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Lundi 29 Novembre 2010

Présidentielle 2012 : un médecin déclare le président Wade inapte


Docteur Mame Marie FAYE
Médecin Ophtalmologiste
Imble. N° 30 Scat Urbam
Dakar. Rep. du Sénégal. A Monsieur le Président du Conseil
Constitutionnel. Conseil Constitutionnel
Corniche Ouest
Dakar. Rep. du Sénégal



Présidentielle 2012 : un médecin déclare le président Wade inapte
Objet : Dérogations au Secret Médical concernant l’état de santé du Président Abdoulaye Wade


Monsieur le Président

L’objet de ma lettre vous paraîtra peut-être surprenant de prime abord, mais au fil des explications que j’entends vous fournir, vous comprendrez alors pourquoi au bout du compte j’ai été contrainte de vous adresser cette lettre. Pour une plus grande clarté de cette correspondance, je vais la subdiviser en différents chapitres.

1/ Mes relations avec le Président Abdoulaye Wade

Tout d’abord je me dois de vous éclairer sur les liens très anciens qui nous unissent le Président Abdoulaye Wade et moi-même. En effet, j’ai fait la connaissance de Abdoulaye Wade en 1988 lorsque Ousmane Ngom, qui était alors un frère et ami, m’a présentée à lui lors de mon adhésion au Parti Démocratique Sénégalais (PDS). Alors qu’à l’époque la quasi-totalité des cadres du PDS militaient au parti dans la clandestinité de la « Section Bleue », j’ai été la première femme cadre, médecin ophtalmologiste exerçant à titre privé, à accepter de militer ouvertement au PDS, au su et au vu de tous et avec tous les risques socioprofessionnels qu’une telle décision pouvaient entraîner. Mon attitude d’alors n’était dictée par aucun esprit de bravade, mais simplement par le fait que j’ai toujours su assumer mes choix et que je n’ai jamais fui devant mes responsabilités aussi lourdes soient-elles de par leur fait ou leurs conséquences.
Mon long combat politique depuis Mai 68 contre le pouvoir socialiste en place et certaines exactions dont j’ai été victime étaient bien connus des sénégalais. Il n’était donc nullement question pour moi de cacher mes penchants politiques de l’époque.
C’est peut-être cet acte de courage qui me rendit sympathique aux yeux de Abdoulaye Wade. Toujours est-il que mon adhésion au PDS fit grand bruit à l’époque et que Abdoulaye Wade s’attacha sincèrement à ma personne et me voua une profonde affection que je lui rendais bien d’ailleurs. Il ne cessait de répéter à mon endroit « Mame Marie, ce n’est pas simplement ma militante, c’est avant tout ma fille ». De mon côté Abdoulaye Wade n’était pas simplement Maître Abdoulaye Wade, il était avant tout comme un père. Ceci était tellement vrai qu’une certaine étiquette a fini par nous coller, pour toujours, à la peau à tous les deux.
En effet pour la majorité des sénégalais je suis la fille spirituelle de Abdoulaye Wade et ce dernier est mon père spirituel. De sorte que les gens ont pris l’habitude de me dire «Ton père » en me parlant de Abdoulaye Wade et de lui dire « Ta fille » en lui parlant de moi. Même ma propre mère, de son vivant, disait toujours « Ton père » ou « Le père de Mame Marie » pour parler de Abdoulaye Wade et toute ma famille en fait de même jusqu’à présent avec la force de l’habitude. Abdoulaye Wade a eu plusieurs fils spirituels, c’est sûr, mais il n’a jamais eu qu’une seule fille spirituelle et c’est Mame Marie Faye.
Nous étions très proches et très attachés l’un à l’autre à l’époque et les joies et les peines de l’un étaient les joies et les peines de l’autre. Nous avons aussi beaucoup travaillé ensemble, échangeant sans cesse des idées sur comment construire un nouveau Sénégal, le jour où il accéderait au pouvoir. Et même si nos relations se sont distendues au fil des ans et ne sont plus les mêmes qu’alors, les étiquettes « Le père de Mame Marie Faye » et « La fille de Abdoulaye Wade » nous resteront collées à jamais, à tous les deux.
Monsieur le Président si vous voyez que je tiens à vous expliciter tout ceci, c’est pour que vous puissiez bien saisir le pourquoi de l’importante décision que j’ai été amenée à prendre en fin de compte. Et cette décision est loin d’être une décision prise comme cela à la légère. D’ailleurs mon état de médecin ne me le permettrait même pas. La décision que j’ai été amenée à prendre l’a été après des années de mûre réflexion, dans la solitude et la discrétion des plus totales et le sens des responsabilités le plus profond.

