Un groupe de curieux s’approche pour savoir ce qui est arrivé. Le constat est froid, dur, brutal. Une femme était tombée de la tour et s’était fracassée au sol. Petit à petit, l’information a circulé, de bouches à oreilles. « C’est une collègue », dit l’un, « elle aurait sauté volontairement », dit un autre, « elle se serait précipité dans le vide depuis la terrasse du 22e étage », affirme la troisième. L’appel au coroner a été fait par les services de police à 15h39. La victime avait 43 ans, elle avait un mari, deux enfants. Pourquoi Sira N’Diaye s’était-elle suicidée, en se jetant de la terrasse du 22e étage de la tour de la Standard Life à Montréal?
UN SUICIDE QUI NE DOIT PAS RESTER SANS SUITE
Une lettre anonyme, parvenue à La Métropole, nécessite cette enquête d’intérêt public. Si un tel acte a pu avoir lieu, est-ce une pure affaire personnelle? Comment la victime a-t-elle pu avoir accès à une terrasse accessible seulement au personnel de sécurité? Existe-t-il un lien avec son employeur, une des principales compagnies d’assurance au pays?
LE TEXTE DE LA LETTRE POSE EN TOUS CAS LES BONNES QUESTIONS
« Vous excuserez mon anonymat, car je sais que la Standard Life veut taire cet affreux évènement….Une employée de la Standard Life s’est jetée du haut des 22 étages…Elle laisse derrière elle, deux jeunes enfants et un mari, des amis, des collègues. Elle a laissé une lettre à l’attention de sa famille qui vit aujourd’hui la plus grande des détresses. Il me semble important d’informer pour comprendre…pourquoi, pour qui, à cause de qui et dans quel désespoir profond cette jeune femme s’est vu acculée. On ne fait pas ce geste gratuitement, rien n’est du au hasard et tout est calculé…..L’employeur qui veut cacher l’affaire serait-il en cause?….Ce drame se doit de ne pas choir dans l’ignorance ».
LA STANDARD LIFE FAIT OBSTRUCTION
Notre enquête s’est d’abord dirigée vers la Standard Life. Après plusieurs appels téléphoniques infructueux, madame Ann-Marie Gagné, directrice des communications, nous a envoyé un bref courriel. « La Standard Life et l’ensemble de ses employés vivent un moment difficile depuis le décès de notre collègue Sira N’Diaye, jeudi dernier, à nos bureaux. Nos efforts en ce moment sont centrés sur le soutien à nos employés…. » Puis une aimable recommandation de ne pas enquêter : « Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) nous a appris que dans un cas de suicide, les médias ne couvrent pas l’incident, ce qui a été respecté par tous les médias jusqu’ici…. » En clair, cela signifie, reculez, il n’y a rien à voir.
N’étant pas complètement satisfaite par ce type de réponse, la Métropole s’est présentée il y a quelques jours au siège de Standard Life, pour tenter de rencontrer des collèges de la suicidée. Au restaurant, personne n’a eu l’air de la connaître. « Pas étonnant, il y a 1500 personnes qui travaillent dans cet immeuble », a indiqué un des convives. La présence d’un journaliste est une information qui monte très vite dans les étages. Madame Gagné s’est déplacée alors en personne pour interdire à votre journaliste tout contact en le priant de quitter les lieux. Un courriel est alors parvenu au journal, montrant à quel point la Standard Life souhaite empêcher toute enquête journalistique sur la cause de ce suicide. « À la suite de votre visite inopinée à nos bureaux, j’ai parlé à notre service juridique qui me confirme que je ne peux vous ….donner accès à nos employés. Les lois sont précises et le respect d’autrui est essentiel ».
UN SUICIDE QUI A ÉTÉ PRÉPARÉ
Madame Gagné indique que Sira était employée depuis 3 ans au sein de la compagnie et que « la police a trouvé un mot indiquant les raisons personnelles expliquant sa décision de s’enlever la vie ». Elle a reconnue que Sira n’aurait pas pu accéder à la terrasse sans l’aide d’une autre personne. Elle a ajouté que ce suicide était très difficile pour sa famille et troublant pour les employés de la Standard Life auxquels un soutien psychologique a été offert. Le contact avec le groupe de psychologues indiqué, la firme Shepell, n’a pas permis d’avoir confirmation que ce service a bel et bien été offert. La police n’a pas accepté non plus de permettre à la Métropole d’avoir accès à la lettre de la victime, ni aux coordonnées de sa famille. Yannick Paradis du SPVM n’a pas eu connaissance d’autres éléments que cette lettre pouvant expliquer le suicide.
