Mais bon l’essentiel est là : même à 85 ans, vous êtes largement au-dessus de la moyenne d’âge de nos concitoyens. L’agence nationale des statistiques et de la démographie, dont votre ancien cher ami et nouvel opposant, Monsieur Landing Savané est un pur produit, nous apprend sur son site visité ce samedi 28 mai 2011 que l’âge médian des Sénégalais est de 18 ans, que les plus de 64 ans sont 2,9% de la population tandis que les moins de 15 ans en constituent 43%. C’est-à-dire que la majorité des citoyens sénégalais est à des années-lumière de votre vénérable âge et de vos préoccupations, envies et désirs : question de génération. Ce n’est pas juste, mais c’est la vie qui est ainsi faite. Vous êtes bien placé pour le savoir. Moi aussi, avec mes 46 ans rugissants, je vois bien qu’il y a un océan Pacifique entre ma nièce Dabadida et moi. Et même avec ma petite Zara de 9 ans, je suis complètement larguée : elle sait faire marcher toutes les machines du monde avec son intelligence d’enfant. Bon, je n’irais pas jusqu’à lui confier le manche à balai de votre Airbus 319 présidentiel, ce ne serait pas prudent pour sa propre sécurité.
Votre amie Annette Mbaye d’Erneville, celle qui faisait tourner en bourrique tous les garçons des années 50 et 60, me recommande chaudement elle aussi d’être gentille avec vous, « pour une fois ». OK, la Tata de tous les journalistes et de toutes les féministes du Sénégal, c’est d’accord. Alors, baissons la garde et essayons de nous souvenir des beaux souvenirs de Maître, l’ancien président de la Rue Publique pendant que Abdou Samba Tôro était, par la grâce de Dieu, le président de la République laïque du Sénégal. Je dis laïque, parce que contrairement à vous, il a été discret sur tout ce qui le touchait personnellement, particulièrement sur sa religion.
Mais Dieu répartit bien les choses : pendant que Diouf gouvernait comme le « Gardien de la Constitution » selon Hadj Mansour, vous étiez vous, Maître, béni des dieux et Roi des cœurs de nos concitoyens. Un peu comme entre la Reine Elisabeth et la Princesse Diana, l’une régnant sans faiblir sur la Couronne pendant que la seconde régnait sans partage sur le cœur des sujets britanniques. Tout le monde était heureux ainsi, et chacun de vous deux gérait le statut quo avec responsabilité et sens de l’intérêt. Chacun des deux ? Hum, hum….. Mais j’avais bien prévenu que j’allais prendre le parti-pris de la gentillesse, alors que les morveux m’épargnent leurs ricanements et leur scepticisme. Ken du meer tey.
Je vous ai rencontré à mon retour de Tuggal, le pays de nos ancêtres les Gaulois selon la propagande coloniale, encore que je me souvienne que mes vrais ancêtres au Cayor et au Baol n’entretenaient pas tellement les meilleures relations familiales avec les héritiers du Roi-Soleil. Mais bon, passons. C’était la période bénie où il n’y avait pas encore de crise économique, de dévaluation, de délestages et de Plan Takkul. Les hommes étaient des hommes, les filles, des filles, les rapports étaient simples et on était PS ou PDS, ou communiste (LD, AJ, PIT) ou RND. C’était le temps béni où les leaders des partis politiques étaient honnêtes et ordinaires comme Babacar Sané, le député Mamadou Puritain Fall ou Madior Diouf. Où il y avait des grands journalistes, de vrais articles de presse et de grands éditoriaux qui me faisaient rêver. Mon amitié avec Abdou Latif Coulibaly date de cette époque. J’avais vite repéré qu’il était un journaliste à imiter, à copier, à suivre, un modèle professionnel. Je lui ai d’ailleurs dit qu’à partir de ce moment-là, je le considérais comme mon concurrent direct et que je suivrais ses pas. J’ignore si j’y suis parvenue……
Un autre journaliste à imiter était mon patron Alioune Dramé, PDG du « Soleil ». Je continue de l’appeler affectueusement PDG. Contrairement aux usages en cours au quotidien pro-gouvernemental « Le Soleil », auquel je suis fière d’avoir appartenu, Dramé m’a laissée couvrir les activités de l’opposition de l’époque, écrire et publier des articles sur les principaux leaders de l’opposition et leurs seconds-couteaux même, sans jamais me censurer ni me décourager. Paternaliste et suivant en cela la recommandation de Abdou Samba Tôrô de veiller sur moi, il me disait « fais quand même attention » quand je lui racontais mes équipées au Point-E, à la Permanence du PDS à Colobane et dans les meetings de l’Avenue du Centenaire- Charles de Gaulle. Pour les sit-in interdits de l’opposition par le gouvernement, comme celui que le PDS avait voulu organiser, mais en vain, en face du Ministère de l’Intérieur, Dramé me faisait accompagner par son chauffeur personnel et par mon collègue plus âgé Dieumbe Ndiaye, l’auteur des mots croisés du journal. J’y allais quand même et je ramenais mon article.