2/ Etat de santé actuel du Président Abdoulaye Wade

Ma proximité de l’époque avec Abdoulaye Wade, nos relations au quotidien et mon état de médecin m’avaient permis progressivement de me rendre compte, bien involontairement, de l’état de santé de ce dernier. Si au début je n’attachais guère d’importance à certains signes cliniques d’apparence anodine, plus préoccupée que j’étais alors par mon combat politique, il n’en demeure pas moins que ces signes cliniques finirent par m’intriguer quelque peu, même si je n’en ai jamais fait cas. Puis les années passèrent avec leurs lots de surprises et de désillusions, mais je ne pouvais m’empêcher de suivre ne serait-ce qu’indirectement et de loin l’évolution de l’état de santé de cet homme qui m’avait été si proche à un moment donné.
De 1997 à 2005 j’ai eu à vivre aux Etats-Unis. Et ce n’est que le 09 Juin 2004 à Washington lors du sommet du G8, auquel Abdoulaye Wade était invité, que j’ai eu à découvrir de visu, avec stupeur et consternation, l’état de dégradation de la santé du Président Abdoulaye Wade. C’est alors là seulement que je réalisais la gravité de la situation. Depuis lors, et bien que complètement coupée de Abdoulaye Wade, du fait de son entourage immédiat qui me refuse tout accès à lui, et ils savent parfaitement pourquoi d’ailleurs, je ne cesse de suivre indirectement et de loin l’état de santé du Président Abdoulaye Wade. Etat de santé qui n’a plus beaucoup de secrets pour moi maintenant, ainsi que pour bon nombre de mes collègues médecins, surtout ceux de ma génération qui ont eu à suivre le parcours de Abdoulaye Wade.
Monsieur le Président, je puis vous affirmer aujourd’hui, sans risque majeur de me tromper, que le Président Abdoulaye Wade est atteint à ce jour de deux maladies visibles et évidentes que je qualifierai de maladies A et B, d’une troisième maladie que je qualifierai de maladie C, qui fait l’objet de très fortes présomptions, mais que le comportement au quotidien du Président de la République ne fait que confirmer aux yeux des personnes averties, mais aussi des profanes. Enfin une maladie D, elle aussi objet de certaines présomptions et dont les conséquences pourraient très bien être parties intégrantes de l’état de dégradation avancée de la santé du Président de la République.
Et c’est ainsi que le temps faisant son œuvre, ces maladies prises séparément ou associées ont fini par faire du Président Abdoulaye Wade, non seulement un homme gravement malade, mais surtout, un homme qui n’est même plus en mesure d’assumer correctement la charge de Président de la République du Sénégal.
Je sais que mes propos doivent vous sembler lourds de sens, mais sachez qu’en tant que médecin habituée à la lourdeur du secret professionnel, au respect et à la compassion envers les malades, ayant de longues années de carrière médicale et un sens aigu de la responsabilité médicale, il ne me viendrait même jamais à l’idée de parler à la légère de certaines questions relevant du domaine courant, à plus forte raison maintenant lorsque ces questions relèvent du domaine de l’Etat et ont trait, de surcroît, au chef de l’Etat lui- même.
Vous remarquerez Monsieur le Président que lorsque je fais allusion aux différentes maladies affectant l’état de santé du Président de la République, j’emploie les termes de maladie A, B, C et D. Ceci est du au fait que même si je ne suis pas son médecin traitant, donc directement concernée, le fait d’être médecin me fait d’une certaine manière obligation au secret professionnel, sauf pour les cas prévus par la loi. Ceci figure dans le Code pénal sénégalais, à l’alinéa 1er de l’article 363 sur lequel je reviendrai plus loin car il existe des dérogations à cet article 363.

