
" Nous assistons aujourd’hui à une dérive institutionnelle d’une gravité inouïe, où un ancien Procureur de la Cour de Répression de l’Enrichissement Illicite (CREI), devenu député, se permet de contester publiquement une décision juridictionnelle prise par le juge d’instruction près le Pol Judiciaire et le Procureur de ladite juridiction, lors de la première comparution du député Farba NGOM.
Qu’avons-nous donc ici ?
Un magistrat devenu homme politique, qui prétend dicter au juge instructeur près du Pol financier la conduite à tenir dans un dossier judiciaire en cours, allant jusqu’à exiger que la personne concernée soit inculpée et placée sous mandat de dépôt ou contrôle judiciaire au moins. Cette posture revient à défendre une justice d’exception où toute personne poursuivie devrait être placée en détention par principe. Or, la détention provisoire est une exception et non une règle, en vertu des principes de nécessité et de proportionnalité consacrés par le droit pénal moderne.
Il est sans doute emporté par son zèle parlementaire au mépris des règles élémentaires de la procédure pénale, l’honorable député semble avoir oublié – ou feint d’ignorer – que le juge d’instruction n’est pas un simple exécutant du parquet financier, mais un magistrat indépendant, chargé de mener une enquête impartiale (entre accusation et défense). Une précision qui, visiblement, lui a échappé…. Contrairement à la juridiction qu’il a servie – la CREI, où la présomption d’innocence était souvent bafouée – le droit commun offre aux justiciables des garanties procédurales fondamentales.
*Un reniement des principes et un désavoeu de ses anciens collègues:
Le plus troublant dans cette affaire n’est pas seulement l’attitude d’ingérence manifeste de cet ancien procureur dans une procédure en cours, mais également le manque de considération, voire de courtoisie élémentaire, à l’égard de ses anciens collègues magistrats. En se permettant de critiquer ouvertement le travail d’un juge d’instruction et du parquet financier, il remet en cause, avec une légèreté sidérante, la probité et l’indépendance de ceux qu’il a pourtant côtoyés et avec qui il partageait autrefois la noble mission de rendre justice.
Le rappel etant pédagogique, le juge d’instruction, magistrat indépendant, tient sa légitimité de la Constitution et des lois de la République, et non des pressions exercées par un ancien procureur ou par toute autre personnalité, fût-elle politique. Il instruit à charge et à décharge, et ses décisions sont guidées par le droit, et non par des considérations aux alluresd'un règlement de compte déguisé.
Dans ce cas précis, le juge d’instruction a fait preuve de rigueur et de respect des principes fondamentaux du droit, en renvoyant l’audience pour permettre aux avocats du député mis en cause de prendre connaissance de l’intégralité du dossier.
Cela relève d’un droit universellement reconnu : le droit à une défense éclairée, principe cardinal consacré tant par la Constitution que par les instruments internationaux ratifiés par notre pays, notamment :
L’article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui consacre le droit de toute personne poursuivie à être informée de la nature et des motifs des accusations portées contre elle et à bénéficier du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ;
L’article 7 de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples , qui garantit le droit à un procès équitable et à une défense pleine et entière.
Or, au mépris de ces principes, l’ancien procureur, aujourd’hui député, s’indigne et réclame une inculpation immédiate assortie d’un mandat de dépôt ou un contrôle judiciaire. Il agit de l'apologie d'une justice avec un tribunal d’exception où la précipitation et l’arbitraire priment sur les droits fondamentaux. Force est de constater que la justice ne se rend pas à la hâte ou dans un désert, et nul ne peut imposer au juge une décision par voie de chantage médiatique ou par injonction politique.
II. Une interférence politique inacceptable dans le fonctionnement de la justice :
L’indépendance de la justice n’est pas une faveur, mais un impératif constitutionnel.
La séparation des pouvoirs, principe fondamental de tout État de droit, interdit à tout pouvoir exécutif, législatif ou ancien magistrat reconverti en politique, d’interférer dans une procédure en cours.
