LVS: Monsieur Kane, présentez-vous à nos internautes en quelques lignes ?
El Ousseyni Kane: je m’appelle El Ousseyni Kane, j’aurai 40 ans dans quelques mois, je suis né à Bokidiawé, ( Région de Matam, Département du même nom); j’ai fait mes études primaires à l’école de Bokidiawé, le collège à Thilogne et le lycée à Dakar Guédiawaye (Seydina Limamoulaye) où j’ai obtenu mon baccalauréat en 1995, j’ai obtenu ma maitrise en droit des affaires à l’Université Cheick Anta Diop de Dakar (UCAD), je suis ensuite parti en France en 1999 où j’ai obtenu trois diplômes de troisième cycle ( DEA en Droit Economique et des Affaires à l’Université d’Orléans, Master en Management des Affaires et Fiscalité, Diplôme d’Administration Publique, option Economie et Finances Publiques à l’Ecole Nationale d’Administration Française (ENA). Par la suite, j’ai commencé à travailler comme associé dans un cabinet d’Avocat d’Affaires, depuis maintenant huit (8) ans. Je suis marié et père de trois (3) filles que j’adore.
Je suis un passionné de lecture. Je lis essentiellement des essais politiques et des livres sur la religion.
LVS: Vous travailliez déjà en France, pourquoi votre retour au bercail?
El Ousseyni Kane: Je pense avoir acquis de solides expériences en France. J’ai développé un solide réseau dans le monde. Je suis arrivé jusqu’à présider un Club du Rotary International situé dans le Paris VIII, qui regroupe de prestigieux hommes d’affaires et de hautes personnalités politiques françaises. Mais je suis arrivé à un stade où je me suis posé la question de savoir ce que je peux apporter à ma localité et à mon pays.
Il fallait faire un choix entre ma vie professionnel et l’appel du devoir. Et effectivement je suis conscient que je peux apporter ma modeste contribution à l’émergence du Sénégal. Je n’ai pas le droit de renoncer à mon devoir. Et je pense que nous avons aujourd’hui dans ce pays toutes les conditions pour l’émergence et il faut juste mettre les bonnes personnes aux bonnes places pour conduire cette émergence.
Des hommes et des femmes prêts à se sacrifier, à renoncer à leurs privilèges, pour faire de leur pays un pays émergent. Et je fais partie de ces hommes et femmes parce que je ne souhaite pas assister à une nouvelle colonisation de mon pays qui ne sera pas politique mais économique. Si nous le voulons, ensemble nous pourrons développer ce pays.
LVS: Vous qui avez fait l’Université de Dakar, par rapport à la crise universitaire actuelle, quelles solutions préconisez-vous pour une université digne de ce nom?
El Ousseyni Kane: je dis d’abord que l’Université ne doit pas être une panachée. Je ne pense pas que tous les bacheliers doivent intégrer l’université. Le problème de l’école Sénégalaise ne se trouve pas à l’Université mais plutôt dans les lycées. Je crois que dans un pays en développement comme le Sénégal, il faut veiller d’abord à former des citoyens qui puissent créer demain leurs propres emplois. Il faut qu’on développe au Sénégal des lycées professionnels et des filières de formations modernes pour qu’au bout de trois ans des jeunes sortent avec un métier et que l’Etat alloue des aides à tous ces bacheliers professionnels qui pourront ainsi créer leurs propres entreprises seuls ou en s’associant. Donc on ne doit pas demander à tout le monde d’aller à l’Université et ça ne sert à rien de former des gens pour ensuite les mettre dans la rue. L’Ecole Sénégalaise doit permettre aux jeunes de sortir avec des métiers. L’Etat ne doit pas laisser la formation professionnelle aux seuls privés, privés qu’il faudra du reste bien surveiller quand il s’agit de l’avenir de notre pays.
LVS: Lors des dernières élections locales, vous étiez candidat à la Mairie de Bokidiawé, investit sur la liste de l’AFP alors que vous vous dites de l’APR. Comment expliquez-vous tout cela?
Ousseyni Kane: Vous savez, le département de Matam a connu beaucoup de chamboulements cette année, il s’est posé un problème de leadership un peu partout, pas seulement à Bokidiawé. Dans la commune de Bokidiawé, nous ne nous sommes pas entendus sur la gestion et la conduite de la liste de l’APR. Il y a eu des divergences et par la suite il a fallu que chacun fasse sa propre liste et aille à la rencontre des militants. J’étais convaincu que les personnes qui voulaient diriger cette commune-là manquaient de compétences, ils ont certes beaucoup de qualités mais la gestion d’une collectivité locale est une chose très complexe et il faut avoir un certain nombre de bagages et une certaine expérience pour y arriver.