3/ Evolution au fil des ans de l’état de santé du Président Abdoulaye Wade

Monsieur le Président, pour que vous puissiez vraiment saisir le sens profond de ma décision actuelle, il faudrait que je vous fasse un rapide survol chronologique et médical de l’évolution de l’état de santé du Président Abdoulaye Wade, du moins telle que j’ai pu m’en rendre compte.
J’ai eu à vous dire que ma proximité de l’époque avec Abdoulaye Wade et mon état de médecin m’avaient permis, même involontairement, d’avoir mon attention quelque peu attirée par certains signes cliniques anodins ayant trait à son état de santé. A ma connaissance, c’est de cette époque que datent les premiers signes visibles de sa maladie que j’ai surnommée maladie A. Cette maladie A est une maladie qui affecte presque tout l’organisme et même si le patient peut vivre très longtemps avec, lorsqu’il est bien traité, il n’en demeure pas moins qu’elle fini par entraîner à la longue certaines complications secondaires parmi lesquelles des troubles psychiques dont l’évolution progressive peut atteindre un degré de gravité pouvant aboutir à l’incapacité intellectuelle et mentale de l’individu.
Le traitement de cette maladie A est évidemment un traitement à vie, mais c’est avant tout un traitement assez lourd avec apparition progressive de nombreux effets secondaires sur l’état du patient. Et parmi ces effets secondaires, l’apparition de troubles psychiques sur le long terme est reconnue en médecine. C’est d’ailleurs tout cet ensemble d’effets secondaires du traitement de la maladie A que je surnommerai ici maladie B pour la simplicité du texte, bien qu’il s’agisse de tout un ensemble de syndromes.
Donc chez le Président de la République, la maladie A est apparue en premier, suivie bien des années après par la maladie B qui est la conséquence du traitement à plus ou moins long terme de la maladie A. Ces maladies A et B étant chacune porteuse, à des degrés divers, de son lot de troubles psychiques.
La maladie C, elle, est une maladie plutôt liée à l’âge, mais elle peut aussi être une des complications de la maladie A. Toujours est-il que sa principale caractéristique est l’apparition de troubles psychiques d’évolution variable et aboutissant inexorablement à la perte totale de toutes les capacités intellectuelles et mentales de l’individu. En fait les troubles psychiques liés à la maladie C sont beaucoup plus graves que ceux liés aux maladies A et B.
La maladie D quant à elle, elle fait l’objet de très sérieuses présomptions. Mais son existence possible de même que son traitement extrêmement lourd ne seraient absolument pas étrangers à l’état de dégradation avancée de la santé du Président de la République.
Et comme j’ai eu à vous le dire plus haut, ces différentes maladies ou affections prises séparément ou associées ont fini par faire du Président Abdoulaye Wade un homme dont la santé est sérieusement atteinte au point de le rendre incapable de continuer à assumer correctement la charge de Président de la République.
Si au tout début des années 90 je n’ai guère attaché d’importance à l’état de santé de Abdoulaye Wade, malgré certains signes cliniques anodins, c’est exactement le 27 Juin 2001 à New York que je faisais alors vraiment attention à son état de santé qui déjà commençait à décliner. En effet ce jour là j’étais allée lui rendre visite à son hôtel, le Waldorf Astoria sur Park Avenue, lors d’un de ces nombreux passages aux USA et je fus assez surprise par son état de santé. Il avait l’air très fatigué, sa démarche était lourde, voire pesante, mais c’est surtout son visage légèrement œdématié de même que ses mains qui attirèrent le plus mon attention.
Mais ce n’est que le 09 Juin 2004 à Washington, lors du sommet du G8, que j’ai pu alors réaliser de visu l’état de dégradation de la santé du Président Abdoulaye Wade. Ce jour là, il était tellement épuisé que les deux membres de sa garde rapprochée ont du le soutenir discrètement, chacun d’un côté, pour lui permettre de pouvoir atteindre l’ascenseur. C’est là alors que je compris que l’état de santé du Président Abdoulaye Wade était entrain de se dégrader, même s’il faisait tout pour ne pas le laisser paraître.
A mon retour définitif au Sénégal en 2005, il me fut encore plus loisible de suivre même indirectement et de loin l’évolution de l’état physique et de l’état mental du Président Abdoulaye Wade qui déclinaient de jour en jour.
En 2006 je savais le Président de la République assez malade, mais comme je me disais qu’il allait perdre les élections de février 2007, pour moi le problème serait résolu puisqu’il allait quitter la Présidence et pouvoir enfin aller se reposer. Malheureusement pour le peuple sénégalais, mais surtout pour lui, il fut hélas réélu. C’est à partir de ce moment que commença alors la véritable descente aux enfers du peuple sénégalais, mais aussi du Président de la République lui-même dont les courbes de santé physique et mentale avaient amorcé une descente lente mais inexorable dont tout le peuple sénégalais est conscient actuellement et particulièrement son entourage.
En effet non seulement l’état de santé physique du Président de la République s’est sérieusement dégradé ces dernières années, mais c’est surtout son état de santé mentale qui s’est encore plus dégradé le conduisant à adopter, au fil du temps, des comportements de plus en plus étranges, illogiques et hors normes, parfois même à la limite du fantasque, mais malheureusement de plus en plus asociaux, choquants, répréhensibles et à la limite même dangereux. Ceci parce que l’intéressé lui-même perd, chaque jour que Dieu fait, de plus en plus conscience de la réalité du monde et des choses qui l’entourent, s’enfonçant progressivement mais inexorablement dans l’obscurité de son propre monde à lui.
Lorsqu’on y réfléchit bien maintenant, on se rend même compte que le Président de la République a présenté dès le début de son magistère les premiers signes mineurs de comportements étranges, mais que les gens mettaient plutôt sur le compte d’un caractère assez fantaisiste (Prestation de serment au stade LSS, Hymne de l’Afrique à la place de l’hymne national…).
Personne ne pouvait alors imaginer qu’il s’agissait des prémices de réels troubles du comportement, troubles qui devaient aller crescendo au fil des ans avec leurs lots de déclarations, de faits et de gestes de plus en plus ahurissants (machines « Yakalma », TGV, centrale nucléaire, innombrables remaniements et réaménagements ministériels à vous donner le vertige, Palais présidentiel transformé en marché Sandaga, affaire Segura, Monument de la Renaissance…), jusqu’aux récentes bourdes diplomatiques inimaginables qui auraient pu être lourdes de conséquences pour le Sénégal, sans oublier maintenant l’injure suprême faite aux magistrats assimilés à des esclaves.
En fait plus l’état de santé mentale du Président Abdoulaye Wade décline et plus nous assistons, chez lui, à ce que nous appelons en médecine une « Levée des inhibitions » c’est-à- dire une levée progressive et insidieuse du blocage mental et moral, existant chez un individu normal, face à la notion du mal et de l’interdit. C’est ainsi que plus on va et plus la personne fait de moins en moins de différence entre le bien et le mal. Et nous n’avons encore rien vu, car ceci n’est qu’un début. L’évolution est appelée à aller de mal en pis, d’où la nécessité de prendre dès à présent les mesures qui s’imposent et sur lesquelles je reviendrai plus loin.
C’est la raison pour laquelle, en tant que médecin consciente de l’état de santé du Président Abdoulaye Wade, j’ai chaque jour de plus en plus mal lorsque j’assiste à son lynchage sans pitié à travers les médias ou les populations. Parce que je me dis que si les gens étaient au courant de la réalité des choses, ils ne parleraient pas ainsi.
Cependant, malgré le bien pénible constat fait sur l’état de santé du Président de la République, son entourage tient absolument à le maintenir au pouvoir en proposant sa candidature pour 2012, rien que pour satisfaire un instinct de survie monstrueusement égoïste et des intérêts bassement matériels.
En tant qu’être humain et médecin de surcroît, je considère cette attitude de l’entourage présidentiel hautement condamnable, parce que ne tenant absolument pas compte de l’état de santé de l’intéressé, de sa résistance physique et de ses capacités mentales.
J’affirme ici que : En 2010, du fait de la maladie, le Président Abdoulaye Wade est déjà dans l’incapacité de continuer à assumer correctement la charge de Président de la République. Et en 2012, le Président Abdoulaye Wade sera alors médicalement dans l’incapacité totale à assumer la charge de Président de la République.

