L’organisation des élections au Sénégal est du ressort du ministère de l’Intérieur et de la Sécurité publique. Mais, cette mission est toujours source de polémiques entre pouvoir et opposition.
Compte tenu des nombreux couacs notés dans l’organisation des dernières élections législatives — lesquelles ont été coordonnées par un ministre de l’Intérieur membre du parti au pouvoir —, M. Abdoulaye Daouda Diallo, l’opposition a réclamé et a obtenu sa « tête ».
Hélas, en lieu et place d’une personnalité moins marquée politiquement, son remplaçant n’est autre que son camarade de parti Aly Ngouille Ndiaye. Ce dont l’Opposition ne veut pas entendre parler.
Elle continue en effet de réclamer une personnalité neutre pour organiser l’élection présidentielle du 24 février 2019. Faut-il retirer définitivement, l’organisation des élections au ministère de l’Intérieur? Le Témoin pose le débat…
Après le code consensuel de 1992, la tradition a voulu qu’un «militaire » occupât la fonction de ministre de l’Intérieur, chargé de l’organisation des élections. Les arrivées de Ousmane Ngom, de Abdoulaye Daouda Diallo et d’Aly Ngouille Ndiaye à la place Washington, ont mis fin à ce consensus qui garantissait la « neutralité » de l’institution chargée d’organiser les élections dans notre pays.
Le ministère de l’Intérieur est en effet au cœur du dispositif électoral national. Conscient de cela, l’opposition refuse donc d’agréer un chargé des élections membre du parti au pouvoir, plus précisément de l’Alliance pour la République ou de la coalition Benno Bokk Yakaar. Et cette exigence de l’opposition empoisonne ses relations avec le pouvoir.
Faut-il donc définitivement décharger le ministre de l’Intérieur de l’organisation des élections ?
Selon Maurice Soudieck Dionne, enseignant-chercheur à l’université Gaston Berger de Saint-Louis, le ministère de l’Intérieur est certes un ministère de souveraineté, ce qui fait que le Président est obligé d’y mettre un homme de confiance, mais pour ce qui est des élections, il devrait retirer leur organisation à ce ministère, pour la confier à une autre structure, à une autre personnalité neutre.
"Ce ne serait pas d’ailleurs une première puisque vers 1997 ou 1998, avec l’avènement du général Lamine Cissé au ministère de l’Intérieur, le président Abdou Diouf avait opté pour cette voie.
Son successeur Abdoulaye Wade avait lui aussi nommé l’inspecteur général d’Etat Cheikh Guèye comme ministre chargé des Elections. Je pense que de telles nominations ont participé à apaiser les tensions politiques, à rétablir un climat de confiance pour qu’on s’achemine vers des élections transparentes », soutient le politologue Maurice Soudieck Dionne.
Quant au docteur en Sciences politiques Serigne Saliou Samb, il rappelle que, dans certaines démocraties, il y a des ministres de l’Intérieur qui appartiennent au parti pouvoir, qui organisent des élections qu’ils perdent.
Au Sénégal, quand une personnalité neutre a organisé la présidentielle de 2000, le Parti socialiste a perdu le pouvoir. « Quand Me Abdoulaye Wade a procédé à la même chose en 2012 (Ndlr, ce scrutin a plutôt été organisé par Me Ousmane Ngom, qui était un responsable de premier plan du Pds alors au pouvoir), le parti au pouvoir a perdu les élections.
Ce contrairement à ce qui se passe dans les autres démocraties où, malgré le fait que le ministre de l’Intérieur soit membre du parti au pouvoir, il peut arriver que ce dernier perde les élections. Ce qui veut dire que quand un pays a atteint un certain niveau de maturité démocratique, l’appartenance politique des ministres de l’Intérieur importe peu. Pourquoi ? Parce que le système est tellement huilé et l’administration est tellement neutre, que les élections peuvent se dérouler normalement.
Mais il faut reconnaitre quand même qu’au Sénégal, on n’en est pas encore arrivé à ce niveau de maturité. D’où la pertinence de la question relative au retrait de l’organisation des élections au ministère de l’Intérieur. Parce que les préfets, les sous-préfets, les gouverneurs, tout ce monde dépend du ministre de l’Intérieur, alors que l’actuel ministre de l’Intérieur du Sénégal est quelqu’un de partisan. Donc, c’est ça le problème. »
Source Le Témoin
Compte tenu des nombreux couacs notés dans l’organisation des dernières élections législatives — lesquelles ont été coordonnées par un ministre de l’Intérieur membre du parti au pouvoir —, M. Abdoulaye Daouda Diallo, l’opposition a réclamé et a obtenu sa « tête ».