Or, en contestant publiquement la décision du juge, et exigeant une inculpation suivie d'une détention immédiate, l’ancien procureur cherche à usurper les prérogatives du magistrat instructeur et à transformer la procédure en une affaire à régler sur la place publique.
Nous sommes donc face à une violation manifeste du principe d’indépendance du pouvoir judiciaire, garanti notamment par :
L’article 88 de la Constitution, consacre l’indépendance du pouvoir judiciaire face aux autres pouvoirs ;
Les principes fondamentaux des Nations Unies sur l’indépendance de la magistrature, qui prohibent toute influence indue sur les magistrats dans l’exercice de leurs fonctions.
Cette attitude, si elle devait prospérer, constituerait un dangereux précédent où tout justiciable pourrait être jugé non pas au regard de la loi, mais au bon vouloir d’une personne ou d'un groupe puissant.
III. Un comportement juridiquement et éthiquement condamnable :
Au-delà de l’atteinte à la justice, cette posture soulève inéluctablement un gêne et des bruits de couloirs entre ses anciens collègues qui s'evertuent pour faire du droit un outil de justice sociale et non un instrument pour renvoyer injustement des justiciables au purgatoire.
Comment un magistrat, qui a longtemps prôné la rigueur judiciaire et instruit des dossiers sensibles, peut-il aujourd’hui contester publiquement une procédure engagée par un juge dans l’exercice de ses fonctions ?
Comment justifier qu’un ancien procureur, désormais député, prenne une position ouvertement hostile à un principe fondamental du droit : celui du contradictoire / communication de dossier, un droit inaliénable du respect de la défense ?
Il relève d’une stratégie de pression politique sur le magistrat instructeur, ce qui pourrait caractériser une tentative d’entrave à la justice, infraction prévue et punie par les articles 197 et 198 du Code Pénal qui réprime toute manœuvre visant à influencer une procédure judiciaire en cours ou à jeter le discrédit sur un acte ou décision juridictionnelle.
IV. L’urgence d’un rappel à l’ordre et d’une protection de l’autorité judiciaire
Face à de telles dérives, il est impératif que l’État, le Conseil Supérieur de la Magistrature et les autorités judiciaires rappellent avec fermeté les principes fondamentaux du droit :
Aucune personnalité politique ne saurait imposer sa vision de la justice à un magistrat dans l’exercice de ses fonctions.
Toute tentative de discréditer publiquement une décision de justice en dehors des voies de recours légales constitue une atteinte à l’indépendance du pouvoir judiciaire.
L’état doit garantir la protection des magistrats contre toute pression politique ou médiatique visant à influer sur leurs décisions.
Que l’on soit ancien procureur ou député, nul n’est au-dessus des principes fondamentaux de la justice.
Un choix entre état de droit et ingérence politique :
Nous sommes aujourd’hui face à un test majeur pour l’indépendance de la justice. Soit, nous acceptons que des déclarations intempestives et politisées puissent remettre en cause des décisions prises en toute légalité par un magistrat dans l’exercice de ses fonctions, et nous ouvrons la voie à une instrumentalisation systématique de la justice par des considérations partisanes.
Soit, nous réaffirmons avec force que la justice ne peut être dictée ni par des pressions politiques, ni par d’anciens magistrats devenus acteurs politiques, mais uniquement par les principes de droit.
Le choix est simple : l’état de droit ou la loi du plus fort.
Pour notre part, la position de « Justice Sans Frontières » est claire : nous défendons l’indépendance de la justice, l’autorité des décisions judiciaires et le respect des droits fondamentaux.
Comme disait le juge Hans Kelsen : "La justice ne doit pas être ce que veulent les puissants, mais ce que dicte la loi et la conscience du magistrat." Toute société qui affaiblit son appareil judiciaire compromet la confiance des citoyens et menace l'équilibre démocratique.
Laisser la justice suivre son cours, sans interférence ni instrumentalisation, est la seule voie possible pour assurer une société juste, équitable, démocratique et respectueuse de l'état de droit."
