L’As : Monsieur le ministre d’Etat, vous venez de faire publier dans la presse les grandes lignes des conclusions de l’audit sur les dépenses extra budgétaires. Est-ce une exigence des bailleurs de fonds ?
Abdoulaye Diop : Je pense qu’il serait plus opportun de parler d’un engagement du Gouvernement de la République du Sénégal, comme je l’ai dit dans le communiqué de presse auquel vous faites allusion. En 2009, dans le cadre de la mise en œuvre du programme économique et financier, le Sénégal s’est engagé à faire l’évaluation des instances de paiement de l’Etat vis-à-vis du secteur privé, résultant de procédures régulières d’exécution des dépenses publiques. Les résultats de ces évaluations ont mis en exergue l’existence d’arriérés de paiement découlant de dépenses qualifiées d’extrabudgétaires parce qu’initiées, au niveau de certains services de l’Etat, en marge des procédures régulières prescrites par les règles et usages en matière de comptabilité publique, alors que l’article 90 du décret n° 2003-101 sur la comptabilité publique est claire : il dispose que les propositions d’engagement ne doivent concerner que les dépenses dont l’objet est prévu au budget jusqu’à concurrence des crédits ouverts.
Depuis cette affaire des dépenses extra budgétaires, le Gouvernement a pris plusieurs décisions allant dans le sens demandé par les bailleurs ?
Naturellement, suite à ces révélations, un cabinet indépendant a été dûment sélectionné et a effectué, au niveau des départements ministériels, agences et établissements publics, le recensement de toutes les dépenses extrabudgétaires qui auraient donné lieu à des fournitures, prestations et travaux réalisés au profit desdites structures. Le rapport d’audit a mis en évidence à la date du 31 décembre 2008, la situation des dépenses extrabudgétaires des ministères ainsi que celle intitulée « dettes éventuelles des agences et établissements publics ». Toujours en vue de respecter ses engagements, le Gouvernement, a après avoir apuré intégralement les arriérés de paiement nés de l’application de procédures administratives régulières, retenu de résoudre définitivement les impayés résultant de dépenses extrabudgétaires, sous réserve que les créances réclamées par les fournisseurs et entrepreneurs concernés soient enregistrées, certifiées et reconnues « bon à payer ».
Ces mêmes bailleurs de fonds auraient demandé que les gestionnaires épinglés dans ces dépenses soient traduits devant la Cour des comptes. Est-ce le cas ?
Je ne suis pas au courant de cette demande…
Parlant toujours des dépenses extra budgétaires, l’Inspection générale d’Etat (Ige) aurait pourtant mis en cause vos services.
Je rappelle que c’est moi-même qui avais chargé, en juillet 2008, l’Inspection générale des finances, structure sous ma tutelle, de procéder au recensement des arriérés de l’Etat vis-à-vis du secteur privé. C’est dans le cadre de cette mission qu’il a été relevé un ensemble important d’opérations extrabudgétaires. Par la suite, il a été décidé de faire effectuer un audit externe et indépendant par un cabinet de renommée internationale, comme je l’ai dit tantôt, pour vérifier les conditions dans lesquelles ces dépenses extrabudgétaires ont été exécutées. Le rapport définitif de ce cabinet est en cours d’exploitation, conformément à une procédure, objet du communiqué de presse évoqué ci-dessus.
Au courant de l’année 2009, l’Inspection Générale d’Etat a également procédé à l’audit et à la vérification de la dette intérieure au niveau des différents départements ministériels et des structures placées sous leur tutelle.
Tous les rapports définitifs de ces missions de l’Ige ne nous sont pas encore parvenus. Seuls quelques rapports, trois pour être précis, nous ont été communiqués et aucun d’entre eux n’a mis en cause le ministère de l’Economie et des Finances.
L’Etat, dit-on, s’est désengagé de plusieurs sociétés publiques, surtout dans les Assurances. On évoque même la privatisation prochaine de la Lonase, du Cices et de la Sapco. Qu’en est-il ?
