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Un Parti socialiste mal barré !

Après trente (30) mois de compagnonnage gouvernemental avec le Président de la République à travers la coalition Benno Bokk Yaakaar (BBY), le Parti socialiste (PS) vient de rendre officiel ce que tout le monde attendait d’une certaine manière : il veut et il sera présent à l’élection présidentielle de 2017. Ousmane Tanor Dieng l’a dit haut et fort lors du Comité central des « Verts » de ce week-end à Dakar.


Rédigé par leral.net le Mercredi 24 Décembre 2014 à 09:01 | | 0 commentaire(s)|

Un Parti socialiste mal barré !
Peut-il en être autrement au regard de l’histoire politique pluri-décennale dont le PS depuis 1976 est témoin en continuité parfaite des œuvres de sa devancière néocoloniale, l’Union progressiste sénégalaise (UPS) fondée en 1958 ? Peut-il en être autrement pour un parti politique (et un système) qui a gouverné le Sénégal de l’indépendance à l’an 2000, structuré le pays au plan institutionnel et politique, sacrifié en chemin une portion importante de ses potentialités et richesses dans des politiques de développement sans lendemain, et dont les ratés de gestion pèsent encore de manière négative sur les capacités du pays dans plusieurs domaines ?

A dire vrai, il n’y a donc rien de surprenant dans l’annonce faite par le secrétaire général du Parti socialiste. Le contraire n’aurait eu qu’une finalité, casser l’appareil en chapelles ardentes aux mains d’un minimum de chefs de clans sans grande perspective alternative.

Scénario wadiste

Du reste, la suite du scénario de ce feuilleton naissant en direction de la présidentielle de 2017 a déjà été écrite par… Abdoulaye Wade il y a plus de vingt ans : il suffirait juste au vieux parti senghorien de trouver un bon petit prétexte pour justifier un clash. Et le plus tôt serait le mieux même si le Président de la République, tactiquement, ne fera rien pour lui faciliter la tâche. Alors, on ferait comme Idrissa Seck : critiquer, dénoncer, non plus dans le secret des huis-clos (s’ils existent), mais publiquement, dans les médias, etc.

Cette démarche probable du PS ne saurait faire partie de la panoplie des registres qui font grandir une démocratie. Elle pose en effet un grave problème de cohérence politique. Comment assumer devant l’opinion le fait d’avoir co-gouverné le pays durant presque trois ans, en validant et en soutenant la plupart des orientations économiques et institutionnelles dont le très « fondamental » et « stratégique » Plan Sénégal Emergent (PSE), et le fait de se poser hic et nunc en adversaire revendiqué de ce même gouvernement, de ce même Président de la République, de ces mêmes orientations politiques au cours d’une élection majeure ?

Incohérences

Comment est-il possible de gérer cette contradiction capitale sans recourir aux artifices de la mauvaise foi et du reniement ? Comment ne pas polluer l’atmosphère et installer la suspicion dans les espaces de co-gouvernance ?
D’autre part, le choix du Parti socialiste pose en filigrane une question essentielle que les faucons de la majorité présidentielle vont agiter très vite et sans arrêt : jusqu’à quand les ministres socialistes vont-ils encore siéger en conseil des ministres ? La tentation pour le chef de l’Etat serait en effet très forte d’éloigner dès à présent des adversaires potentiels qui lui disent ouvertement être en devoir de le combattre en 2017. Qui lui en voudrait ? En attendant, le PS exploiterait cette forme de rupture en se posant en victime…

Aujourd’hui, les socialistes, encore alliés du chef de l’Etat, sont capables de dire qu’ils assument le bilan lié à leur période de présence dans l’alliance gouvernementale. Demain, quand ils en sortiront, ils ne se gêneront pas pour rectifier cet énoncé en leur faveur, dans le genre : ce bilan ne nous regarde plus depuis que nous ne sommes plus aux affaires…

Faute originelle

Nous persistons et signons : les alliés qui ont rejoint le gouvernement de Macky Sall au lendemain de la défaite d’Abdoulaye Wade ont commis une grave erreur de jugement. Il est vrai qu’en 2012, le « Wade dégage » était sur-dominant dans le pays entier. Mais ils auraient pu et dû exiger du futur chef de l’Etat la formalisation publique d’un contrat de gouvernance.

Ils ont préféré négocier des strapontins pour leurs cadres et clientèle politique, sans aucune garantie sur la direction qu’allait emprunter le Sénégal. Ils ont failli à ce niveau. Les couplets exaspérants sur « l’intérêt supérieur de la nation », « le devoir de sécuriser la victoire contre Wade », etc., avaient pris le dessus sur deux paramètres : la clarification du jeu et des débats politiques, le fonctionnement démocratique des institutions.

Finalement et contre toute attente, c’est l’Alliance des forces de progrès (AFP) de Moustapha Niasse qui emporte la palme de la cohérence : elle a choisi de soutenir le candidat Macky Sall en 2017, celui-là même qu’elle a investi en 2012. Elle en paiera certes les pots cassés par une désaffiliation massive de militants et de responsables, mais elle aura eu le mérite d’être transparente.

Le Parti socialiste peut-il en dire autant ? Pas si sûr ! En attendant une future sanction populaire, il devra trouver des remèdes du diable pour se trouver un candidat vraiment crédible en 2017…

Momar Dieng