En faisant notre propre liste, nous n’avons pas renoncé à notre appartenance à l’APR. D’ailleurs dans cette liste partie sous la bannière de l’AFP, on retrouvait plus de membres de l’APR que la liste partie avec le mandat du parti au pouvoir.
Nous sommes tous derrière le Président Macky Sall. Nous sommes allés aux élections et malgré tous les coups bas que nous avons reçus, malgré les millions qui ont été déversés par nos adversaires qui sont des milliardaires, malgré les fraudes, nous sommes quand même arrivés à faire un résultat de 40 %. Nos adversaires ont obtenu 46%, le score le plus faible de l’APR dans tout le Sénégal, ce qui démontre que ceux qui sont là aujourd’hui n’ont pas la majorité dans cette commune. Et il faut aussi souligner que mes adversaires sont là depuis trois ans et je suis là juste depuis quelques mois, cela veut dire que les choses auraient pu se passer autrement si j’avais eu juste une semaine supplémentaire, mais c’est n’est pas une mauvaise chose, je suis là pour travailler et apporter ma contribution au développement de la commune de Bokidiawé et du Sénégal. C’est pour cela qu’après les élections, nous avons dit que nous sommes prêts à travailler avec eux parce nous sommes dans un même parti et que ce qui nous intéresse c’est le développement de la commune de Bokidiawé. Mais l’autre partie a jugé meilleur de faire son bureau sans nous intégrer et créer quatorze commissions techniques sans nous en confier aucune. Ce qui est vraiment regrettable. J’aurais pu dire qu’après la défaite électorale, je plie bagages et rentre en France reprendre ma vie paisible mais je suis resté et je suis là depuis quatre(4) mois parce que je veux apporter ma pierre à l’émergence du Sénégal et à l’émergence de la Commune de Bokidiawé.
LVS: Vous faisiez face à l’entrepreneur Kalidou Wagué, qui a d’ailleurs remporté les locales dans votre Commune, comment vous justifier cette défaite?
El Ousseyni Kane: je dis qu’il s’agit d’une défaite électorale mais pas d’une défaite politique. Une défaite électorale parce que les résultats donnent vainqueur Monsieur Wagué qui est un ami, mais pas une défaite politique parce que le message que j’ai porté a été entendu par les populations et aujourd’hui ce sont des centaines d’anciens militants de Kalidou Wagué qui tapent à ma porte pour me rejoindre, des conseillers municipaux de l’autre camp qui tapent à ma porte parce qu’ils ont compris que je suis pas venu pour faire de la politique politicienne et ils ont compris que je peux aider la commune à faire un bond qualitatif.. Donc pour répondre à votre question, je dirai que c’est certes une défaite électorale mais pas politique. J’ai 40 ans et inchallah si le Bon Dieu me prête longue vie, je suis là encore pour 30 ans de vie politique et dans la vie politique il y a des défaites et des victoires et il vaut mieux commencer par une défaite et finir par une victoire. (Rires)
LVS: Pour rappel, vous êtes le fils de Baydalaye Kane qui fut le Président de la Communauté Rurale de Bokidiawé pendant plusieurs années, si vous remportiez les élections locales. Est-ce qu’on n’aurait pas dit qu’il y a une « dévolution monarchique » du pouvoir à Bokidiawé?
El Ousseyni Kane: (Rires) oui cela a été l’argument phare de mes adversaires pendant cette campagne comme quoi que j’ai été parachuté par mon père. Mon père est un homme politique doté d’une grande finesse d’analyse, avec une vie politique remplie par 40 ans d’expériences dans toute la région de Matam.
Cette dévolution aurait pu être vraie si je n’avais pas les compétences pour briguer les suffrages dans cette commune. Ça aurait pu être vrai si je n’ai jamais participé aux activités de développement de cette Commune. Cela fait 15 ans que je suis dans le développement économique et social de Bokidiawé. Je suis membre actif et a participé à la création de toutes ses associations, je suis venu au moins trois fois à Bokidiawé pour participer au règlement des problèmes du forage, à la construction d’un centre de santé et aux activités de développement de cette localité. J’ai créé ici à l’Université de Dakar, l’Association des Etudiants Ressortissants de Bokidiawé, je suis membre depuis quinze ans du bureau, en France, de l’Association de Développement de Bokidiawé en qualité de secrétaire Général. Si je n’avais rien fait pour cette localité et qu’aujourd’hui je descendais pour dire que je veux la Mairie, on aurait pu dire que je suis le fils de…mais j’ai d’abord ma carte de visite à Bokidiawé et dans cette commune, qui est en dehors de celle de mon père. Mais je suis fier de ce papa qui m’a enseigné beaucoup de choses, ce papa qui est une référence politique dans la Région de Matam et beaucoup de gens le savent et c’est vrai que cela me renforcera dans ma carrière politique.