En face, une fois convaincus que je n’étais pas une espionne du Pouvoir ni une saboteuse de presse, mes interlocuteurs m’ont fait confiance et m’ont largement ouvert leur maison, permanence, confidences et fait le meilleur accueil. J’ai connu alors Me Abdoulaye Wade, les professeurs Abdoulaye Bathily, Iba Der Thiam et Madior Diouf, Landing Savané, Mamadou Diop Decroix, Sémou Pathé Guèye, Mamoussé Diagne, Amath Dansokho, Magatte Banda Thiam, Idrissa Seck, Coumba Bâ, Me Ousmane Ngom, Aminata Tall, Awa Diop, Maréma Wane Ly, feu Me Sall, Me Madické Niang, Pape Samba Mboup, Abdou Fall, Abdoulaye Faye, Boubacar Sall, Mody Sy, Kâne l’ancien député et Kâne l’ancien Maire de Guédiawaye, Seydi Kader Sow, l’ancien directeur du cabinet de Me Wade, Modou Diagne Fada, Adama Bâ et d’autres que je ne pourrai citer ici. Qu’ils me pardonnent. J’ai également connu leur épouse, à cette époque, dans l’opposition, on était d’être monogame. J’ai connu les alternoceurs d’avant et je salue ici leur loyauté et leur croyance en des valeurs d’antan. C’était plus dur d’être opposant avant 2000. Ils étaient fauchés mais dignes. Bien évidemment, ça c’est fini, maintenant ils ont bien changé. En revanche, je ne me souviens absolument pas de Farba Senghor, je ne sais pas pourquoi d’ailleurs.
Je me souviens que « Maître », comme tout le monde l’appelait, était extrêmement séducteur, séduisant et intellectuellement attirant. Il aimait par dessus-tout la jeunesse brillante, les jeunes femmes surtout lorsqu’elles étaient intelligentes et prometteuses. Attention, il les aimait en tout bien tout honneur, je n’insinue pas du tout qu’il était un DSK avant l’heure. Maître aimait la jeunesse, l’intelligence, la beauté, les idées géniales et qu’on lui résiste quand on n’était pas de son camp. Me Wade était un opposant parfait s’il n’avait pas cette propension à agiter la rue pour un oui ou pour un non ; s’il n’aimait pas trop régner sur une Cour de gens à sa botte ; s’il n’aimait pas le paraître, le superficiel et tout ce qui brillait ; s’il ne manquait pas trop de cette profondeur, de cette maturité et de ce sens du sacrifice qui font les dirigeants d’exception. Mais nobody’s perfect : on ne peut pas tout avoir à la fois, la perfection n’est pas de ce monde.
Je me souviens du fameux « vous voulez marcher, allez-y !» lors du meeting du 16 février 1994 sur le boulevard du Centenaire, des hordes déchaînées qui se sont ruées jusqu’aux grilles du Palais présidentiel de l’avenue Roume, rebaptisée Léopold Sédar Senghor par Diouf, du véhicule du journaliste Abdallah Faye incendié par les marcheurs de Me Wade et de moi, incrédule devant tant de haine et de violence, debout avec Mame Olla Faye à côté des cadavres des policiers lâchement assassinés par les marcheurs. Je me souviens de la piscine de Me Wade, dans la deuxième villa, « la maison des Blancs ». Je me souviens de l’inséparable et indispensable Pape Samba Mboup dont j’avais peur, je ne sais pas pourquoi. Il a toujours été à côté de Me Wade et ne se privait pas de le rembarrer en ronchonnant. Un fidèle de chez fidèle. Je me souviens de Me Ousmane Ngom, un fils aux côtés de l’autre fils, Idrissa Seck qui était moins visible à cette époque. Je me souviens des confidences de Me Wade : rassurez-vous, je ne les répéterai pas ici. Je me souviens de ses entrées au gouvernement, de son panache, de sa farouche volonté de n’avoir de relations qu’avec Diouf, seul alter-ego reconnu de lui, au grand dam des socialistes dont le Premier ministre Habib Thiam. Au « Soleil », il nous fallait gérer professionnellement cette cohabitation. A la Présidence, tous les conseillers et fonctionnaires avaient reçu la recommandation expresse de Diouf de donner à Wade le même respect qu’à lui. Et Me Wade était naturellement jaloux de ses prérogatives. Gare à qui ne les respectait pas. Je ne suis pas sûre qu’à la Primature, période Habib Thiam, ils avaient bien compris la recommandation présidentielle.
