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Vendredi 5 Avril 2019

Entre protection contre les prédateurs et les dangers extérieurs, insécurité et défiance, relation fantasmatique et modèle maternel à s’identifier… : L’attachement entre le bébé et sa mère est-il inné ?


Le rôle de l’éducation s’invite dans le développement psychoaffectif de l’enfant. Certains estiment que l’attachement entre le bébé et sa mère est inné. Mais, la relation pourrait être plus compliquée pour certaines qui peinent à cerner les contours d’une éventuelle interdépendance entre les deux. Leral a fait une petite immersion dans cet univers complexe. Enquête…



La vie détient un mystère. Il serait difficile pour certains, de concevoir qu’une relation entre une mère et son bébé pourrait être autre chose que de l’amour. Et, il a été constaté dans la vie des animaux un attachement instinctivement à leurs mères. L’idéal de cet attachement rentre de manière obligatoire dans une logique de protection contre les prédateurs et les dangers extérieurs. Il semble qu’il en est de même, pour les êtres humains.

L’attachement à la mère, découvre-t-on, obéissait à un programme inné. Instinctivement, l’enfant se dirige vers le sein maternel. Et, quand la mère s’écarte de lui, il la recrée sous une forme « hallucinée », en suçant ses doigts. Et, il retrouve toutes les satisfactions, liées au sein manquant.

Ainsi, l’attachement induit une atmosphère d’aide mutuelle. Mais, il est vrai qu’il peut aussi, se construire sur fond d’insécurité et de défiance. L’enquête menée par l’équipe de Leral, prouve à suffisance que lorsque l’attachement est défiant, l’enfant semble ne faire aucune différence entre la présence et l’absence de la mère. A son retour, il ne manifeste aucune joie, comme si elle n’était jamais partie.

De l’attachement à l’amour

D’après l’enquête, l’amour naît effectivement de l’attachement. Mais, c’est un sentiment bien plus vaste et plus complexe qui s’appuie aussi, sur des fantasmes. Il y a toujours quelque chose chez la mère qui la pousse simultanément à aimer et, à haïr son enfant. Et, cet amour se met en place, avant la naissance. Avant d’exister, l’enfant est imaginé : très tôt, la mère lui attribue un prénom. Elle pense cet enfant à partir de sa propre histoire familiale, des récits qu’elle a entendus sur elle, sur son mari et sur leur lignée à tous deux.

La psychanalyse dit que, si une femme désire un enfant, c’est pour le donner à un homme. Ainsi, si elle a une liaison avec un autre homme que son compagnon, ou si elle a quelqu’un d’autre en tête, elle donne souvent le prénom de cet autre au bébé qui grandit en elle… En fait, déduit-on, l’enfant imaginé est porteur des secrets de sa mère.

Sous ce registre, la relation entre l’enfant et sa mère peut être fantasmatique. « Le prénom qu’on lui attribue n’est jamais neutre. Il va déterminer en partie son sort… et c’est une partie importante. L’enfant hérite de l’histoire de ses parents, de ses grands-parents. Donc, de leurs conflits intérieurs. Dès qu’une femme est enceinte, elle contracte une dette symbolique vis-à-vis de sa propre mère. Puisqu’elle la déloge de sa place initiale. En devenant mère à son tour, elle lui dit implicitement : « Maman, tu ne seras plus une mère, tu seras une grand-mère. » Cette dette, avec tous les conflits plus ou moins larvés qu’elle suppose, se transmet de génération en génération. C’est ce qu’on appelle une transmission transgénérationnelle », révèle l’enquête.

Et plus les conflits sont actifs, plus la situation est difficile. En résumé, il s’avère prouver qu’une femme enceinte qui n’a pas résolu son œdipe désire inconsciemment donner son enfant à son propre père. Le grand-père maternel va être considéré comme le père psychologique adoptant. S’il vient à mourir pendant la grossesse, l’enfant est en danger. Puisque, la mère reporte sur lui tous les sentiments ambivalents qu’elle vouait à son père…

Des mères programmées pour ne pas s’attacher

Une jeune femme qui, après avoir caché sa grossesse, avait tenté de tuer son enfant à la naissance, en le jetant par la fenêtre. Heureusement, un dépôt d’ordures a amorti le choc. L’enfant a survécu. Lorsqu’elle a eu un deuxième enfant, elle a aussi, tenté de l’éliminer.

Cette patiente a expliqué qu’elle ignorait ses origines. Dans sa famille, les hommes, c’est-à-dire ses frères ne pouvaient pas avoir d’enfants. Elle-même, n’avait aucun modèle maternel, auquel s’identifier. Pour elle, la transmission transgénérationnelle jouait comme une interdiction d’être mère et fonctionnait comme un programme la poussant à tuer ses enfants…

Heureusement, ce programme n’est pas déterminé une fois pour toute. Grâce aux fantasmes qu’on s’invente, aux histoires qu’on se raconte sur soi, sur sa famille, chacun dispose d’une part de liberté pour désamorcer les effets d’une transmission toxique et vivre sa propre vie.

O WADE Leral






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