4/ Comment le Président Abdoulaye Wade est pris en otage par son entourage au risque de sa propre vie

Monsieur le Président, voilà que ce qui aurait paru inimaginable il y a de cela quelques années, est là entrain de se passer tranquillement sous le regard du peuple sénégalais et du monde entier. En effet, le Président de la République, malgré sa toute puissance, est purement et simplement pris en otage par son entourage égoïste, en dépit de son état de santé. Ces gens là sont prêts à tout pour conserver leurs avantages, prébendes et sinécures, or pour cela il faut coûte que coûte que Abdoulaye Wade se représente en 2012, quel que soit le prix à payer pour ce dernier.
Et pour obliger le Président de la République à se plier à leur volonté, ils n’ont certainement pas hésité à provoquer la panique et l’angoisse permanentes chez lui en évoquant à tout bout de champ sa traduction certaine devant la Haute Cour de Justice s’il en venait à perdre le pouvoir. Je dis ici qu’entretenir sciemment un état de panique et une angoisse permanentes chez une personne âgée et malade de surcroît, donc très fragile, est déjà en soi un crime odieux.
Mais ce que je soupçonne d’encore plus odieux est le fait suivant. Avec les différentes maladies dont souffre le Président et les traitements très lourds auxquels il est soumis depuis de nombreuses années, mais surtout avec le poids de l’âge, cet homme aurait du être au repos depuis bien des années. Or voilà que, non seulement, il est encore en activité, mais mieux, il est très souvent sur de nombreux fronts à la fois, même si son apparence extérieure ne prête plus au change maintenant, pour des personnes averties. Le problème est donc de savoir quelle thérapeutique peut bien lui être administrée pour lui permettre de pouvoir encore accomplir ces performances qui dans son cas relèvent tout simplement du miracle ?
Ma conviction de médecin est déjà faite et je suis sûre et certaine que le Président Abdoulaye Wade est victime d’un véritable acharnement thérapeutique qui lui permet de pouvoir faire face au public chaque fois que cela est nécessaire. Mais pour qui connaît les méfaits des acharnements thérapeutiques, il y a de quoi avoir sérieusement froid dans le dos. Le cas Michael Jackson est encore là tout tristement frais dans nos mémoires et il serait vraiment malheureux que le Président Abdoulaye Wade nous fasse un beau matin ce que j’ai surnommé « Le syndrome Michael Jackson » pour qualifier la mort de ce dernier par overdose thérapeutique.
Monsieur le Président, avec tout ce que je viens de vous expliquer ici, je nourris quelque crainte légitime que la vie du Président Abdoulaye Wade puisse être en danger avec son entourage actuel qui, à force de vouloir lui en demander chaque jour davantage, malgré son état de santé, pourrait provoquer chez lui et sans le vouloir « Le syndrome Michael Jackson ».
En fait une bonne partie du peuple sénégalais assiste sans rien dire au tournage d’un film des plus macabres et que l’on pourrait simplement intituler « Silence, on assassine… ». Et cette attitude de « Laisser faire sans rien dire » ne pourrait être qualifiée autrement que de non assistance à personne en danger, là où le peuple sénégalais devrait plutôt s’évertuer à jouer « Il faut sauver le Général Wade ».

5/ Comment mettre fin à cette prise d’otage et libérer le Président Abdoulaye Wade