Je me souviens des voyages officiels auxquels il participait évidemment. Et du périple effectué au Moyen-Orient, en Asie du sud-ouest et en Afrique australe sous la présidence de Diouf. Habib Diouf, fils du président, nous avait rejoint à une étape du voyage. A l’étape suivante, nous avons vu arriver Karim Wade. Nous avons souri sans commentaire et fait comme si de rien n’était. Les deux fils ont disparu au cours du voyage, comme par enchantement. Je me souviens aussi qu’à l’étape de Taïwan, Me Wade faisait la tête et boudait ostensiblement durant tout le séjour, je ne sais pas pourquoi.
Je me souviens de la fameuse réplique de Me Wade à Diouf et au PS : « je ne suis pas et ne saurai être la banque d’idées du PS !». Et toc. En face de lui, des socialistes se chargeaient de lui répondre et aujourd’hui, le vent de l’alternance les a jetés dans ses bras. Rien ne se perd au Sénégal, tout se recycle.
Je me souviens de beaucoup d’autres anecdotes, mais je vais m’en arrêter là. Lu nexx du doy. Maître qui était un vrai leader d’opposition n’a pas vraiment concrétisé les promesses du printemps sopiste, une fois élu démocratiquement à la tête di Sénégal. Lui qui se refusait autrefois d’être la banque d’idées du régime socialiste n’a pas cherché très loin pour se refaire une santé politique. Il est vrai que lui même vient du PS : nostalgie, quand tu nous tiens ! Que Maître ne s’en fasse pas. A l’instar de Diouf, qui est devenu culte et de Senghor qui est une valeur cultissime, l’Histoire et la mémoire collective sénégalaise ne retiendront que le meilleur chez lui. Mais il ne le saura qu’après avoir quitté le pouvoir. Nous lui souhaitons un joyeux anniversaire et une longue retraite de Père de la Nation, en bonne santé et heureux, au milieu de sa famille et de ses concitoyens. Happy birthday et sans rancune, Me Wade !
DMF
Votre amie Annette Mbaye d’Erneville, celle qui faisait tourner en bourrique tous les garçons des années 50 et 60, me recommande chaudement elle aussi d’être gentille avec vous, « pour une fois ». OK, la Tata de tous les journalistes et de toutes les féministes du Sénégal, c’est d’accord. Alors, baissons la garde et essayons de nous souvenir des beaux souvenirs de Maître, l’ancien président de la Rue Publique pendant que Abdou Samba Tôro était, par la grâce de Dieu, le président de la République laïque du Sénégal. Je dis laïque, parce que contrairement à vous, il a été discret sur tout ce qui le touchait personnellement, particulièrement sur sa religion.
Mais Dieu répartit bien les choses : pendant que Diouf gouvernait comme le « Gardien de la Constitution » selon Hadj Mansour, vous étiez vous, Maître, béni des dieux et Roi des cœurs de nos concitoyens. Un peu comme entre la Reine Elisabeth et la Princesse Diana, l’une régnant sans faiblir sur la Couronne pendant que la seconde régnait sans partage sur le cœur des sujets britanniques. Tout le monde était heureux ainsi, et chacun de vous deux gérait le statut quo avec responsabilité et sens de l’intérêt. Chacun des deux ? Hum, hum….. Mais j’avais bien prévenu que j’allais prendre le parti-pris de la gentillesse, alors que les morveux m’épargnent leurs ricanements et leur scepticisme. Ken du meer tey.