UN SUICIDE MYSTÉRIEUX,
LA COMMUNAUTÉ SÉNÉGALAISE S'INTERROGE
Ce suicide n’est pas passé inaperçu dans la communauté sénégalaise de Montréal. La Métropole a appris qu’une cérémonie religieuse avait été organisée à la mémoire de la défunte et que le Rassemblement sénégalais avait envoyé des faires-parts. Mais lorsque l’on pose des questions plus précises, les interlocuteurs font marche arrière. Ce suicide demeure mystérieux. Non seulement à cause de la lettre reçue par la Métropole, mais également par la réaction extrêmement brutale de l’employeur face aux arguments apportés par cette lettre anonyme. Il n’y a eu aucun effort pour permettre un contact avec la famille, ou avec des collègues de la victime. Cette obstruction est suffisamment étrange pour que la Métropole fasse par la présente un appel à témoins.
CONSÉQUENCE DES TENSIONS PROFESSIONNELLES ?
Selon le médecin psychiatre Édouard Beltrami, il y a un type de maladies qui est difficile à cerner. « Il s’agit de ce qui est appelé dans la terminologie psychiatrique un trouble d’adaptation avec humeur dépressive et anxieuse qui n’a pas l’intensité d’une dépression majeure et qui, donc, n’attire pas l’attention des professionnels autant que les grosses pathologies psychiatriques. Cette terminologie psychiatrique englobe ce qu’on appelle communément le burn out, qui est un épuisement professionnel. Le milieu de travail devient de plus en plus agressif et il peut exister des cas de harcèlement. Ces cas, parfois difficiles à prouver, finissent par affecter par leur répétition et leur intensité, la personne qui les ressent ». Ces situations peuvent briser la carrière d’une personne qui en souffre.
Médecin psychiatre Édouard Beltrami
« Il m’est arrivé de voir il y a quelques années une infirmière extrêmement dévouée, travaillant pour une compagnie d’assurances, qui cherchait toujours une solution pour récupérer une personne en difficultés et trouver un mode de traitement. Elle m’a recontacté récemment en me disant à propos d’un patient : « Essayez d’envoyer cet homme aux Rentes du Québec ». Je lui répondis : « Je ne comprends pas, vous étiez très ouverte jusqu’ici à faire des traitements et de tout essayer avant d’en arriver là ». .Non, me répondit-elle, « maintenant les compagnies d’assurances ne veulent plus faire cela, ce ne sont pas des agences de bienfaisance mais des compagnies qui sont là pour faire de l’argent ».
Est-ce une piste pour expliquer le geste désespéré de Sari N’Diaye?
lametropole.com via piccmi.com
UN SUICIDE QUI NE DOIT PAS RESTER SANS SUITE
Une lettre anonyme, parvenue à La Métropole, nécessite cette enquête d’intérêt public. Si un tel acte a pu avoir lieu, est-ce une pure affaire personnelle? Comment la victime a-t-elle pu avoir accès à une terrasse accessible seulement au personnel de sécurité? Existe-t-il un lien avec son employeur, une des principales compagnies d’assurance au pays?
LE TEXTE DE LA LETTRE POSE EN TOUS CAS LES BONNES QUESTIONS
« Vous excuserez mon anonymat, car je sais que la Standard Life veut taire cet affreux évènement….Une employée de la Standard Life s’est jetée du haut des 22 étages…Elle laisse derrière elle, deux jeunes enfants et un mari, des amis, des collègues. Elle a laissé une lettre à l’attention de sa famille qui vit aujourd’hui la plus grande des détresses. Il me semble important d’informer pour comprendre…pourquoi, pour qui, à cause de qui et dans quel désespoir profond cette jeune femme s’est vu acculée. On ne fait pas ce geste gratuitement, rien n’est du au hasard et tout est calculé…..L’employeur qui veut cacher l’affaire serait-il en cause?….Ce drame se doit de ne pas choir dans l’ignorance ».
LA STANDARD LIFE FAIT OBSTRUCTION
Notre enquête s’est d’abord dirigée vers la Standard Life. Après plusieurs appels téléphoniques infructueux, madame Ann-Marie Gagné, directrice des communications, nous a envoyé un bref courriel. « La Standard Life et l’ensemble de ses employés vivent un moment difficile depuis le décès de notre collègue Sira N’Diaye, jeudi dernier, à nos bureaux. Nos efforts en ce moment sont centrés sur le soutien à nos employés…. » Puis une aimable recommandation de ne pas enquêter : « Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) nous a appris que dans un cas de suicide, les médias ne couvrent pas l’incident, ce qui a été respecté par tous les médias jusqu’ici…. » En clair, cela signifie, reculez, il n’y a rien à voir.