LVS: certains disent que vous êtes très proche de l’ingénieur agronome, le milliardaire Harouna Dia, par ailleurs financier de Macky Sall, pouvez-vous élucider l’opinion sur vos liens?
El Ousseyni Kane: Harouna Dia est proche de toutes les personnes qui aident le Président Macky Sall. Et J’aide le Président Macky Sall. Harouna Dia a compris que le Président Macky Sall a un grand projet pour la Région de Matam et a décidé de se battre à ses côtés sans attendre rien en retour. Ce qui l’intéresse c’est de participer au développement économique de la Région de Matam et du Sénégal dans le cadre des politiques définies par le président Sall. Il me dit qu’il n’est pas un politicien mais un patriote, un soldat du Sénégal. Et qu’il veut apporter sa contribution au développement du Sénégal. Je partage cette vision avec lui et suis prêt à l’accompagner à côté du président Macky Sall pour arriver à ce résultat.
LVS: on prête aussi à ce milliardaire d’avoir financé votre campagne durant les locales. Est-ce vrai tout ça?
El Ousseyni Kane: Harouna Dia a compris que ceux qui étaient derrière moi étaient des militants de l’APR, des militants qui ont donné à Macky Sall sa victoire dans cette commune en 2009 déjà, en déboulonnant de grands ténors du parti au pouvoir de l’époque dans cette zone. Il a aidé à la préservation du dynamise de l’APR dans la commune de Bokidiawé.
Nous avons mené une campagne électorale extraordinaire lors de ces locales. Tous les observateurs ont apprécié et aimé la manière et la force de cette campagne.
L’APR a aidé au financement de la campagne de Monsieur Kalidou Wagué, qui n’en avait pas d’ailleurs besoin et nous nous sommes débrouillés avec mes moyens personnels, ceux de bonnes volontés et le soutien des amis et des parents et nous avons réussi à faire la campagne la plus extraordinaire de la Région. Nous avons pu délivrer un message propre sans violence.
Je suis rassuré aussi parce que je sais que Harouna Dia sera toujours disponible pour la Région de Matam pour aider à son décollage comme il le sera aussi pour le Sénégal à côté du président Macky Sall. C’est une chance pour la Région d’avoir quelqu’un comme Harouna Dia, d’autant plus qu’il n’est pas venu se battre pour des postes politiques ni pour être ministre, mais il est toujours présent quand on parle de développement de la Région de Matam et du Sénégal.
LVS: Parlons à présent de la visite économique du Président Sall dans la Vallée, en se contentant de la Région de Matam de manière générale, quel bilan faites-vous des deux ans et demi de Macky Sall au pouvoir?
El Ousseyni Kane: Le président a trouvé la région de Matam dans un dénuement total. Le régime précédant avait oublié cette partie du Sénégal. Je crois que le Président Macky Sall a une vision économique solide pour la Région de Matam. Le Président veut réaliser le rêve de faire de Matam la Californie du Sénégal et heureusement cette région détient toutes les potentialités pour être le grenier du Sénégal. Aujourd’hui beaucoup de projets sont en cours, notamment un casier agricole de plus de 1000 ha que le Président va d’ailleurs visiter à Doumga Ouro Alpha et Ndouloumadji. Nous sommes vraiment ravis que le Président revienne dans notre Région après le Conseil des ministres décentralisé pour suivre l’état d’avancement de ses projets. Je peux vous dire que la Région de Matam est en chantier et que le Président laissera un bilan extraordinaire dans cette Région. Seulement il faut qu’il ait des hommes pour accompagner tout cela, des hommes et des femmes politiques compétents et visionnaires ensemble avec des techniciens et une administration forte pour veiller à la bonne application des directives du Président. C’est l’occasion de saluer la disponibilité et la compétence de l’actuel directeur de la SAED qui mène un travail formidable dans la région. Les leaders politiques doivent, malgré leurs divergences passées, accueillir le Président dans la dignité et la sobriété parce qu’il vient pour une visite économique et poser le débat sur les questions économiques. Il y a beaucoup de choses qui restent à faire et le Président est là pour recueillir aussi les doléances des populations, il ne faut pas rater cette occasion.