Monsieur le Président, devant la situation de l’état de santé du Président de la République et devant les menaces que le comportement de son propre entourage pourrait faire peser sur cet état de santé, voire même sur sa propre vie, j’ai décidé, en tant que citoyenne et en tant que médecin, d’assumer pleinement mes responsabilités en procédant à la saisine du Conseil Constitutionnel.
Comme j’ai déjà eu à vous le dire, cette décision est loin d’être une décision prise à la légère. Cette décision est le fruit de plusieurs années de mûre réflexion, dans la solitude et la discrétion des plus totales et le sens des responsabilités le plus profond.
Monsieur le Président, je suis persuadée que ma saisine ne sera que l’expression d’un sentiment aujourd’hui largement partagé par mes collègues médecins, voire tous les observateurs avertis et la majorité du peuple sénégalais. A l’heure où l’on s’interroge de plus en plus sur les modalités de votre saisine formelle ou de la possibilité d’une auto saisine, dans l’hypothèse d’une incapacité pouvant conduire à une vacance du pouvoir politique, l’occasion vous est offerte d’exploiter les éléments mis aujourd’hui à votre disposition à travers la démarche purement citoyenne d’un médecin sénégalais.
D’autre part, je suis convaincue que le Président de la République, de son côté, a tout à gagner dans une telle démarche pour plusieurs raisons. D’abord il ne sera plus soumis à la pression de son entourage qui le tient en otage et cherche à l’utiliser. Ensuite il pourra tranquillement se retirer pour pouvoir se faire traiter en fonction de ses différentes pathologies, sans aucune pression extérieure. Et enfin, fait très important, il n’aura plus à subir un acharnement thérapeutique avec tous les risques que cela comporte.
Monsieur le Président, il apparaît de tout ce qui précède que le Conseil Constitutionnel est la seule voie républicaine pour mettre un terme à la prise d’otage du Président de la République par son entourage et permettre une continuité normale de l’Etat, tout en préservant ce qui me parait primordial, c'est-à-dire l’état de santé du Président de la République.

6/ Motivations du Docteur Mame Marie Faye dans le cas du Président Abdoulaye Wade
Les différentes affections qui frappent actuellement le Président Abdoulaye Wade sont des affections auxquelles j’ai été parfois confrontée tout au long de ma carrière médicale et dont je connais quelque peu l’évolution progressive jusqu’au stade final. Les patients atteints d’une seule de ces affections sont déjà des patients fragilisés, à plus forte raison quand ces différentes affections sont associées chez le même patient. Et cette fragilisation des malades est surtout liée aux troubles psychiques qui une fois installés évoluent inexorablement au détriment du malade ; ce qui fait que ce dernier a besoin de toujours plus d’attention, de soins, de sollicitude et de compassion et ceci jusqu’à la dépendance totale. Avec ce genre de malade, on est amené à faire appel à toute l’humanité dont on peut être capable.
Dans le cas du Président Abdoulaye Wade, mes motivations sont de plusieurs ordres.
D’abord des considérations d’ordre politique. En effet, quels que soient les reproches que l’on puisse faire à Abdoulaye Wade, il faut au moins lui reconnaître le mérite d’avoir beaucoup fait pour la consolidation de la démocratie au Sénégal et en Afrique et rien que pour cela, il lui a fallu consentir de nombreux sacrifices. Donc faisons en sorte de lui réserver une sortie honorable, ne serait-ce qu’en raison de son âge et de son état de santé.
Ensuite des motivations purement humanitaires. Pour le médecin que je suis, habituée à être confrontée à toutes sortes de souffrances humaines, la sollicitude et la compassion envers les malades ne sauraient être nullement sélectives. Pour moi, le Président Abdoulaye Wade malade devient avant tout un malade avant d’être un Président de la République. Par conséquent sa condition de malade lui donne droit à la protection conférée par la déontologie médicale et par la loi.
Puis notre responsabilité envers le peuple et envers les générations futures. Cette responsabilité est hautement interpellée lorsque étant au fait de l’état de santé du Président de la République on voit ce dernier avoir la prétention de solliciter auprès du peuple un autre mandat en dépit de cet état de santé. Notre sens patriotique nous commande alors de prendre nos responsabilités envers le peuple sénégalais, mais surtout envers les générations futures. La charge de Président de la République est la charge la plus lourde qu’un homme puisse assumer dans son pays. Elle nécessite donc de cet homme qu’il soit en pleine possession de ses capacités physiques, mentales et intellectuelles.
Il est vrai que cela relève de la compétence du Conseil Constitutionnel de juger de la capacité ou de l’incapacité du Président de la République quant à la vacance du pouvoir politique ; cependant, le Conseil Constitutionnel a besoin de l’avis d’experts et de sachants pour pouvoir décider de cela.
Enfin la libération de ma conscience. Comme j’ai déjà eu à le dire, cela fait de nombreuses années que je connais assez bien l’état de santé du Président Abdoulaye Wade. De nombreuses années que je suis indirectement et de loin l’évolution progressive de cet état de santé. Et tout ceci dans la discrétion et le silence le plus total eu égard au secret professionnel. Le Président Abdoulaye Wade n’est pas le premier Chef d’état au monde à tomber gravement malade dans l’exercice de ses fonctions et son état de santé ne soulèverait pas autant d’inquiétude s’il ne se trouvait pas que l’évolution de cet état de santé commence à avoir de sérieuses répercussions sur la marche de l’Etat et même sur le devenir du pays.
Il se trouve en effet que ce n’est pas seulement l’état de santé physique du Président qui s’est dégradé avec le temps, mais c’est malheureusement son état de santé mentale qui s’est sérieusement dégradé le conduisant aux comportements de plus en plus étranges que nous constatons chaque jour avec leur lot de conséquences, toutes plus néfastes les unes que les autres pour le pays.
Or en tant que médecin, je suis bien au fait de l’état de santé mentale du Président de la République, de même que bon nombre de mes collègues médecins d’ailleurs, puisque nous ne cessons de nous en inquiéter et d’en parler en secret entre nous. Je pense qu’il est temps que mes collègues médecins avec qui je ne cesse de discuter se décident maintenant à prendre leurs responsabilités. C’est bien beau le confort de la carrière médicale, mais il faut aussi penser au peuple sénégalais, dont nous sommes une composante à part entière, et aux générations futures auxquelles nos enfants, pour qui nous avons consentis de lourds sacrifices, appartiennent de même que nos petits-enfants.
L’état de santé du Président de la République est pour moi source d’inquiétude depuis des années, mais je n’hésiterai pas à avouer ici en toute humilité que depuis sa réélection en 2007, je peine à trouver le sommeil la nuit, connaissant l’évolution progressive de son état de santé et les conséquences possibles qui pourraient en découler pour ce pays.
Monsieur le Président, j’ai gardé le silence le plus total sur l’état de santé du Président Abdoulaye Wade pendant de nombreuses années, non seulement parce que je suis tenue au secret professionnel, mais aussi parce que je suis discrète de nature. Mais actuellement la situation a atteint un point tel que ma conscience ne me permet plus de continuer à faire comme si de rien n’était et à garder le silence devant le peuple. Après toute une vie de sacrifices consacrée à la médecine et au combat politique, je me vois mal avoir honte demain devant le peuple sénégalais du fait de mon silence, ou avoir à rendre compte devant l’Histoire. Donc devant la situation actuelle, j’ai décidé d’assumer mes responsabilités pleines et entières comme m’y autorisent la Constitution, le Code de déontologie médicale et la loi.