Toute la politique de privatisation mise en œuvre par l’Etat s’inscrit dans la double perspective du désengagement de l’Etat des activités de production et de commercialisation, et de promotion du secteur privé qui, au Sénégal comme partout ailleurs dans le monde, est et doit être le véritable moteur de la croissance économique. En particulier, il s’agit pour l’Etat de mobiliser et d’orienter l’épargne privée nationale vers des investissements productifs. Encore une fois, le souci majeur qui anime l’Etat à chaque fois qu’il juge nécessaire et opportun de se retirer du capital d’une entreprise, est qu’un ou des investisseurs sénégalais puissent l’y remplacer. La privatisation de la Lonase et du Cices a été décidée par la loi 2004-08 du 6 février 2004, tandis que celle de la Sapco est prévue par la loi 87-23 du 18 août 1987. Mais comme vous le savez, privatiser ne signifie pas brader. C’est pourquoi une privatisation est un long processus, car il n’est pas toujours facile de trouver un ou des repreneurs remplissant tous les critères de crédibilité, de technicité, de solvabilité et de profitabilité, qui sont posés.
Les Agences constituent un vrai problème, notamment en ce qui concerne leurs dépenses. Certaines d’entre elles vont disparaître : le Pcrpe, par exemple…
Il convient tout d’abord de rappeler que la création des organes décentralisés tels que les agences, offices, autorités, etc. a été motivée par le souci d’apporter une certaine souplesse dans la gestion publique. Ces agences qui sont des structures à autonomie de gestion administrative et financière bénéficient de transfert de ressources communément appelé dans la nomenclature budgétaire de l’Etat « transfert courant » pour le fonctionnement et « transfert en capital », pour l’investissement. Ces crédits transférés aux agences figurent annuellement en annexe de la loi de finances. Le rôle du ministère de l’Economie et des Finances consiste à mettre à disposition ces ressources et il appartient aux organes de gouvernance des agences (puisque chaque agence est dotée d’un Conseil d’Administration ou d’un Conseil de Surveillance) d’exercer le contrôle approprié sur les activités de ces agences. En outre, elles sont soumises au contrôle des différents corps de contrôle de l’Etat, notamment la Cour des Comptes et l’Inspection Générale d’Etat. Dans un tel contexte, le ministère de l’Economie et des Finances ne peut corroborer l’idée d’un problème posé par les agences notamment à travers leurs dépenses. Au demeurant, je vous fais remarquer que certaines agences bénéficient dans le budget de l’Etat de transfert en capital relativement important, du fait qu’elles exécutent des projets d’investissements publics d’envergure. C’est notamment le cas de l’Apix qui met en œuvre le projet d’autoroute à péage pour lequel des crédits d’un montant de 25 milliards de FCFA sont inscrits dans la loi de finances 2010 au titre de la contrepartie financière de l’Etat ; de l’Aatr qui exécute plusieurs projets de construction, d’entretien et de maintenance de routes qui bénéficient dans la loi de finances 2010 de crédits de paiement d’un montant de 81,874 milliards de FCFA. Ces projets financés conjointement par l’Etat et les bailleurs de fonds font l’objet de suivi, d’évaluation et d’audit annuel de la régularité des dépenses. Pour l’Agence du Programme de construction d’immeubles administratifs et réhabilitation du patrimoine bâti de l’Etat, (Pcrpe), le Gouvernement a décidé dans le cadre de l’exécution du programme Instrument de Soutien à la Politique Economique (Ispe) de mettre en œuvre la diligence relative à sa dissolution et ceci dans le but également d’appliquer les recommandations du plan d’actions d’assainissement des finances publiques suite à la loi d’orientation n° 2009-20 du 04 mai 2009 sur les agences d’exécution.
Le Président a pris un décret déclarant inaliénable la vente du Méridien Président. Pourtant vous-même aviez été instruit par le chef de l’Etat pour lancer le processus de vente….
S’agissant du Complexe King Fahd, je dois dire que le président de la République s’était rangé à l’idée que la vente pourrait, pour une large part, contribuer à la satisfaction des importants besoins de financement de l’économie nationale et d’une demande sociale à la fois forte et pressante. Mais il a par la suite estimé que cette infrastructure avait une valeur symbolique et affective qui est largement supérieure à sa valeur marchande. En effet, ce réceptif constitue l’un des plus beaux fleurons de notre patrimoine immobilier. Et comme disait le poète : « objets inanimés, avez-vous donc une âme qui s’attache à notre âme et la force d’aimer ». De surcroît, ce complexe symbolise l’amitié étroite qui lie les peuples sénégalais et saoudien. Pour ces deux raisons, il doit être déclaré inaliénable.
