait de la venue des expatriés, mais aussi de la mobilisation des fonds par les organisations religieuses comme les « dahiras », « daaras », etc. Cependant, il est à noter qu'au marché Ocass les marchandises existent pour toutes les bourses.

Un reportage de Mamadou DIEYE
source Le Soleil


(Plus d'informations demain sur leral .net)