LVS: si on se limitait seulement à la commune de Bokidiawé, qui est l’une des plus vaste et plus peuplée du Sénégal, le bilan est -il positif, y’a-t-il eu des leaders promus?
El Ousseyni Kane: Si je vous parle sincèrement, je peux dire que je suis déçu de la situation de la commune de Bokidiawé. La commune méritait mieux. Comme vous l’avez souligné, la Commune de Bokidiawé est la deuxième la plus grande du Sénégal par sa superficie et la première la plus vaste et la plus peuplée de la Région de Matam. Elle a environ 70 000 habitants. Mais, dans cette commune, nous avons en tout et pour tout qu’un ministre conseiller du président de la république et un président de conseil de surveillance.
Nous n’avons aucun ministre, aucun député, aucun membre du Conseil Economique et social, aucun directeur de société national, aucun directeur d’agence national, aucun chargé de mission, aucun ambassadeur, aucun Consul, aucun directeur national, rien, rien d’autre pour la commune la plus peuplée et la plus vaste de la région de Matam.
Cette commune regorge de cadres et nous attendons du Président de la république qu’il associe ces compétences à la gestion de l’Etat.
Pour ce qui concerne la situation économique, la Commune de Bokidiawé dispose de terres cultivables de grande qualité et en quantité. Nous avons certes le casier de Kobilo qui fait environ 700 ha et un autre casier est en cours d’aménagement dans la commune mais je pense que ce n’est pas suffisant, il y a encore d’autres casiers à faire parce que nous avons de l’espace disponible. Il nous faut un Pont au niveau de Ranwa à hauteur de Bokidiawé pour rendre les terrains du Dandé Mayo accessibles. Nous y avons une réserve de plus de 25000 ha à aménager. Il faudra aussi développer la formation des agriculteurs pour une meilleure gestion des casiers agricoles pour éviter certains manquements qu’on observe dans certains périmètres irrigués. L’Elevage est très présente dans cette commune et a besoin du soutien de l’Etat pour décoller. Il y’a des choses énormes à faire dans cette commune, il faudra seulement que les leaders politiques portent ces projets au chef de l’Etat. Cela permettra de réaliser l’autosuffisance alimentaire du Sénégal et créer des milliers d’emplois.
LVS: Qu’attendez-vous réellement de cette visite de son excellence pour la Région de Matam et la vallée?
El Ousseyni Kane: j’attends de cette visite beaucoup de débats, de discussions, d’échanges et moins de folklores. Les visites du Président surtout s’il s’agit de visite économique, ne doivent pas être le lieu pour chacun de démontrer sa force, de mettre des millions pour mobiliser les populations, qui vont délaisser leurs champs pendant une journée, de faire tout et n’importe quoi et en fin de compte ne pas parler de l’essentiel. Les acteurs politiques et économiques de la Région de Matam doivent poser au Président le débat sur la situation économique de la collectivité. Il ne faudrait pas que le Président passe à Matam et reparte avec le son des tam-tams et le bruit des pas de danse. Il faut qu’il reparte avec des doléances précises et ce qui me fait peur c’est que tous les leaders s’activent pour mobiliser des cars, des bus, pour transporter du monde, du Djéri du Wallo au lieu de se réunir et préparer avec les services de l’Etat les véritables questions. Il faut certes accueillir avec enthousiasme le Président mais il ne faut pas oublier que le président vient pour discuter avec les Matamois de leur développement. Il ne faut pas rater cette occasion. Je lance un appel à tous les acteurs politiques pour que dans chaque lieu qu’on lui explique ce qui ne va pas.
LVS: Votre mot de fin...
El Ousseyni Kane: je souhaite la bienvenue au Président de la République dans notre belle Région que nous adorons tous, je souhaite aussi la bienvenue à Harouna Dia qui va l’accompagner et à tous les acteurs de la vie politique de la Région de Matam notamment Farba Ngom, Abou Lo et Abou Diallo Ballel et nous leur disons que nous serons là pour les accueillir non pas avec les tam-tams seulement mais aussi pour leur dire ce que nous voulons et ce que les populations attendent du Président Macky Sall. J’invite aussi tous mes amis de la Région de l’accueillir dans la dignité et la sobriété. En ce qui me concerne, je rappelle à la population de la commune de Bokidiawé que je serais toujours disponible pour aider à son décollage et je suis pour cela prêt à renoncer à mes privilèges à l’étranger et à me sacrifier pour le développement de la Commune de Bokidiawé et de mon pays le Sénégal.