On évoque aussi une nouvelle loi d’orientation pour les agences. Quand entrera-t-elle en vigueur ?
La nouvelle loi d’orientation sur les agences d’exécution a été adoptée par le Parlement en mai 2009. Cette loi définit un cadre juridique harmonisé et des principes directeurs communs aux agences. Le décret, en application de la loi d’orientation sur les agences d’exécution n° 2009/20 du 4 mai 2009 et fixant les règles d’organisation et de fonctionnement, a été approuvé le 4 mai 2009. C’est dire que la loi est entrée en vigueur et les agences ont jusqu’en mai 2010 au plus tard pour se conformer aux dispositions de la loi.
Des rumeurs persistantes disent que vous êtes actionnaire dans la société Sattar. Est-ce vrai ?
C’est faux, archi-faux. Je ne suis pas actionnaire dans Sattar.
Comment vous croire quand ces rumeurs persistent depuis huit ans maintenant ?
Je sais que je ne suis pas actionnaire dans la société Sattar, Dieu également sait que je n’en suis pas actionnaire. Allah Soubahanou wa taala est plus important que tout pour le croyant que je suis. Je jure au nom d’Allah et sur son Sacré livre le Coran (Ndlr : il prend un exemplaire du Coran et jure dessus) que je ne suis pas actionnaire dans cette société de mon ami de cinquante ans.
Parlons à présent de la Douane. Le Président vous aurait-il tordu le bras en nommant Makhtar Cissé en remplacement de Nanga, à la place de votre ami et candidat Khalifa Dièye ?
Monsieur le Président ne m’a jamais tordu le bras et j’ai donné mon accord en ce qui concerne la nomination du Colonel Cissé que je connais très bien depuis très longtemps, et avec qui j’entretiens des relations cordiales. Je pense également que Monsieur le président de la République n’a pas besoin de tordre le bras à qui que ce soit pour la nomination d’un haut fonctionnaire à un poste, car lui seul dispose de l’autorité pour nommer aux fonctions civiles et militaires. Cela dit, je tiens à préciser que je n’ai jamais proposé Monsieur Dièye au poste de Directeur général de la Douane.
On évoque une lettre que vous aviez écrite pour demander que les dirigeants de Nestlé, épinglée pour fraude, soient traités avec diligence…
Je n’ai pas écrit une lettre, j’ai plutôt fait des annotations sur une lettre que m’a envoyée Nestlé. Lettre dans laquelle, la société se plaignait de procédures contraignantes exercées sur elle par la Douane. Nestlé étant un grand investisseur dont les dirigeants n’avaient nullement envie de se dérober à la loi, j’ai demandé qu’ils soient traités avec égard, comme toute autre personne.
Pierre Aïm aussi a bénéficié d’un traitement de faveur. Ce n’est pas trop ?
Monsieur Aïm m’a soumis son cas, avec des arguments fort convaincants. J’ai demandé aux autorités de la Douane de vérifier la pertinence des arguments qu’il a avancés. En attendant que cette vérification aboutisse, j’ai demandé qu’il lui soit accordé un moratoire de trois mois. Toutefois, je dois le rappeler, j’ai tenu à préciser à M.Aïm, en présence des autorités de la Douane, que je ne trancherai pas ce dossier quant au fond, car les douaniers sont des agents assermentés bénéficiant de toute ma confiance dans le cadre de l’exercice de leur fonction.
Que s’est-il passé avec les nouveaux statuts de la police pour que vous receviez les anciens policiers ?
Les policiers pensaient que je bloquais leur dossier. Je leur ai donné la bonne information basée uniquement sur les textes, ils ont présenté leurs excuses en me disant qu’ils ont été abusés.
Nous avons appris que vous avez été promu au grade d’Officier dans l’ordre de la Légion d’honneur par le Président Sarkozy. Que ressentez-vous ?