7/ Dérogations au secret médical et levée du secret médical

La Constitution du Sénégal reconnaît à tout citoyen la liberté de pensée, la liberté de conscience et la liberté d’expression.
Le Code de déontologie médicale du Sénégal du 10 Février 1967 stipule en son article 7 : « Tout médecin est astreint au secret professionnel, il peut en être délié par la loi ». Cet article est l’équivalent de l’article 4 du Code de déontologie médicale français dont s’est inspiré le Code de déontologie médicale sénégalais.
L’article 363 du Code pénal sénégalais dispose en son alinéa 1er que : « Les médecins, chirurgiens, ainsi que les pharmaciens, les sages-femmes et toutes autres personnes dépositaires, par état ou par profession ou par fonctions temporaires ou permanentes, des secrets qu’on leur confie, qui, hors le cas où la loi les oblige ou les autorise à se porter dénonciateurs, auront révélé ces secrets, seront punis d’un emprisonnement d’un à six mois et d’une amende de 50.000 à 300.000 francs ».
Cet article 363 du Code pénal sénégalais est le pendant de l’article 378 de l’ancien Code pénal français. Dans le nouveau Code pénal français en vigueur depuis le 1er Mars 1994, l’article 378 est remplacé par les articles 226-13 qui traite du secret médical et des sanctions y afférent et 226-14 qui traite des cas où l’article 226-13 n’est pas applicable.
Et même la loi Kouchner de Mars 2002, dans sa partie traitant du secret médical, tient rigoureusement compte des cas de dérogation expressément prévus par la loi.
L’article 49 du Code pénal sénégalais traite, quant à lui, de la non assistance à personne en danger.
Malgré la lourdeur du secret médical et la vétusté du Code de déontologie médicale sénégalais qui date de Février 1967, en dépit de toutes les avancées faites en Médecine, il existe des dérogations au secret médical. Ces dérogations peuvent être obligatoires ou facultatives. Et parmi les dérogations obligatoires au secret médical, celles qui nous intéressent ont trait à la personne en état d’invalidité ou la personne qualifiée d’incapable majeur, à la personne en danger du fait de son entourage et la personne qui peut représenter un danger pour les autres. Dans ces cas précis, le médecin est autorisé à lever le secret médical et à saisir les autorités compétentes.
Le cas dont nous devons traiter ici est un cas très particulier et d’une extrême importance puisqu’il s’agit du cas du Président de la République en personne, donc du premier sénégalais de ce pays. Or dans quelle situation médico-sociale se trouve cet homme là ?
Nous voici en face d’un homme de 84 ans (âge officiel) atteint de plusieurs maladies plus ou moins graves qui ont fini à la longue par affecter très sérieusement non seulement ses capacités physiques et intellectuelles mais surtout ses facultés mentales au point de rendre le comportement de l’homme très souvent incompréhensible pour le commun des mortels. Mais aussi comportement dangereux pour toute une nation, au vu des pouvoirs très étendus dont l’homme dispose. De plus cet homme se trouve être pris en otage, surtout du fait de son âge, de la maladie et de son incapacité à réellement se défendre, par un entourage mu par ses seuls intérêts et dont l’attitude est à même de mettre en danger la vie même de cet homme qui n’est autre que le Président de la République.
Monsieur le Président, j’aimerais bien que l’on me dise ce que pèserait le secret médical devant tant de périls aussi bien pour l’homme que pour la pérennité de la République.