El Ousseyni Kane: je m’appelle El Ousseyni Kane, j’aurai 40 ans dans quelques mois, je suis né à Bokidiawé, ( Région de Matam, Département du même nom); j’ai fait mes études primaires à l’école de Bokidiawé, le collège à Thilogne et le lycée à Dakar Guédiawaye (Seydina Limamoulaye) où j’ai obtenu mon baccalauréat en 1995, j’ai obtenu ma maitrise en droit des affaires à l’Université Cheick Anta Diop de Dakar (UCAD), je suis ensuite parti en France en 1999 où j’ai obtenu trois diplômes de troisième cycle ( DEA en Droit Economique et des Affaires à l’Université d’Orléans, Master en Management des Affaires et Fiscalité, Diplôme d’Administration Publique, option Economie et Finances Publiques à l’Ecole Nationale d’Administration Française (ENA). Par la suite, j’ai commencé à travailler comme associé dans un cabinet d’Avocat d’Affaires, depuis maintenant huit (8) ans. Je suis marié et père de trois (3) filles que j’adore.
Je suis un passionné de lecture. Je lis essentiellement des essais politiques et des livres sur la religion.
LVS: Vous travailliez déjà en France, pourquoi votre retour au bercail?
El Ousseyni Kane: Je pense avoir acquis de solides expériences en France. J’ai développé un solide réseau dans le monde. Je suis arrivé jusqu’à présider un Club du Rotary International situé dans le Paris VIII, qui regroupe de prestigieux hommes d’affaires et de hautes personnalités politiques françaises. Mais je suis arrivé à un stade où je me suis posé la question de savoir ce que je peux apporter à ma localité et à mon pays.
Il fallait faire un choix entre ma vie professionnel et l’appel du devoir. Et effectivement je suis conscient que je peux apporter ma modeste contribution à l’émergence du Sénégal. Je n’ai pas le droit de renoncer à mon devoir. Et je pense que nous avons aujourd’hui dans ce pays toutes les conditions pour l’émergence et il faut juste mettre les bonnes personnes aux bonnes places pour conduire cette émergence.
Des hommes et des femmes prêts à se sacrifier, à renoncer à leurs privilèges, pour faire de leur pays un pays émergent. Et je fais partie de ces hommes et femmes parce que je ne souhaite pas assister à une nouvelle colonisation de mon pays qui ne sera pas politique mais économique. Si nous le voulons, ensemble nous pourrons développer ce pays.
LVS: Vous qui avez fait l’Université de Dakar, par rapport à la crise universitaire actuelle, quelles solutions préconisez-vous pour une université digne de ce nom?
El Ousseyni Kane: je dis d’abord que l’Université ne doit pas être une panachée. Je ne pense pas que tous les bacheliers doivent intégrer l’université. Le problème de l’école Sénégalaise ne se trouve pas à l’Université mais plutôt dans les lycées. Je crois que dans un pays en développement comme le Sénégal, il faut veiller d’abord à former des citoyens qui puissent créer demain leurs propres emplois. Il faut qu’on développe au Sénégal des lycées professionnels et des filières de formations modernes pour qu’au bout de trois ans des jeunes sortent avec un métier et que l’Etat alloue des aides à tous ces bacheliers professionnels qui pourront ainsi créer leurs propres entreprises seuls ou en s’associant. Donc on ne doit pas demander à tout le monde d’aller à l’Université et ça ne sert à rien de former des gens pour ensuite les mettre dans la rue. L’Ecole Sénégalaise doit permettre aux jeunes de sortir avec des métiers. L’Etat ne doit pas laisser la formation professionnelle aux seuls privés, privés qu’il faudra du reste bien surveiller quand il s’agit de l’avenir de notre pays.
LVS: Lors des dernières élections locales, vous étiez candidat à la Mairie de Bokidiawé, investit sur la liste de l’AFP alors que vous vous dites de l’APR. Comment expliquez-vous tout cela?
Ousseyni Kane: Vous savez, le département de Matam a connu beaucoup de chamboulements cette année, il s’est posé un problème de leadership un peu partout, pas seulement à Bokidiawé. Dans la commune de Bokidiawé, nous ne nous sommes pas entendus sur la gestion et la conduite de la liste de l’APR. Il y a eu des divergences et par la suite il a fallu que chacun fasse sa propre liste et aille à la rencontre des militants. J’étais convaincu que les personnes qui voulaient diriger cette commune-là manquaient de compétences, ils ont certes beaucoup de qualités mais la gestion d’une collectivité locale est une chose très complexe et il faut avoir un certain nombre de bagages et une certaine expérience pour y arriver.