C’est un grand honneur pour moi. Je remercie très sincèrement le Président Nicolas Sarkozy pour cette marque de reconnaissance que je partage avec les agents du ministère de l’Economie et des Finances qui abattent un travail colossal surtout pour le recouvrement des recettes budgétaires. Par exemple, pour l’année 209, les Impôts ont recouvré 697,7 milliards et la Douane 386,5 milliards. Ce qui constitue une part importante du budget de l’Etat devenu très crédible auprès des institutions financières internationales. Pour l’opération d’émission de bons du Trésor lancée la semaine dernière, nous avons obtenu 100 milliards alors que nous en recherchions 25. Pour des raisons de gestion prudente de la trésorerie et de l’endettement du pays, nous ne retenons que ces 25 milliards. Si nécessaire, nous reviendrons pour une nouvelle émission. L’année dernière, nous avons obtenu 24 milliards du Fmi sans débat. C’est vous dire…
Un Etat si liquide qu’il peut laisser 52 milliards dus par la Sgbs, la Bicis et la Sdv dans l’affaire Korban ? Que s’est-il passé ?
Depuis 1995, ces sociétés avaient transigé pour plus de 300 millions. Cependant la procédure n’avait pas été radiée. Ce qui explique l’arrêt rendu par la Cour d’appel et condamnant ces sociétés à payer 52 milliards. Mais encore une fois, comme ces sociétés avaient transigé, nous avons confirmé par un protocole d’accord cette transaction vieille de quinze ans.
À la veille de chaque réaménagement, on annonce votre départ mais vous êtes toujours là. C’est quoi le secret de votre longévité ?
Mon secret ? Peut-être que Monsieur le président de la République est satisfait de mon travail, et tant que je bénéficierai de sa confiance, je m’efforcerai à la mériter.
Que répondez-vous à ceux qui soutiennent que vous auriez des dossiers explosifs sur lui d’où la crainte que vous inspireriez ?
C’est une hérésie totale. Le Chef de l’Etat est le garant de l’application des lois et règlements de ce pays. Je n’ai pas connaissance d’une transgression de sa part des lois et règlements de ce pays.
Après le ministère des Finances, que compte faire Abdoulaye Diop ?
J’irai peut-être jouer dans un grand club de football en Angleterre, Italie, France ou en Espagne (Rires).
Propos recueillis par Mamadou Thierno TALLA et Cheikh Mbacké GUISSE l'asquotidien
Abdoulaye Diop : Je pense qu’il serait plus opportun de parler d’un engagement du Gouvernement de la République du Sénégal, comme je l’ai dit dans le communiqué de presse auquel vous faites allusion. En 2009, dans le cadre de la mise en œuvre du programme économique et financier, le Sénégal s’est engagé à faire l’évaluation des instances de paiement de l’Etat vis-à-vis du secteur privé, résultant de procédures régulières d’exécution des dépenses publiques. Les résultats de ces évaluations ont mis en exergue l’existence d’arriérés de paiement découlant de dépenses qualifiées d’extrabudgétaires parce qu’initiées, au niveau de certains services de l’Etat, en marge des procédures régulières prescrites par les règles et usages en matière de comptabilité publique, alors que l’article 90 du décret n° 2003-101 sur la comptabilité publique est claire : il dispose que les propositions d’engagement ne doivent concerner que les dépenses dont l’objet est prévu au budget jusqu’à concurrence des crédits ouverts.
Depuis cette affaire des dépenses extra budgétaires, le Gouvernement a pris plusieurs décisions allant dans le sens demandé par les bailleurs ?
Naturellement, suite à ces révélations, un cabinet indépendant a été dûment sélectionné et a effectué, au niveau des départements ministériels, agences et établissements publics, le recensement de toutes les dépenses extrabudgétaires qui auraient donné lieu à des fournitures, prestations et travaux réalisés au profit desdites structures. Le rapport d’audit a mis en évidence à la date du 31 décembre 2008, la situation des dépenses extrabudgétaires des ministères ainsi que celle intitulée « dettes éventuelles des agences et établissements publics ». Toujours en vue de respecter ses engagements, le Gouvernement, a après avoir apuré intégralement les arriérés de paiement nés de l’application de procédures administratives régulières, retenu de résoudre définitivement les impayés résultant de dépenses extrabudgétaires, sous réserve que les créances réclamées par les fournisseurs et entrepreneurs concernés soient enregistrées, certifiées et reconnues « bon à payer ».