Hélas, en lieu et place d’une personnalité moins marquée politiquement, son remplaçant n’est autre que son camarade de parti Aly Ngouille Ndiaye. Ce dont l’Opposition ne veut pas entendre parler.
Elle continue en effet de réclamer une personnalité neutre pour organiser l’élection présidentielle du 24 février 2019. Faut-il retirer définitivement, l’organisation des élections au ministère de l’Intérieur? Le Témoin pose le débat…
Après le code consensuel de 1992, la tradition a voulu qu’un «militaire » occupât la fonction de ministre de l’Intérieur, chargé de l’organisation des élections. Les arrivées de Ousmane Ngom, de Abdoulaye Daouda Diallo et d’Aly Ngouille Ndiaye à la place Washington, ont mis fin à ce consensus qui garantissait la « neutralité » de l’institution chargée d’organiser les élections dans notre pays.
Le ministère de l’Intérieur est en effet au cœur du dispositif électoral national. Conscient de cela, l’opposition refuse donc d’agréer un chargé des élections membre du parti au pouvoir, plus précisément de l’Alliance pour la République ou de la coalition Benno Bokk Yakaar. Et cette exigence de l’opposition empoisonne ses relations avec le pouvoir.
Faut-il donc définitivement décharger le ministre de l’Intérieur de l’organisation des élections ?
Selon Maurice Soudieck Dionne, enseignant-chercheur à l’université Gaston Berger de Saint-Louis, le ministère de l’Intérieur est certes un ministère de souveraineté, ce qui fait que le Président est obligé d’y mettre un homme de confiance, mais pour ce qui est des élections, il devrait retirer leur organisation à ce ministère, pour la confier à une autre structure, à une autre personnalité neutre.
"Ce ne serait pas d’ailleurs une première puisque vers 1997 ou 1998, avec l’avènement du général Lamine Cissé au ministère de l’Intérieur, le président Abdou Diouf avait opté pour cette voie.
Son successeur Abdoulaye Wade avait lui aussi nommé l’inspecteur général d’Etat Cheikh Guèye comme ministre chargé des Elections. Je pense que de telles nominations ont participé à apaiser les tensions politiques, à rétablir un climat de confiance pour qu’on s’achemine vers des élections transparentes », soutient le politologue Maurice Soudieck Dionne.
Quant au docteur en Sciences politiques Serigne Saliou Samb, il rappelle que, dans certaines démocraties, il y a des ministres de l’Intérieur qui appartiennent au parti pouvoir, qui organisent des élections qu’ils perdent.
Au Sénégal, quand une personnalité neutre a organisé la présidentielle de 2000, le Parti socialiste a perdu le pouvoir. « Quand Me Abdoulaye Wade a procédé à la même chose en 2012 (Ndlr, ce scrutin a plutôt été organisé par Me Ousmane Ngom, qui était un responsable de premier plan du Pds alors au pouvoir), le parti au pouvoir a perdu les élections.
Ce contrairement à ce qui se passe dans les autres démocraties où, malgré le fait que le ministre de l’Intérieur soit membre du parti au pouvoir, il peut arriver que ce dernier perde les élections. Ce qui veut dire que quand un pays a atteint un certain niveau de maturité démocratique, l’appartenance politique des ministres de l’Intérieur importe peu. Pourquoi ? Parce que le système est tellement huilé et l’administration est tellement neutre, que les élections peuvent se dérouler normalement.
Mais il faut reconnaitre quand même qu’au Sénégal, on n’en est pas encore arrivé à ce niveau de maturité. D’où la pertinence de la question relative au retrait de l’organisation des élections au ministère de l’Intérieur. Parce que les préfets, les sous-préfets, les gouverneurs, tout ce monde dépend du ministre de l’Intérieur, alors que l’actuel ministre de l’Intérieur du Sénégal est quelqu’un de partisan. Donc, c’est ça le problème. »
Source Le Témoin