«Le Sénégal, le pays où personne ne veut avoir un voisin gay». C’est le titre du compte-rendu de Aitor Guenaga, directeur du journal «Eldiario». Il a, en effet, fait lui-même le déplacement sur Dakar pour évoquer cette question à la fois complexe et dangereuse pour certains. Mais il faut dire que le voyage en valait la peine.
Dans un pays où seulement 3% des citoyens déclarent qu’ils ne verraient pas d’inconvénient à avoir une personne homosexuelle comme voisin, selon l’Afrobaromètre 2015, il est quasi impossible de faire parler des homosexuels ou des lesbiennes.
Au Sénégal, il faut le rappeler, le Code pénal prévoit des peines d’emprisonnement et des amendes pour les «actes contre-nature». Pourtant, des Sénégalais homosexuels n’ont pas trop hésité pour raconter leurs histoires à un ancien journaliste du célèbre journal espagnol El Pais et actuel directeur du journal «Eldiario».
À Dakar, accompagné par des membres de l’Ong Médecins du Monde, le journaliste raconte qu’il a rencontré les homosexuels, les militants de LGTBI et les travailleurs du s**e, dans un lieu qu’il ne précise pas. C’est donc dans ce lieu tenu secret par le journaliste que des homosexuels sénégalais ont raconté leurs histoires.
Et c’est le nommé Michel (Ndlr : probablement un nom d’emprunt) qui s’y lance en premier. Et il faut croire qu’il n’a pas été avare en mots. Selon le journal, quand Michel a découvert à 17 ans qu’il aimait les hommes, il avait aussi décidé d’épouser Dieu. «J’étudiais à l’Institut de Théologie pour être prêtre (diacre). D’ailleurs, j’ai eu à avoir des relations avec un de mes supérieurs», révèle-t-il.
Pour vivre son homosexualité «sans problème», Michel a confié avoir téléchargé (nous préférons ne pas donner le nom) une application gay sur mobile pour entrer en contact avec d’autres hommes. «Un jour, j’ai oublié mon téléphone portable et un de mes cousins l’a fouillé avant d’aller raconter à ma tante ce qu’il a découvert. J’ai dû quitter la maison et, peu de temps après, j’ai dû quitter la congrégation. Ensuite, j’ai dû quitter le pays où je suis né», raconte le jeune Michel, aujourd’hui âgé de 26 ans.
Très en verve, Michel raconte qu’il a dû se rendre en Côte d’Ivoire et dans d’autres pays d’Afrique de l’Ouest comme le Cameroun. «Mais, partout où je suis allé pour reconstruire ma vie, j’ai reçu une lettre d’avertissement des chefs de ma congrégation», narre-t-il. Finalement, Michel est revenu au Sénégal. Il vit actuellement chez un ami. Mais sa famille a aussitôt commencé à lui envoyer des menaces de mort à travers son téléphone portable. «Nous avons eu une réunion et nous allons te tuer, parce que tu es homosexuel. Tu es la honte de notre famille et nous te tuerons, je te le jure, au nom de Dieu», rapporte un message. Et dans un autre, il est écrit : «nous t’avons vu récemment et nous savons où tu vis maintenant et je te jure que tu vas bientôt mourir, parce que nous savons où tu es maintenant et nous viendrons te trouver là-bas».
Mais, malgré ces difficultés, Michel a fait part de sa détermination à revendiquer son homosexualité dans la liberté.
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