Quand un ressortissant d’un pays qui se respecte, subit une injustice, son gouvernement intervient. Combien de Sénégalais sont soutenus en cas de pépin à l’étranger ? Combien de Sénégalais croupissent dans des prisons à travers le monde et parfois pour des délits ou crimes qu’ils n’ont pas commis ? Notre excentrique président de la République, toujours égal à lui-même, met ses babouches pour aller « libérer » une Française détenue en Iran. Quelques années auparavant, se servant de sa cuillère d’alors (Cheikh Tidiane Gadio, ministre des Affaires étrangères), il voulait signer un accord avec la Suisse pour que tout Africain que ce pays veut refouler, mais qui refuse de décliner son identité, soit largué au Sénégal pour, officiellement, trois jours. En 2006, n’est-ce pas encore le président Wade qui avait signé un « accord historique » avec le ministre Sarkozy ? Ce dernier avait parlé d’accords de réadmission devant permettre l’expulsion mutuelle de Sénégalais ou de Français « qui se comportent mal » ou « qui n’ont pas de papiers ». Pour Wade, c’était apparemment de la réciprocité, alors que les Français n’avaient même pas besoin de visa pour débarquer au Sénégal.
Qui veut se débarrasser de qui ? Que des « Tubaab » et autres viennent chez nous en touristes, pour des affaires ou dans des buts peu louables, ne semble point importuner l’Etat. Bien au contraire. Disons-le clairement : Ils ne veulent pas de nous chez eux, mais nous voulons d’eux chez nous. Tout est faussé dès le départ. Irons-nous jusqu’à leur infliger l’humiliation de faire la queue pendant des heures, dans la rue, sous le soleil ou la neige, devant nos ambassades ? Irons-nous jusqu’à expulser leurs sans-papiers en les menottant pour les balancer comme du bétail dans des charters ? C’est pratiquement impensable.
La réciprocité serait de leur dire : « Gardez vos frontières, nous gardons nos richesses minières pour les exploiter nous-mêmes. » « Au lieu de nous aider à surveiller nos eaux territoriales pour que nos enfants, accablés par la misère, ne les quittent pas dans des pirogues du désespoir, aidez-nous, avec ces mêmes moyens et cette même détermination, à traquer vos bateaux qui nous dépouillent de nos poissons. » Tout le reste n’est que piqure de moustique sur la peau d’un pachyderme.
Comment un pays qui peine à renouveler à temps les passeports de ses ressortissants peut-il y rajouter d’autres dossiers ? Les témoignages sont unanimes : C’est la pagaille dans la plupart des ambassades. Tout y est lenteur et laisser-aller, comme partout dans l’administration sénégalaise. De plus, quand on sait que pour se procurer une pièce d’état civil qui lui revient de droit, le citoyen doit souvent verser un pot de vin, on peut s’imaginer ce que cela donnera avec les visas qu’on peut refuser ou faire attendre abusivement et mesquinement, sachant que le demandeur a un deadline. Il lui faudra payer sur la table et sous la table. Ces magouilles ne feront que ternir l’image déjà amochée de notre cher pays. Les touristes et les hommes d’affaires se tourneront alors vers d’autres destinations où la corruption n’a pas des effluves qui traversent les océans et donnent la nausée à quiconque formule le désir de s’y rendre. Les Sénégalais qui ont pris une autre nationalité, eux, n’auront pas le choix, surtout s’ils doivent se rendre d’urgence auprès des leurs. D’autre part, cette réciprocité ne peut en rien changer la situation des Sénégalais demandeurs de visas ou émigrés.
Nous sommes en droit de penser que tout ce que Wade voit dans cette affaire de réciprocité, c’est l’argent qui va rentrer dans les caisses du Trésor public qu’il semble déplorablement confondre avec sa poche. Nous l’avions dit, le panier troué qu’est devenu l’Etat n’hésite pas à presser les individus comme des citrons. Après avoir bradé presque tous les biens nationaux, il fouine et grignote partout, tel un rat d’égout. Il a augmenté les taxes sur les billets d’avion, puis sur les appels entrants aux Sénégal. C’est passé comme une lettre à la poste. Et maintenant, les gens payent pour de l’électricité qu’ils n’ont pas consommée. Pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? Il suffit de prétendre que c’est dans l’intérêt de la Nation ou pour restaurer notre dignité bafouée, et la voie est libre.
Souvenons-nous de l’affaire Global Voice Group. On nous avait dit que c’était pour « diminuer les marges des opérateurs internationaux, c’est-à-dire les intérêts du capital étranger », pour lutter contre la fraude, pour nous doter d’« une reproduction économique adaptée aux réalités du pays et à l’environnement global des télécommunications »… De « nobles causes » pour nous jeter de la poudre aux yeux. En vérité, c’était juste une drastique et ignoble augmentation tarifaire. 51% du butin devaient revenir à l’Etat et 49% à la société étrangère Gvg. Le contrat étant mort-né, rien de ce qui était promis n’a vu le jour, mais on a quand même conservé les tarifs exorbitants. Où vont donc les sommes que l’on continue d’extorquer aux Sénégalais de la diaspora qui appellent au pays ?