Ces mêmes bailleurs de fonds auraient demandé que les gestionnaires épinglés dans ces dépenses soient traduits devant la Cour des comptes. Est-ce le cas ?
Je ne suis pas au courant de cette demande…
Parlant toujours des dépenses extra budgétaires, l’Inspection générale d’Etat (Ige) aurait pourtant mis en cause vos services.
Je rappelle que c’est moi-même qui avais chargé, en juillet 2008, l’Inspection générale des finances, structure sous ma tutelle, de procéder au recensement des arriérés de l’Etat vis-à-vis du secteur privé. C’est dans le cadre de cette mission qu’il a été relevé un ensemble important d’opérations extrabudgétaires. Par la suite, il a été décidé de faire effectuer un audit externe et indépendant par un cabinet de renommée internationale, comme je l’ai dit tantôt, pour vérifier les conditions dans lesquelles ces dépenses extrabudgétaires ont été exécutées. Le rapport définitif de ce cabinet est en cours d’exploitation, conformément à une procédure, objet du communiqué de presse évoqué ci-dessus.
Au courant de l’année 2009, l’Inspection Générale d’Etat a également procédé à l’audit et à la vérification de la dette intérieure au niveau des différents départements ministériels et des structures placées sous leur tutelle.
Tous les rapports définitifs de ces missions de l’Ige ne nous sont pas encore parvenus. Seuls quelques rapports, trois pour être précis, nous ont été communiqués et aucun d’entre eux n’a mis en cause le ministère de l’Economie et des Finances.
L’Etat, dit-on, s’est désengagé de plusieurs sociétés publiques, surtout dans les Assurances. On évoque même la privatisation prochaine de la Lonase, du Cices et de la Sapco. Qu’en est-il ?
Toute la politique de privatisation mise en œuvre par l’Etat s’inscrit dans la double perspective du désengagement de l’Etat des activités de production et de commercialisation, et de promotion du secteur privé qui, au Sénégal comme partout ailleurs dans le monde, est et doit être le véritable moteur de la croissance économique. En particulier, il s’agit pour l’Etat de mobiliser et d’orienter l’épargne privée nationale vers des investissements productifs. Encore une fois, le souci majeur qui anime l’Etat à chaque fois qu’il juge nécessaire et opportun de se retirer du capital d’une entreprise, est qu’un ou des investisseurs sénégalais puissent l’y remplacer. La privatisation de la Lonase et du Cices a été décidée par la loi 2004-08 du 6 février 2004, tandis que celle de la Sapco est prévue par la loi 87-23 du 18 août 1987. Mais comme vous le savez, privatiser ne signifie pas brader. C’est pourquoi une privatisation est un long processus, car il n’est pas toujours facile de trouver un ou des repreneurs remplissant tous les critères de crédibilité, de technicité, de solvabilité et de profitabilité, qui sont posés.
Les Agences constituent un vrai problème, notamment en ce qui concerne leurs dépenses. Certaines d’entre elles vont disparaître : le Pcrpe, par exemple…
Il convient tout d’abord de rappeler que la création des organes décentralisés tels que les agences, offices, autorités, etc. a été motivée par le souci d’apporter une certaine souplesse dans la gestion publique. Ces agences qui sont des structures à autonomie de gestion administrative et financière bénéficient de transfert de ressources communément appelé dans la nomenclature budgétaire de l’Etat « transfert courant » pour le fonctionnement et « transfert en capital », pour l’investissement. Ces crédits transférés aux agences figurent annuellement en annexe de la loi de finances. Le rôle du ministère de l’Economie et des Finances consiste à mettre à disposition ces ressources et il appartient aux organes de gouvernance des agences (puisque chaque agence est dotée d’un Conseil d’Administration ou d’un Conseil de Surveillance) d’exercer le contrôle approprié sur les activités de ces agences. En outre, elles sont soumises au contrôle des différents corps de contrôle de l’Etat, notamment la Cour des Comptes et l’Inspection Générale d’Etat. Dans un tel contexte, le ministère de l’Economie et des Finances ne peut corroborer l’idée d’un problème posé par les agences notamment à travers leurs dépenses. Au demeurant, je vous fais remarquer que certaines agences bénéficient dans le budget de l’Etat de transfert en capital relativement important, du fait qu’elles exécutent des projets d’investissements publics d’envergure. C’est notamment le cas de l’Apix qui met en œuvre le projet d’autoroute à péage pour lequel des crédits d’un montant de 25 milliards de FCFA sont inscrits dans la loi de finances 2010 au titre de la contrepartie financière de l’Etat ; de l’Aatr qui exécute plusieurs projets de construction, d’entretien et de maintenance de routes qui bénéficient dans la loi de finances 2010 de crédits de paiement d’un montant de 81,874 milliards de FCFA. Ces projets financés conjointement par l’Etat et les bailleurs de fonds font l’objet de suivi, d’évaluation et d’audit annuel de la régularité des dépenses. Pour l’Agence du Programme de construction d’immeubles administratifs et réhabilitation du patrimoine bâti de l’Etat, (Pcrpe), le Gouvernement a décidé dans le cadre de l’exécution du programme Instrument de Soutien à la Politique Economique (Ispe) de mettre en œuvre la diligence relative à sa dissolution et ceci dans le but également d’appliquer les recommandations du plan d’actions d’assainissement des finances publiques suite à la loi d’orientation n° 2009-20 du 04 mai 2009 sur les agences d’exécution.