El Amath THIAM, Juriste-Consultant et Président de « JUSTICE SANS FRONTIERE »
Justice100f@gmail.com
Qu’avons-nous donc ici ?
Un magistrat devenu homme politique, qui prétend dicter au juge instructeur près du Pol financier la conduite à tenir dans un dossier judiciaire en cours, allant jusqu’à exiger que la personne concernée soit inculpée et placée sous mandat de dépôt ou contrôle judiciaire au moins. Cette posture revient à défendre une justice d’exception où toute personne poursuivie devrait être placée en détention par principe. Or, la détention provisoire est une exception et non une règle, en vertu des principes de nécessité et de proportionnalité consacrés par le droit pénal moderne.
Il est sans doute emporté par son zèle parlementaire au mépris des règles élémentaires de la procédure pénale, l’honorable député semble avoir oublié – ou feint d’ignorer – que le juge d’instruction n’est pas un simple exécutant du parquet financier, mais un magistrat indépendant, chargé de mener une enquête impartiale (entre accusation et défense). Une précision qui, visiblement, lui a échappé…. Contrairement à la juridiction qu’il a servie – la CREI, où la présomption d’innocence était souvent bafouée – le droit commun offre aux justiciables des garanties procédurales fondamentales.
*Un reniement des principes et un désavoeu de ses anciens collègues:
Le plus troublant dans cette affaire n’est pas seulement l’attitude d’ingérence manifeste de cet ancien procureur dans une procédure en cours, mais également le manque de considération, voire de courtoisie élémentaire, à l’égard de ses anciens collègues magistrats. En se permettant de critiquer ouvertement le travail d’un juge d’instruction et du parquet financier, il remet en cause, avec une légèreté sidérante, la probité et l’indépendance de ceux qu’il a pourtant côtoyés et avec qui il partageait autrefois la noble mission de rendre justice.
Le rappel etant pédagogique, le juge d’instruction, magistrat indépendant, tient sa légitimité de la Constitution et des lois de la République, et non des pressions exercées par un ancien procureur ou par toute autre personnalité, fût-elle politique. Il instruit à charge et à décharge, et ses décisions sont guidées par le droit, et non par des considérations aux alluresd'un règlement de compte déguisé.
Dans ce cas précis, le juge d’instruction a fait preuve de rigueur et de respect des principes fondamentaux du droit, en renvoyant l’audience pour permettre aux avocats du député mis en cause de prendre connaissance de l’intégralité du dossier.
Cela relève d’un droit universellement reconnu : le droit à une défense éclairée, principe cardinal consacré tant par la Constitution que par les instruments internationaux ratifiés par notre pays, notamment :
L’article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui consacre le droit de toute personne poursuivie à être informée de la nature et des motifs des accusations portées contre elle et à bénéficier du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ;
L’article 7 de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples , qui garantit le droit à un procès équitable et à une défense pleine et entière.
Or, au mépris de ces principes, l’ancien procureur, aujourd’hui député, s’indigne et réclame une inculpation immédiate assortie d’un mandat de dépôt ou un contrôle judiciaire. Il agit de l'apologie d'une justice avec un tribunal d’exception où la précipitation et l’arbitraire priment sur les droits fondamentaux. Force est de constater que la justice ne se rend pas à la hâte ou dans un désert, et nul ne peut imposer au juge une décision par voie de chantage médiatique ou par injonction politique.
II. Une interférence politique inacceptable dans le fonctionnement de la justice :
L’indépendance de la justice n’est pas une faveur, mais un impératif constitutionnel.
La séparation des pouvoirs, principe fondamental de tout État de droit, interdit à tout pouvoir exécutif, législatif ou ancien magistrat reconverti en politique, d’interférer dans une procédure en cours.
Or, en contestant publiquement la décision du juge, et exigeant une inculpation suivie d'une détention immédiate, l’ancien procureur cherche à usurper les prérogatives du magistrat instructeur et à transformer la procédure en une affaire à régler sur la place publique.