Ah ! Comme nous serions rassurés et fiers si nous étions convaincus que les fonctionnaires chargés de délivrer les visas feront correctement leur travail, avec la conscience professionnelle et le patriotisme que cela requiert, et que les populations verront la couleur de l’argent récolté ! Mais, chat échaudé craignant l’eau froide, nous nous demandons suspicieusement : A qui profitera cette réciprocité ?
Bathie Ngoye THIAM
Qui veut se débarrasser de qui ? Que des « Tubaab » et autres viennent chez nous en touristes, pour des affaires ou dans des buts peu louables, ne semble point importuner l’Etat. Bien au contraire. Disons-le clairement : Ils ne veulent pas de nous chez eux, mais nous voulons d’eux chez nous. Tout est faussé dès le départ. Irons-nous jusqu’à leur infliger l’humiliation de faire la queue pendant des heures, dans la rue, sous le soleil ou la neige, devant nos ambassades ? Irons-nous jusqu’à expulser leurs sans-papiers en les menottant pour les balancer comme du bétail dans des charters ? C’est pratiquement impensable.
La réciprocité serait de leur dire : « Gardez vos frontières, nous gardons nos richesses minières pour les exploiter nous-mêmes. » « Au lieu de nous aider à surveiller nos eaux territoriales pour que nos enfants, accablés par la misère, ne les quittent pas dans des pirogues du désespoir, aidez-nous, avec ces mêmes moyens et cette même détermination, à traquer vos bateaux qui nous dépouillent de nos poissons. » Tout le reste n’est que piqure de moustique sur la peau d’un pachyderme.
Comment un pays qui peine à renouveler à temps les passeports de ses ressortissants peut-il y rajouter d’autres dossiers ? Les témoignages sont unanimes : C’est la pagaille dans la plupart des ambassades. Tout y est lenteur et laisser-aller, comme partout dans l’administration sénégalaise. De plus, quand on sait que pour se procurer une pièce d’état civil qui lui revient de droit, le citoyen doit souvent verser un pot de vin, on peut s’imaginer ce que cela donnera avec les visas qu’on peut refuser ou faire attendre abusivement et mesquinement, sachant que le demandeur a un deadline. Il lui faudra payer sur la table et sous la table. Ces magouilles ne feront que ternir l’image déjà amochée de notre cher pays. Les touristes et les hommes d’affaires se tourneront alors vers d’autres destinations où la corruption n’a pas des effluves qui traversent les océans et donnent la nausée à quiconque formule le désir de s’y rendre. Les Sénégalais qui ont pris une autre nationalité, eux, n’auront pas le choix, surtout s’ils doivent se rendre d’urgence auprès des leurs. D’autre part, cette réciprocité ne peut en rien changer la situation des Sénégalais demandeurs de visas ou émigrés.
Nous sommes en droit de penser que tout ce que Wade voit dans cette affaire de réciprocité, c’est l’argent qui va rentrer dans les caisses du Trésor public qu’il semble déplorablement confondre avec sa poche. Nous l’avions dit, le panier troué qu’est devenu l’Etat n’hésite pas à presser les individus comme des citrons. Après avoir bradé presque tous les biens nationaux, il fouine et grignote partout, tel un rat d’égout. Il a augmenté les taxes sur les billets d’avion, puis sur les appels entrants aux Sénégal. C’est passé comme une lettre à la poste. Et maintenant, les gens payent pour de l’électricité qu’ils n’ont pas consommée. Pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? Il suffit de prétendre que c’est dans l’intérêt de la Nation ou pour restaurer notre dignité bafouée, et la voie est libre.
Souvenons-nous de l’affaire Global Voice Group. On nous avait dit que c’était pour « diminuer les marges des opérateurs internationaux, c’est-à-dire les intérêts du capital étranger », pour lutter contre la fraude, pour nous doter d’« une reproduction économique adaptée aux réalités du pays et à l’environnement global des télécommunications »… De « nobles causes » pour nous jeter de la poudre aux yeux. En vérité, c’était juste une drastique et ignoble augmentation tarifaire. 51% du butin devaient revenir à l’Etat et 49% à la société étrangère Gvg. Le contrat étant mort-né, rien de ce qui était promis n’a vu le jour, mais on a quand même conservé les tarifs exorbitants. Où vont donc les sommes que l’on continue d’extorquer aux Sénégalais de la diaspora qui appellent au pays ?
Ah ! Comme nous serions rassurés et fiers si nous étions convaincus que les fonctionnaires chargés de délivrer les visas feront correctement leur travail, avec la conscience professionnelle et le patriotisme que cela requiert, et que les populations verront la couleur de l’argent récolté ! Mais, chat échaudé craignant l’eau froide, nous nous demandons suspicieusement : A qui profitera cette réciprocité ?
Bathie Ngoye THIAM