En faisant notre propre liste, nous n’avons pas renoncé à notre appartenance à l’APR. D’ailleurs dans cette liste partie sous la bannière de l’AFP, on retrouvait plus de membres de l’APR que la liste partie avec le mandat du parti au pouvoir.
Nous sommes tous derrière le Président Macky Sall. Nous sommes allés aux élections et malgré tous les coups bas que nous avons reçus, malgré les millions qui ont été déversés par nos adversaires qui sont des milliardaires, malgré les fraudes, nous sommes quand même arrivés à faire un résultat de 40 %. Nos adversaires ont obtenu 46%, le score le plus faible de l’APR dans tout le Sénégal, ce qui démontre que ceux qui sont là aujourd’hui n’ont pas la majorité dans cette commune. Et il faut aussi souligner que mes adversaires sont là depuis trois ans et je suis là juste depuis quelques mois, cela veut dire que les choses auraient pu se passer autrement si j’avais eu juste une semaine supplémentaire, mais c’est n’est pas une mauvaise chose, je suis là pour travailler et apporter ma contribution au développement de la commune de Bokidiawé et du Sénégal. C’est pour cela qu’après les élections, nous avons dit que nous sommes prêts à travailler avec eux parce nous sommes dans un même parti et que ce qui nous intéresse c’est le développement de la commune de Bokidiawé. Mais l’autre partie a jugé meilleur de faire son bureau sans nous intégrer et créer quatorze commissions techniques sans nous en confier aucune. Ce qui est vraiment regrettable. J’aurais pu dire qu’après la défaite électorale, je plie bagages et rentre en France reprendre ma vie paisible mais je suis resté et je suis là depuis quatre(4) mois parce que je veux apporter ma pierre à l’émergence du Sénégal et à l’émergence de la Commune de Bokidiawé.
LVS: Vous faisiez face à l’entrepreneur Kalidou Wagué, qui a d’ailleurs remporté les locales dans votre Commune, comment vous justifier cette défaite?
El Ousseyni Kane: je dis qu’il s’agit d’une défaite électorale mais pas d’une défaite politique. Une défaite électorale parce que les résultats donnent vainqueur Monsieur Wagué qui est un ami, mais pas une défaite politique parce que le message que j’ai porté a été entendu par les populations et aujourd’hui ce sont des centaines d’anciens militants de Kalidou Wagué qui tapent à ma porte pour me rejoindre, des conseillers municipaux de l’autre camp qui tapent à ma porte parce qu’ils ont compris que je suis pas venu pour faire de la politique politicienne et ils ont compris que je peux aider la commune à faire un bond qualitatif.. Donc pour répondre à votre question, je dirai que c’est certes une défaite électorale mais pas politique. J’ai 40 ans et inchallah si le Bon Dieu me prête longue vie, je suis là encore pour 30 ans de vie politique et dans la vie politique il y a des défaites et des victoires et il vaut mieux commencer par une défaite et finir par une victoire. (Rires)
LVS: Pour rappel, vous êtes le fils de Baydalaye Kane qui fut le Président de la Communauté Rurale de Bokidiawé pendant plusieurs années, si vous remportiez les élections locales. Est-ce qu’on n’aurait pas dit qu’il y a une « dévolution monarchique » du pouvoir à Bokidiawé?
El Ousseyni Kane: (Rires) oui cela a été l’argument phare de mes adversaires pendant cette campagne comme quoi que j’ai été parachuté par mon père. Mon père est un homme politique doté d’une grande finesse d’analyse, avec une vie politique remplie par 40 ans d’expériences dans toute la région de Matam.
Cette dévolution aurait pu être vraie si je n’avais pas les compétences pour briguer les suffrages dans cette commune. Ça aurait pu être vrai si je n’ai jamais participé aux activités de développement de cette Commune. Cela fait 15 ans que je suis dans le développement économique et social de Bokidiawé. Je suis membre actif et a participé à la création de toutes ses associations, je suis venu au moins trois fois à Bokidiawé pour participer au règlement des problèmes du forage, à la construction d’un centre de santé et aux activités de développement de cette localité. J’ai créé ici à l’Université de Dakar, l’Association des Etudiants Ressortissants de Bokidiawé, je suis membre depuis quinze ans du bureau, en France, de l’Association de Développement de Bokidiawé en qualité de secrétaire Général. Si je n’avais rien fait pour cette localité et qu’aujourd’hui je descendais pour dire que je veux la Mairie, on aurait pu dire que je suis le fils de…mais j’ai d’abord ma carte de visite à Bokidiawé et dans cette commune, qui est en dehors de celle de mon père. Mais je suis fier de ce papa qui m’a enseigné beaucoup de choses, ce papa qui est une référence politique dans la Région de Matam et beaucoup de gens le savent et c’est vrai que cela me renforcera dans ma carrière politique.