Le Président a pris un décret déclarant inaliénable la vente du Méridien Président. Pourtant vous-même aviez été instruit par le chef de l’Etat pour lancer le processus de vente….
S’agissant du Complexe King Fahd, je dois dire que le président de la République s’était rangé à l’idée que la vente pourrait, pour une large part, contribuer à la satisfaction des importants besoins de financement de l’économie nationale et d’une demande sociale à la fois forte et pressante. Mais il a par la suite estimé que cette infrastructure avait une valeur symbolique et affective qui est largement supérieure à sa valeur marchande. En effet, ce réceptif constitue l’un des plus beaux fleurons de notre patrimoine immobilier. Et comme disait le poète : « objets inanimés, avez-vous donc une âme qui s’attache à notre âme et la force d’aimer ». De surcroît, ce complexe symbolise l’amitié étroite qui lie les peuples sénégalais et saoudien. Pour ces deux raisons, il doit être déclaré inaliénable.
On évoque aussi une nouvelle loi d’orientation pour les agences. Quand entrera-t-elle en vigueur ?
La nouvelle loi d’orientation sur les agences d’exécution a été adoptée par le Parlement en mai 2009. Cette loi définit un cadre juridique harmonisé et des principes directeurs communs aux agences. Le décret, en application de la loi d’orientation sur les agences d’exécution n° 2009/20 du 4 mai 2009 et fixant les règles d’organisation et de fonctionnement, a été approuvé le 4 mai 2009. C’est dire que la loi est entrée en vigueur et les agences ont jusqu’en mai 2010 au plus tard pour se conformer aux dispositions de la loi.
Des rumeurs persistantes disent que vous êtes actionnaire dans la société Sattar. Est-ce vrai ?
C’est faux, archi-faux. Je ne suis pas actionnaire dans Sattar.
Comment vous croire quand ces rumeurs persistent depuis huit ans maintenant ?
Je sais que je ne suis pas actionnaire dans la société Sattar, Dieu également sait que je n’en suis pas actionnaire. Allah Soubahanou wa taala est plus important que tout pour le croyant que je suis. Je jure au nom d’Allah et sur son Sacré livre le Coran (Ndlr : il prend un exemplaire du Coran et jure dessus) que je ne suis pas actionnaire dans cette société de mon ami de cinquante ans.
Parlons à présent de la Douane. Le Président vous aurait-il tordu le bras en nommant Makhtar Cissé en remplacement de Nanga, à la place de votre ami et candidat Khalifa Dièye ?
Monsieur le Président ne m’a jamais tordu le bras et j’ai donné mon accord en ce qui concerne la nomination du Colonel Cissé que je connais très bien depuis très longtemps, et avec qui j’entretiens des relations cordiales. Je pense également que Monsieur le président de la République n’a pas besoin de tordre le bras à qui que ce soit pour la nomination d’un haut fonctionnaire à un poste, car lui seul dispose de l’autorité pour nommer aux fonctions civiles et militaires. Cela dit, je tiens à préciser que je n’ai jamais proposé Monsieur Dièye au poste de Directeur général de la Douane.
