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Vendredi 24 Décembre 2010

REVELATIONS DE WIKILEAKS SUR LE SENEGAL : L’image du pays ternie par les scandales


Divulguées la semaine dernière par de grands journaux étrangers, les révélations de Wikileaks sur le Sénégal, ont de quoi inquiéter Wade et sa galaxie. Portant sur la corruption, le monument de la Renaissance, la présidentielle de 2012 ainsi que de divers autres scandales, ces télégrammes diplomatiques américains écornent à jamais l’image du Sénégal.



REVELATIONS DE WIKILEAKS SUR LE SENEGAL  : L’image du pays ternie par les scandales
Le Sénégal ne véhicule plus vraiment une bonne image à l’étranger. Ces dernières semaines, le pays s’est retrouvé à plusieurs reprises en bonne place dans les médias étrangers. Et ce n’était pas seulement pour commenter le 3e Festival mondial des arts nègres. Mais plutôt pour scruter ce qui se passe sur le front de la corruption et de la mal gouvernance érigées en règle par nos dirigeants. C’est tout le prestige au niveau international qui s’effrite au fur et à mesure que les « scandales à milliards » se suivent. Aujourd’hui, ce sont des affaires de corruption qui remettent au devant de la scène la gestion clanique de l’Etat. C’est du moins ce qui ressort des échanges diplomatiques américains publiés par le site Wikileaks le 9 novembre dernier. Repris par le journal Le Monde et d’autres journaux étrangers, les télégrammes diplomatiques américains en question, sont loin d’être en faveur du président Abdoulaye Wade et de son fils Karim. L’absence de clarté et de consensus concernant le décret pris le président de la République en vue de soustraire les services de la présidence du contrôle de l’Armp (Autorité de régulation des marchés publics), avait déjà suscité la curiosité étrangère au point que cinq ambassadeurs occidentaux (de l’Allemagne, des Pays-Bas, du Canada, des Etats-Unis, et de l’Union Européenne) aient fini par exprimer leurs inquiétudes à travers une lettre conjointe. Aujourd’hui, leurs appréhensions ne font que s’accentuer avec les fracassantes révélations de Wikileaks où figure en bonne place un long entretien entre le président Wade et Mme Marcia Bernicat, ambassadrice des Etats unis d’Amérique au Sénégal.

D’après le journal Le Monde, dans ce télégramme daté du 18 février 2010, l’ambassadrice des Etats-Unis y signifie au président que « l’impression selon laquelle la corruption est répandue est aujourd’hui devenue [au Sénégal] une réalité qui ne peut être combattue que par des mesures concrètes ». Un état de fait qui n’avait pas à l’époque manqué de susciter l’ire du président Wade. D’ailleurs dans ses précédentes éditions, La Gazette informait « qu’en réaction au communiqué des Américains qui demandaient à l’Etat du Sénégal de prendre des mesures contre la corruption, comme le stipule le contrat signé par les deux Etats dans le cadre du Mcc, Me Wade a convié Mme Bernicat en présence des journalistes pour la rabrouer et lui dire qu’il était prêt à renoncer au programme Millenium challenge corporation, (Mcc) financé à hauteur de 540 millions ». Mais le document diffusé par Wikileaks lève aujourd’hui le voile sur cette affaire et révèle une toute autre réalité de la question. En effet le document note qu’au moment où l’ambassadrice a été ferme en indiquant au président que le Sénégal pourrait perdre le financement du Mcc, ce dernier, inquiet « a aussitôt demandé des assurances avant de reconnaitre après un gloussement qu’il y avait nécessité de réagir contre la corruption ». Une décision qui, en tous les cas semble loin d’être appliquée. D’ailleurs dans le même télégramme, l’ambassadrice ne manque de souligner que « le président va louvoyer entre des mesures et la poursuite de l’autorisation donnée à ceux qui sont habitués à se servir dans les caisses du gouvernement, de le faire afin de s’assurer que leur loyauté demeure intacte ». Avant d’ajouter que « les ressemblances frappantes entre le père et le fils dans ce domaine montrent que tous les deux continuent de sous-estimer l’importance de cette question pour les bailleurs de fonds et, de plus en plus, pour les électeurs ».

Le Sénégal, « une démocratie faiblissante »

La politique intérieure du pays et les échéances électorales de 2012 ont également beaucoup intéressé les diplomates occidentaux. Dans un autre télégramme de l’ambassade américaine à Paris, daté du 2 février 2010, également cité par le journal Le Monde, un diplomate français juge « crédible » le scénario d’une élection anticipée car, selon lui, « Wade réalise que ni lui ni Karim ne peuvent gagner en 2012 sans une fraude massive que le pays et la communauté internationale ne pourraient supporter ». Très soucieux de la situation politique, les diplomates, note le journal Le Monde, estiment que « si Abdoulaye Wade décédait sans avoir désigné de successeur, suivrait probablement “une période de violente lutte intestine dans les deux camps, et une instabilité générale du pays ». Par ailleurs dans leurs mémos, ces diplomates décrivent le Sénégal comme « une démocratie faiblissante » où « le père et le fils sont plus occupés à ouvrir une voie à une succession présidentielle dynastique qu’à s’attaquer aux problèmes urgents que sont le prix élevé des denrées de première nécessité, les coupures électriques fréquentes ou la périlleuse émigration des jeunes vers l’Espagne ».

A cela, s’ajoutent les inquiétudes des occidentaux qui, dans d’autres mémos s’interrogent sur « les appels du président Wade pour solliciter le soutien de Sarkozy pour le prix Nobel, les 52 millions de francs CFA (79 273 euros) volés dans son appartement de Paris par un membre de son entourage, les ‘cases des tout-petits’ dénommées ‘coquilles vides’, la pléthore de ministres, l’opacité dans le financement du monument de la renaissance, les scandales financiers, le fait que Karim Wade est aujourd’hui surnommé ‘Monsieur 15 %’ alors qu’au début de 2007, on l’appelait ‘Monsieur 10 %’ etc. ».

Au regard de cette liste noire et humiliante qui vient confirmer les scandales régulièrement relatés par la presse locale, ce sont autant de cas très mal vus de l’extérieur et qui permettent facilement de mesurer le net recul du Sénégal. Ces craintes ne faisant toutefois qu’écorner l’image du pays et son attractivité si l’on sait sa grande dépendance des partenaires étrangers et occidentaux en particulier. Alors qu’aujourd’hui encore, ces scandales semblent toujours en vogue, les inquiétudes des diplomates étrangers risquent de ne pas se dissiper de sitôt et la réhabilitation d’une image décente du pays s’annonce compliquée.

Papa Adama TOURÉ la gazette
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