LVS: certains disent que vous êtes très proche de l’ingénieur agronome, le milliardaire Harouna Dia, par ailleurs financier de Macky Sall, pouvez-vous élucider l’opinion sur vos liens?
El Ousseyni Kane: Harouna Dia est proche de toutes les personnes qui aident le Président Macky Sall. Et J’aide le Président Macky Sall. Harouna Dia a compris que le Président Macky Sall a un grand projet pour la Région de Matam et a décidé de se battre à ses côtés sans attendre rien en retour. Ce qui l’intéresse c’est de participer au développement économique de la Région de Matam et du Sénégal dans le cadre des politiques définies par le président Sall. Il me dit qu’il n’est pas un politicien mais un patriote, un soldat du Sénégal. Et qu’il veut apporter sa contribution au développement du Sénégal. Je partage cette vision avec lui et suis prêt à l’accompagner à côté du président Macky Sall pour arriver à ce résultat.
LVS: on prête aussi à ce milliardaire d’avoir financé votre campagne durant les locales. Est-ce vrai tout ça?
El Ousseyni Kane: Harouna Dia a compris que ceux qui étaient derrière moi étaient des militants de l’APR, des militants qui ont donné à Macky Sall sa victoire dans cette commune en 2009 déjà, en déboulonnant de grands ténors du parti au pouvoir de l’époque dans cette zone. Il a aidé à la préservation du dynamise de l’APR dans la commune de Bokidiawé.
Nous avons mené une campagne électorale extraordinaire lors de ces locales. Tous les observateurs ont apprécié et aimé la manière et la force de cette campagne.
L’APR a aidé au financement de la campagne de Monsieur Kalidou Wagué, qui n’en avait pas d’ailleurs besoin et nous nous sommes débrouillés avec mes moyens personnels, ceux de bonnes volontés et le soutien des amis et des parents et nous avons réussi à faire la campagne la plus extraordinaire de la Région. Nous avons pu délivrer un message propre sans violence.
Je suis rassuré aussi parce que je sais que Harouna Dia sera toujours disponible pour la Région de Matam pour aider à son décollage comme il le sera aussi pour le Sénégal à côté du président Macky Sall. C’est une chance pour la Région d’avoir quelqu’un comme Harouna Dia, d’autant plus qu’il n’est pas venu se battre pour des postes politiques ni pour être ministre, mais il est toujours présent quand on parle de développement de la Région de Matam et du Sénégal.
LVS: Parlons à présent de la visite économique du Président Sall dans la Vallée, en se contentant de la Région de Matam de manière générale, quel bilan faites-vous des deux ans et demi de Macky Sall au pouvoir?
El Ousseyni Kane: Le président a trouvé la région de Matam dans un dénuement total. Le régime précédant avait oublié cette partie du Sénégal. Je crois que le Président Macky Sall a une vision économique solide pour la Région de Matam. Le Président veut réaliser le rêve de faire de Matam la Californie du Sénégal et heureusement cette région détient toutes les potentialités pour être le grenier du Sénégal. Aujourd’hui beaucoup de projets sont en cours, notamment un casier agricole de plus de 1000 ha que le Président va d’ailleurs visiter à Doumga Ouro Alpha et Ndouloumadji. Nous sommes vraiment ravis que le Président revienne dans notre Région après le Conseil des ministres décentralisé pour suivre l’état d’avancement de ses projets. Je peux vous dire que la Région de Matam est en chantier et que le Président laissera un bilan extraordinaire dans cette Région. Seulement il faut qu’il ait des hommes pour accompagner tout cela, des hommes et des femmes politiques compétents et visionnaires ensemble avec des techniciens et une administration forte pour veiller à la bonne application des directives du Président. C’est l’occasion de saluer la disponibilité et la compétence de l’actuel directeur de la SAED qui mène un travail formidable dans la région. Les leaders politiques doivent, malgré leurs divergences passées, accueillir le Président dans la dignité et la sobriété parce qu’il vient pour une visite économique et poser le débat sur les questions économiques. Il y a beaucoup de choses qui restent à faire et le Président est là pour recueillir aussi les doléances des populations, il ne faut pas rater cette occasion.