On évoque une lettre que vous aviez écrite pour demander que les dirigeants de Nestlé, épinglée pour fraude, soient traités avec diligence…
Je n’ai pas écrit une lettre, j’ai plutôt fait des annotations sur une lettre que m’a envoyée Nestlé. Lettre dans laquelle, la société se plaignait de procédures contraignantes exercées sur elle par la Douane. Nestlé étant un grand investisseur dont les dirigeants n’avaient nullement envie de se dérober à la loi, j’ai demandé qu’ils soient traités avec égard, comme toute autre personne.
Pierre Aïm aussi a bénéficié d’un traitement de faveur. Ce n’est pas trop ?
Monsieur Aïm m’a soumis son cas, avec des arguments fort convaincants. J’ai demandé aux autorités de la Douane de vérifier la pertinence des arguments qu’il a avancés. En attendant que cette vérification aboutisse, j’ai demandé qu’il lui soit accordé un moratoire de trois mois. Toutefois, je dois le rappeler, j’ai tenu à préciser à M.Aïm, en présence des autorités de la Douane, que je ne trancherai pas ce dossier quant au fond, car les douaniers sont des agents assermentés bénéficiant de toute ma confiance dans le cadre de l’exercice de leur fonction.
Que s’est-il passé avec les nouveaux statuts de la police pour que vous receviez les anciens policiers ?
Les policiers pensaient que je bloquais leur dossier. Je leur ai donné la bonne information basée uniquement sur les textes, ils ont présenté leurs excuses en me disant qu’ils ont été abusés.
Nous avons appris que vous avez été promu au grade d’Officier dans l’ordre de la Légion d’honneur par le Président Sarkozy. Que ressentez-vous ?
C’est un grand honneur pour moi. Je remercie très sincèrement le Président Nicolas Sarkozy pour cette marque de reconnaissance que je partage avec les agents du ministère de l’Economie et des Finances qui abattent un travail colossal surtout pour le recouvrement des recettes budgétaires. Par exemple, pour l’année 209, les Impôts ont recouvré 697,7 milliards et la Douane 386,5 milliards. Ce qui constitue une part importante du budget de l’Etat devenu très crédible auprès des institutions financières internationales. Pour l’opération d’émission de bons du Trésor lancée la semaine dernière, nous avons obtenu 100 milliards alors que nous en recherchions 25. Pour des raisons de gestion prudente de la trésorerie et de l’endettement du pays, nous ne retenons que ces 25 milliards. Si nécessaire, nous reviendrons pour une nouvelle émission. L’année dernière, nous avons obtenu 24 milliards du Fmi sans débat. C’est vous dire…
Un Etat si liquide qu’il peut laisser 52 milliards dus par la Sgbs, la Bicis et la Sdv dans l’affaire Korban ? Que s’est-il passé ?
Depuis 1995, ces sociétés avaient transigé pour plus de 300 millions. Cependant la procédure n’avait pas été radiée. Ce qui explique l’arrêt rendu par la Cour d’appel et condamnant ces sociétés à payer 52 milliards. Mais encore une fois, comme ces sociétés avaient transigé, nous avons confirmé par un protocole d’accord cette transaction vieille de quinze ans.
À la veille de chaque réaménagement, on annonce votre départ mais vous êtes toujours là. C’est quoi le secret de votre longévité ?
Mon secret ? Peut-être que Monsieur le président de la République est satisfait de mon travail, et tant que je bénéficierai de sa confiance, je m’efforcerai à la mériter.
Que répondez-vous à ceux qui soutiennent que vous auriez des dossiers explosifs sur lui d’où la crainte que vous inspireriez ?
C’est une hérésie totale. Le Chef de l’Etat est le garant de l’application des lois et règlements de ce pays. Je n’ai pas connaissance d’une transgression de sa part des lois et règlements de ce pays.
Après le ministère des Finances, que compte faire Abdoulaye Diop ?
J’irai peut-être jouer dans un grand club de football en Angleterre, Italie, France ou en Espagne (Rires).
Propos recueillis par Mamadou Thierno TALLA et Cheikh Mbacké GUISSE l'asquotidien