Je vous ai rencontré à mon retour de Tuggal, le pays de nos ancêtres les Gaulois selon la propagande coloniale, encore que je me souvienne que mes vrais ancêtres au Cayor et au Baol n’entretenaient pas tellement les meilleures relations familiales avec les héritiers du Roi-Soleil. Mais bon, passons. C’était la période bénie où il n’y avait pas encore de crise économique, de dévaluation, de délestages et de Plan Takkul. Les hommes étaient des hommes, les filles, des filles, les rapports étaient simples et on était PS ou PDS, ou communiste (LD, AJ, PIT) ou RND. C’était le temps béni où les leaders des partis politiques étaient honnêtes et ordinaires comme Babacar Sané, le député Mamadou Puritain Fall ou Madior Diouf. Où il y avait des grands journalistes, de vrais articles de presse et de grands éditoriaux qui me faisaient rêver. Mon amitié avec Abdou Latif Coulibaly date de cette époque. J’avais vite repéré qu’il était un journaliste à imiter, à copier, à suivre, un modèle professionnel. Je lui ai d’ailleurs dit qu’à partir de ce moment-là, je le considérais comme mon concurrent direct et que je suivrais ses pas. J’ignore si j’y suis parvenue……
Un autre journaliste à imiter était mon patron Alioune Dramé, PDG du « Soleil ». Je continue de l’appeler affectueusement PDG. Contrairement aux usages en cours au quotidien pro-gouvernemental « Le Soleil », auquel je suis fière d’avoir appartenu, Dramé m’a laissée couvrir les activités de l’opposition de l’époque, écrire et publier des articles sur les principaux leaders de l’opposition et leurs seconds-couteaux même, sans jamais me censurer ni me décourager. Paternaliste et suivant en cela la recommandation de Abdou Samba Tôrô de veiller sur moi, il me disait « fais quand même attention » quand je lui racontais mes équipées au Point-E, à la Permanence du PDS à Colobane et dans les meetings de l’Avenue du Centenaire- Charles de Gaulle. Pour les sit-in interdits de l’opposition par le gouvernement, comme celui que le PDS avait voulu organiser, mais en vain, en face du Ministère de l’Intérieur, Dramé me faisait accompagner par son chauffeur personnel et par mon collègue plus âgé Dieumbe Ndiaye, l’auteur des mots croisés du journal. J’y allais quand même et je ramenais mon article.
En face, une fois convaincus que je n’étais pas une espionne du Pouvoir ni une saboteuse de presse, mes interlocuteurs m’ont fait confiance et m’ont largement ouvert leur maison, permanence, confidences et fait le meilleur accueil. J’ai connu alors Me Abdoulaye Wade, les professeurs Abdoulaye Bathily, Iba Der Thiam et Madior Diouf, Landing Savané, Mamadou Diop Decroix, Sémou Pathé Guèye, Mamoussé Diagne, Amath Dansokho, Magatte Banda Thiam, Idrissa Seck, Coumba Bâ, Me Ousmane Ngom, Aminata Tall, Awa Diop, Maréma Wane Ly, feu Me Sall, Me Madické Niang, Pape Samba Mboup, Abdou Fall, Abdoulaye Faye, Boubacar Sall, Mody Sy, Kâne l’ancien député et Kâne l’ancien Maire de Guédiawaye, Seydi Kader Sow, l’ancien directeur du cabinet de Me Wade, Modou Diagne Fada, Adama Bâ et d’autres que je ne pourrai citer ici. Qu’ils me pardonnent. J’ai également connu leur épouse, à cette époque, dans l’opposition, on était d’être monogame. J’ai connu les alternoceurs d’avant et je salue ici leur loyauté et leur croyance en des valeurs d’antan. C’était plus dur d’être opposant avant 2000. Ils étaient fauchés mais dignes. Bien évidemment, ça c’est fini, maintenant ils ont bien changé. En revanche, je ne me souviens absolument pas de Farba Senghor, je ne sais pas pourquoi d’ailleurs.