8/ Conduite à tenir à partir de maintenant concernant le Président Abdoulaye Wade

Vu l’état de santé du Président Abdoulaye Wade, deux problèmes se posent actuellement sur le plan médical. D’abord le problème de sa candidature pour un troisième mandat en 2012, ensuite le problème de sa capacité à terminer le mandat en cours.
8-1/ Candidature de Abdoulaye Wade pour un troisième mandat en 2012
A exclure totalement, parce que tout simplement inimaginable sur le plan médical. Avec tout ce que le peuple sénégalais a déjà constaté ces derniers temps concernant l’état de santé du Président de la République, surtout son état de santé mentale, et tout ce que je me suis évertuée à expliquer depuis le début de ma correspondance, sans pour autant lever le secret médical, il est tout à fait hors de question de laisser le Président Abdoulaye Wade solliciter un autre mandat auprès du peuple sénégalais. Je dirais même que s’il s’agissait d’un tout premier mandat, vu son âge et son état de santé, il serait hors de question de le déclarer apte à se présenter, à plus forte raison maintenant lorsqu’il s’agit du troisième mandat d’un octogénaire devenu complètement inapte.
Je réaffirme encore solennellement ici qu’en 2012, le Président Abdoulaye Wade sera alors médicalement dans l’incapacité totale à assumer la charge de Président de la République. Pour le corps médical auquel j’appartiens, nous sommes complètement époustouflés de voir, je ne dirais même pas des analphabètes, mais des intellectuels dont certains supposés être d’un « Très haut niveau », oser se pointer tranquillement devant le peuple sénégalais ou voyager à travers le monde pour parler de la candidature et de la réélection de Wade en 2012. On se croirait vraiment en plein délire schizophrénique. Je crois qu’il est temps que les gens deviennent sérieux et réalistes, mais surtout qu’ils comprennent que dans le cas d’espèce, il ne s’agit pas d’un jeu, mais qu’il est question d’un être humain capable de sentiments, d’un vieil homme malade avec plus de faiblesses que de force et qui a plus besoin de compassion et de protection que de discours menteurs et d’applaudissements inutiles.
Monsieur le Président du Conseil Constitutionnel, sachez dès à présent qu’en ce qui concerne le Corps médical, aucun médecin digne de ce nom n’acceptera de se prononcer en faveur de la candidature de Abdoulaye Wade pour 2012, parce que comme on dit « Nous savons tout, mais nous ne disons rien ». Cependant au rythme où vont les choses, bientôt nous risquons de tout dire.
8-2/ Capacité de Abdoulaye Wade à terminer le mandat en cours
Pour les membres du Corps médical, la candidature de Wade pour 2012 est un problème dépassé dont nous ne voulons même plus entendre parler. Pour nous le vrai problème qui nous intéresse, et qui à la limite même soulève de sérieuses inquiétudes, est de savoir si le Président de la République est à même de pouvoir terminer le mandat en cours jusqu’en 2012, au vu de son état de santé physique, mais surtout mentale qui se dégradent de jour en jour.
Monsieur le Président, ceci est une des raisons principales qui m’ont fait vous adresser cette lettre. Habituée à être en contact avec des personnes présentant les mêmes maladies que le Président de la République, l’évolution de ces maladies n’a plus beaucoup de secrets pour moi aujourd’hui. Et comme j’ai déjà eu à le dire, voilà des années que je suis indirectement et de loin l’évolution de l’état de santé du Président Wade. Or ce que j’ai observé ces derniers temps concernant l’évolution de son état de santé commence à soulever chez moi de sérieuses inquiétudes quant à la poursuite de cette évolution qui semble présenter les signes d’un début de décompensation. Et si le Président de la République commence à présenter des signes de décompensation, surtout sur le plan mental, il est alors certain qu’il lui sera extrêmement difficile, voire même impossible, de terminer normalement son mandat en cours au vu des lourdes responsabilités inhérentes à sa charge.
Dans la situation de crise, à tous les niveaux, qui est sienne, le Sénégal ne peut se permettre le luxe d’avoir à sa tête un homme qui n’est plus en possession de toutes ses capacités physiques, à plus forte raison mentales. Les plus grands reproches que l’on pourrait faire au peuple sénégalais sont d’aimer les solutions de facilité, de toujours prendre les choses à la légère et de ne jamais savoir anticiper sur les événements. Or dans le cas présent, le problème de l’état de santé du Président de la République est un problème beaucoup trop sérieux pour être mis sous le coude ou évacué à la légère, parce qu’il engage non seulement la vie de 14 millions de sénégalais, mais aussi l’avenir des générations futures auquel nous nous devons de penser.
Il appartient donc maintenant à chacun d’entre nous de savoir prendre ses responsabilités envers le peuple, mais surtout envers l’Histoire.