LVS: si on se limitait seulement à la commune de Bokidiawé, qui est l’une des plus vaste et plus peuplée du Sénégal, le bilan est -il positif, y’a-t-il eu des leaders promus?
El Ousseyni Kane: Si je vous parle sincèrement, je peux dire que je suis déçu de la situation de la commune de Bokidiawé. La commune méritait mieux. Comme vous l’avez souligné, la Commune de Bokidiawé est la deuxième la plus grande du Sénégal par sa superficie et la première la plus vaste et la plus peuplée de la Région de Matam. Elle a environ 70 000 habitants. Mais, dans cette commune, nous avons en tout et pour tout qu’un ministre conseiller du président de la république et un président de conseil de surveillance.
Nous n’avons aucun ministre, aucun député, aucun membre du Conseil Economique et social, aucun directeur de société national, aucun directeur d’agence national, aucun chargé de mission, aucun ambassadeur, aucun Consul, aucun directeur national, rien, rien d’autre pour la commune la plus peuplée et la plus vaste de la région de Matam.
Cette commune regorge de cadres et nous attendons du Président de la république qu’il associe ces compétences à la gestion de l’Etat.
Pour ce qui concerne la situation économique, la Commune de Bokidiawé dispose de terres cultivables de grande qualité et en quantité. Nous avons certes le casier de Kobilo qui fait environ 700 ha et un autre casier est en cours d’aménagement dans la commune mais je pense que ce n’est pas suffisant, il y a encore d’autres casiers à faire parce que nous avons de l’espace disponible. Il nous faut un Pont au niveau de Ranwa à hauteur de Bokidiawé pour rendre les terrains du Dandé Mayo accessibles. Nous y avons une réserve de plus de 25000 ha à aménager. Il faudra aussi développer la formation des agriculteurs pour une meilleure gestion des casiers agricoles pour éviter certains manquements qu’on observe dans certains périmètres irrigués. L’Elevage est très présente dans cette commune et a besoin du soutien de l’Etat pour décoller. Il y’a des choses énormes à faire dans cette commune, il faudra seulement que les leaders politiques portent ces projets au chef de l’Etat. Cela permettra de réaliser l’autosuffisance alimentaire du Sénégal et créer des milliers d’emplois.
LVS: Qu’attendez-vous réellement de cette visite de son excellence pour la Région de Matam et la vallée?
El Ousseyni Kane: j’attends de cette visite beaucoup de débats, de discussions, d’échanges et moins de folklores. Les visites du Président surtout s’il s’agit de visite économique, ne doivent pas être le lieu pour chacun de démontrer sa force, de mettre des millions pour mobiliser les populations, qui vont délaisser leurs champs pendant une journée, de faire tout et n’importe quoi et en fin de compte ne pas parler de l’essentiel. Les acteurs politiques et économiques de la Région de Matam doivent poser au Président le débat sur la situation économique de la collectivité. Il ne faudrait pas que le Président passe à Matam et reparte avec le son des tam-tams et le bruit des pas de danse. Il faut qu’il reparte avec des doléances précises et ce qui me fait peur c’est que tous les leaders s’activent pour mobiliser des cars, des bus, pour transporter du monde, du Djéri du Wallo au lieu de se réunir et préparer avec les services de l’Etat les véritables questions. Il faut certes accueillir avec enthousiasme le Président mais il ne faut pas oublier que le président vient pour discuter avec les Matamois de leur développement. Il ne faut pas rater cette occasion. Je lance un appel à tous les acteurs politiques pour que dans chaque lieu qu’on lui explique ce qui ne va pas.
LVS: Votre mot de fin...
El Ousseyni Kane: je souhaite la bienvenue au Président de la République dans notre belle Région que nous adorons tous, je souhaite aussi la bienvenue à Harouna Dia qui va l’accompagner et à tous les acteurs de la vie politique de la Région de Matam notamment Farba Ngom, Abou Lo et Abou Diallo Ballel et nous leur disons que nous serons là pour les accueillir non pas avec les tam-tams seulement mais aussi pour leur dire ce que nous voulons et ce que les populations attendent du Président Macky Sall. J’invite aussi tous mes amis de la Région de l’accueillir dans la dignité et la sobriété. En ce qui me concerne, je rappelle à la population de la commune de Bokidiawé que je serais toujours disponible pour aider à son décollage et je suis pour cela prêt à renoncer à mes privilèges à l’étranger et à me sacrifier pour le développement de la Commune de Bokidiawé et de mon pays le Sénégal.