Je me souviens que « Maître », comme tout le monde l’appelait, était extrêmement séducteur, séduisant et intellectuellement attirant. Il aimait par dessus-tout la jeunesse brillante, les jeunes femmes surtout lorsqu’elles étaient intelligentes et prometteuses. Attention, il les aimait en tout bien tout honneur, je n’insinue pas du tout qu’il était un DSK avant l’heure. Maître aimait la jeunesse, l’intelligence, la beauté, les idées géniales et qu’on lui résiste quand on n’était pas de son camp. Me Wade était un opposant parfait s’il n’avait pas cette propension à agiter la rue pour un oui ou pour un non ; s’il n’aimait pas trop régner sur une Cour de gens à sa botte ; s’il n’aimait pas le paraître, le superficiel et tout ce qui brillait ; s’il ne manquait pas trop de cette profondeur, de cette maturité et de ce sens du sacrifice qui font les dirigeants d’exception. Mais nobody’s perfect : on ne peut pas tout avoir à la fois, la perfection n’est pas de ce monde.
Je me souviens du fameux « vous voulez marcher, allez-y !» lors du meeting du 16 février 1994 sur le boulevard du Centenaire, des hordes déchaînées qui se sont ruées jusqu’aux grilles du Palais présidentiel de l’avenue Roume, rebaptisée Léopold Sédar Senghor par Diouf, du véhicule du journaliste Abdallah Faye incendié par les marcheurs de Me Wade et de moi, incrédule devant tant de haine et de violence, debout avec Mame Olla Faye à côté des cadavres des policiers lâchement assassinés par les marcheurs. Je me souviens de la piscine de Me Wade, dans la deuxième villa, « la maison des Blancs ». Je me souviens de l’inséparable et indispensable Pape Samba Mboup dont j’avais peur, je ne sais pas pourquoi. Il a toujours été à côté de Me Wade et ne se privait pas de le rembarrer en ronchonnant. Un fidèle de chez fidèle. Je me souviens de Me Ousmane Ngom, un fils aux côtés de l’autre fils, Idrissa Seck qui était moins visible à cette époque. Je me souviens des confidences de Me Wade : rassurez-vous, je ne les répéterai pas ici. Je me souviens de ses entrées au gouvernement, de son panache, de sa farouche volonté de n’avoir de relations qu’avec Diouf, seul alter-ego reconnu de lui, au grand dam des socialistes dont le Premier ministre Habib Thiam. Au « Soleil », il nous fallait gérer professionnellement cette cohabitation. A la Présidence, tous les conseillers et fonctionnaires avaient reçu la recommandation expresse de Diouf de donner à Wade le même respect qu’à lui. Et Me Wade était naturellement jaloux de ses prérogatives. Gare à qui ne les respectait pas. Je ne suis pas sûre qu’à la Primature, période Habib Thiam, ils avaient bien compris la recommandation présidentielle.
Je me souviens des voyages officiels auxquels il participait évidemment. Et du périple effectué au Moyen-Orient, en Asie du sud-ouest et en Afrique australe sous la présidence de Diouf. Habib Diouf, fils du président, nous avait rejoint à une étape du voyage. A l’étape suivante, nous avons vu arriver Karim Wade. Nous avons souri sans commentaire et fait comme si de rien n’était. Les deux fils ont disparu au cours du voyage, comme par enchantement. Je me souviens aussi qu’à l’étape de Taïwan, Me Wade faisait la tête et boudait ostensiblement durant tout le séjour, je ne sais pas pourquoi.
Je me souviens de la fameuse réplique de Me Wade à Diouf et au PS : « je ne suis pas et ne saurai être la banque d’idées du PS !». Et toc. En face de lui, des socialistes se chargeaient de lui répondre et aujourd’hui, le vent de l’alternance les a jetés dans ses bras. Rien ne se perd au Sénégal, tout se recycle.
Je me souviens de beaucoup d’autres anecdotes, mais je vais m’en arrêter là. Lu nexx du doy. Maître qui était un vrai leader d’opposition n’a pas vraiment concrétisé les promesses du printemps sopiste, une fois élu démocratiquement à la tête di Sénégal. Lui qui se refusait autrefois d’être la banque d’idées du régime socialiste n’a pas cherché très loin pour se refaire une santé politique. Il est vrai que lui même vient du PS : nostalgie, quand tu nous tiens ! Que Maître ne s’en fasse pas. A l’instar de Diouf, qui est devenu culte et de Senghor qui est une valeur cultissime, l’Histoire et la mémoire collective sénégalaise ne retiendront que le meilleur chez lui. Mais il ne le saura qu’après avoir quitté le pouvoir. Nous lui souhaitons un joyeux anniversaire et une longue retraite de Père de la Nation, en bonne santé et heureux, au milieu de sa famille et de ses concitoyens. Happy birthday et sans rancune, Me Wade !
DMF