9/ Refus de toute forme d’utilisation politique de ce problème médical

Monsieur le Président, les médecins sénégalais, comme tous les médecins de par le monde, sont très souvent confrontés à des situations pareilles à celle du Président Abdoulaye Wade, ici même au Sénégal. Mais dans ces cas là, il ne s’agit pas du Chef de l’Etat, mais de simples individus comme on en voit tous les jours. Et pour ces gens là, après diagnostic et avis médical, la résolution du cas ne pose pas souvent de problème, surtout dans nos familles africaines où tout se règle à l’amiable le plus souvent en conseil de famille. C’est ce conseil de famille qui décide ainsi de la mise sous tutelle de l’intéressé et de la personne qui est alors chargée d’assurer cette tutelle. Il est assez rare même que des tiraillements familiaux amènent certains membres de la famille à saisir la justice pour la résolution définitive du problème.
S’il s’agissait ici du cas Abdoulaye Wade, simple individu, son cas aurait pu être tranquillement réglé au Point E par les membres de sa famille, dans la discrétion la plus totale, parce que seuls les membres de sa famille auraient été concernés. Mais malheureusement pour lui, Abdoulaye Wade n’est pas n’importe qui. Il est le Président de la République du Sénégal, Chef de l’Etat, gardien de la Constitution, premier magistrat du pays, Chef suprême des forces armées et première Institution de ce pays. Donc tout ce qui a trait à lui et particulièrement son état de santé et son avenir politique concernent au plus haut point la nation toute entière.
Cependant, malgré toutes les prérogatives qui sont les siennes, le Président de la République n’est ni un dieu, ni un prophète, ni même un saint, il est un simple être humain fait de chair et de sang et soumis aux aléas de la maladie comme tout un chacun. Et c’est là où le médecin se doit d’intervenir en prenant toutes ses responsabilités et en jouant pleinement son rôle comme le Code de déontologie médicale et la loi l’y autorisent.
Le problème du Président Abdoulaye Wade est avant tout un problème médical, c’est la raison pour laquelle nous ne saurions en aucun cas accepter qu’une quelconque utilisation politique soit faite de son état de santé. Et nous entendons nous opposer avec la dernière énergie à toute forme d’utilisation qui pourrait en être faite dans ce sens, et par qui que ce soit d’ailleurs. Dans le cas présent, forces resteront à la médecine et à la loi. Il n’y a aucune raison à ce que des médecins puissent régler des problèmes de ce genre à longueur d’années, et qu’aujourd’hui, pour des raisons de politique politicienne ou d’intérêts personnels malsains, ces mêmes médecins puissent être soumis à des pressions extérieures qui auraient pour but de chercher à peser sur leur conscience ou à entraver la marche de leur travail. S’il advenait que de tels actes se produisent, nous n’hésiterons pas un seul instant à dénoncer ouvertement les auteurs de pareilles forfaitures et à porter leurs noms à la connaissance du peuple sénégalais.
Les seuls problèmes qui nous intéressent ici sont l’état de santé du Président de la République et la pérennité de la République.

Conclusion

Monsieur le Président du Conseil Constitutionnel, avec l’état de santé du Président de la République, le Sénégal se trouve aujourd’hui confronté à une situation inédite de toute son histoire, mais il n’existe pas de problème sans solution. Le tout réside dans le degré d’intelligence et de bonne volonté dont nous saurons faire preuve. Pour cela, il faudra que chacun d’entre nous accepte d’accomplir avec une totale honnêteté et une absolue abnégation la mission qui lui revient. Ceci suppose savoir taire nos intérêts personnels égoïstes au profit de l’intérêt supérieur de la nation et des générations à venir. Il appartiendra au peuple sénégalais de savoir faire face à l’adversité avec hauteur, dans le calme et la dignité, comme nous avons toujours su le faire par ailleurs, en sachant que le monde entier aura les yeux fixés sur nous.
En ce qui me concerne, après des années de silence, j’ai décidé aujourd’hui d’assumer mes responsabilités pleines et entières comme le Code de déontologie médicale et la loi m’y autorisent. A travers une correspondance que j’ai voulue détaillée, sans pour autant lever le secret médical, je pense vous avoir fait saisir la gravité de la situation à laquelle nous sommes confrontés, mais aussi l’urgence qui nous est faite d’y apporter une solution dans un délai des plus courts. J’entends d’ailleurs porter cette correspondance à la connaissance de tout le peuple sénégalais parce qu’il est le premier concerné.
Monsieur le Président, j’aimerais que vous compreniez que cette lettre ne vous est pas adressée par une personne qui pourrait avoir une quelconque motivation politique ou personnelle. Cette lettre vous est adressée par une citoyenne, un médecin qui a été longtemps très proche du Président de la République, qui a eu à suivre, même si c’est de loin et indirectement, l’évolution de l’état de santé de ce dernier et qui juge aujourd’hui, en âme et conscience, que cet état de santé a atteint un point tel qu’il urge maintenant que chacun prenne les responsabilités qui lui sont assignées et par Dieu et par ses fonctions.
J’aimerais aussi que vous sachiez qu’au-delà d’un certain délai (un mois au maximum), sans aucune réponse de votre part à ma correspondance, je me verrai alors dans l’obligation de lever le secret médical couvrant cette affaire et d’expliciter de la façon la plus exhaustive les différentes maladies décrites plus haut sous les signes A, B,C et D.
Il me serait d’ailleurs impossible d’agir autrement parce qu’il s’agit ici d’une affaire d’une extrême gravité ayant trait à une personne âgée, à la santé précaire, qui se trouve prise en otage par un entourage sans aucun scrupule et dont l’attitude même pourrait mettre en danger la vie de l’intéressé. Ne pas agir ne pourrait être qualifié autrement que de non assistance à personne en danger, surtout lorsqu’il s’agit du Président de la République, donc la première institution du pays. Sans oublier maintenant l’avenir de toute une nation.
Dans l’espoir d’avoir sous peu des nouvelles favorables, je vous prie de croire, Monsieur le Président, à l’expression de toute ma considération.

Docteur Mame Marie Faye.



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