Nous sommes donc face à une violation manifeste du principe d’indépendance du pouvoir judiciaire, garanti notamment par :
L’article 88 de la Constitution, consacre l’indépendance du pouvoir judiciaire face aux autres pouvoirs ;
Les principes fondamentaux des Nations Unies sur l’indépendance de la magistrature, qui prohibent toute influence indue sur les magistrats dans l’exercice de leurs fonctions.
Cette attitude, si elle devait prospérer, constituerait un dangereux précédent où tout justiciable pourrait être jugé non pas au regard de la loi, mais au bon vouloir d’une personne ou d'un groupe puissant.
III. Un comportement juridiquement et éthiquement condamnable :
Au-delà de l’atteinte à la justice, cette posture soulève inéluctablement un gêne et des bruits de couloirs entre ses anciens collègues qui s'evertuent pour faire du droit un outil de justice sociale et non un instrument pour renvoyer injustement des justiciables au purgatoire.
Comment un magistrat, qui a longtemps prôné la rigueur judiciaire et instruit des dossiers sensibles, peut-il aujourd’hui contester publiquement une procédure engagée par un juge dans l’exercice de ses fonctions ?
Comment justifier qu’un ancien procureur, désormais député, prenne une position ouvertement hostile à un principe fondamental du droit : celui du contradictoire / communication de dossier, un droit inaliénable du respect de la défense ?
Il relève d’une stratégie de pression politique sur le magistrat instructeur, ce qui pourrait caractériser une tentative d’entrave à la justice, infraction prévue et punie par les articles 197 et 198 du Code Pénal qui réprime toute manœuvre visant à influencer une procédure judiciaire en cours ou à jeter le discrédit sur un acte ou décision juridictionnelle.
IV. L’urgence d’un rappel à l’ordre et d’une protection de l’autorité judiciaire
Face à de telles dérives, il est impératif que l’État, le Conseil Supérieur de la Magistrature et les autorités judiciaires rappellent avec fermeté les principes fondamentaux du droit :
Aucune personnalité politique ne saurait imposer sa vision de la justice à un magistrat dans l’exercice de ses fonctions.
Toute tentative de discréditer publiquement une décision de justice en dehors des voies de recours légales constitue une atteinte à l’indépendance du pouvoir judiciaire.
L’état doit garantir la protection des magistrats contre toute pression politique ou médiatique visant à influer sur leurs décisions.
Que l’on soit ancien procureur ou député, nul n’est au-dessus des principes fondamentaux de la justice.
Un choix entre état de droit et ingérence politique :
Nous sommes aujourd’hui face à un test majeur pour l’indépendance de la justice. Soit, nous acceptons que des déclarations intempestives et politisées puissent remettre en cause des décisions prises en toute légalité par un magistrat dans l’exercice de ses fonctions, et nous ouvrons la voie à une instrumentalisation systématique de la justice par des considérations partisanes.
Soit, nous réaffirmons avec force que la justice ne peut être dictée ni par des pressions politiques, ni par d’anciens magistrats devenus acteurs politiques, mais uniquement par les principes de droit.
Le choix est simple : l’état de droit ou la loi du plus fort.
Pour notre part, la position de « Justice Sans Frontières » est claire : nous défendons l’indépendance de la justice, l’autorité des décisions judiciaires et le respect des droits fondamentaux.
Comme disait le juge Hans Kelsen : "La justice ne doit pas être ce que veulent les puissants, mais ce que dicte la loi et la conscience du magistrat." Toute société qui affaiblit son appareil judiciaire compromet la confiance des citoyens et menace l'équilibre démocratique.
Laisser la justice suivre son cours, sans interférence ni instrumentalisation, est la seule voie possible pour assurer une société juste, équitable, démocratique et respectueuse de l'état de droit."
El Amath THIAM, Juriste-Consultant et Président de « JUSTICE SANS FRONTIERE »
Justice100f@gmail.com