N’étant pas complètement satisfaite par ce type de réponse, la Métropole s’est présentée il y a quelques jours au siège de Standard Life, pour tenter de rencontrer des collèges de la suicidée. Au restaurant, personne n’a eu l’air de la connaître. « Pas étonnant, il y a 1500 personnes qui travaillent dans cet immeuble », a indiqué un des convives. La présence d’un journaliste est une information qui monte très vite dans les étages. Madame Gagné s’est déplacée alors en personne pour interdire à votre journaliste tout contact en le priant de quitter les lieux. Un courriel est alors parvenu au journal, montrant à quel point la Standard Life souhaite empêcher toute enquête journalistique sur la cause de ce suicide. « À la suite de votre visite inopinée à nos bureaux, j’ai parlé à notre service juridique qui me confirme que je ne peux vous ….donner accès à nos employés. Les lois sont précises et le respect d’autrui est essentiel ».
UN SUICIDE QUI A ÉTÉ PRÉPARÉ
Madame Gagné indique que Sira était employée depuis 3 ans au sein de la compagnie et que « la police a trouvé un mot indiquant les raisons personnelles expliquant sa décision de s’enlever la vie ». Elle a reconnue que Sira n’aurait pas pu accéder à la terrasse sans l’aide d’une autre personne. Elle a ajouté que ce suicide était très difficile pour sa famille et troublant pour les employés de la Standard Life auxquels un soutien psychologique a été offert. Le contact avec le groupe de psychologues indiqué, la firme Shepell, n’a pas permis d’avoir confirmation que ce service a bel et bien été offert. La police n’a pas accepté non plus de permettre à la Métropole d’avoir accès à la lettre de la victime, ni aux coordonnées de sa famille. Yannick Paradis du SPVM n’a pas eu connaissance d’autres éléments que cette lettre pouvant expliquer le suicide.
UN SUICIDE MYSTÉRIEUX,
LA COMMUNAUTÉ SÉNÉGALAISE S'INTERROGE
Ce suicide n’est pas passé inaperçu dans la communauté sénégalaise de Montréal. La Métropole a appris qu’une cérémonie religieuse avait été organisée à la mémoire de la défunte et que le Rassemblement sénégalais avait envoyé des faires-parts. Mais lorsque l’on pose des questions plus précises, les interlocuteurs font marche arrière. Ce suicide demeure mystérieux. Non seulement à cause de la lettre reçue par la Métropole, mais également par la réaction extrêmement brutale de l’employeur face aux arguments apportés par cette lettre anonyme. Il n’y a eu aucun effort pour permettre un contact avec la famille, ou avec des collègues de la victime. Cette obstruction est suffisamment étrange pour que la Métropole fasse par la présente un appel à témoins.
CONSÉQUENCE DES TENSIONS PROFESSIONNELLES ?
Selon le médecin psychiatre Édouard Beltrami, il y a un type de maladies qui est difficile à cerner. « Il s’agit de ce qui est appelé dans la terminologie psychiatrique un trouble d’adaptation avec humeur dépressive et anxieuse qui n’a pas l’intensité d’une dépression majeure et qui, donc, n’attire pas l’attention des professionnels autant que les grosses pathologies psychiatriques. Cette terminologie psychiatrique englobe ce qu’on appelle communément le burn out, qui est un épuisement professionnel. Le milieu de travail devient de plus en plus agressif et il peut exister des cas de harcèlement. Ces cas, parfois difficiles à prouver, finissent par affecter par leur répétition et leur intensité, la personne qui les ressent ». Ces situations peuvent briser la carrière d’une personne qui en souffre.
Médecin psychiatre Édouard Beltrami
« Il m’est arrivé de voir il y a quelques années une infirmière extrêmement dévouée, travaillant pour une compagnie d’assurances, qui cherchait toujours une solution pour récupérer une personne en difficultés et trouver un mode de traitement. Elle m’a recontacté récemment en me disant à propos d’un patient : « Essayez d’envoyer cet homme aux Rentes du Québec ». Je lui répondis : « Je ne comprends pas, vous étiez très ouverte jusqu’ici à faire des traitements et de tout essayer avant d’en arriver là ». .Non, me répondit-elle, « maintenant les compagnies d’assurances ne veulent plus faire cela, ce ne sont pas des agences de bienfaisance mais des compagnies qui sont là pour faire de l’argent ».
Est-ce une piste pour expliquer le geste désespéré de Sari N’Diaye?
lametropole.com via piccmi.com